»J’habite rue Matoub Lounès à Paris… »

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“J’habite rue Matoub- Lounès à Paris… Vous vous imaginez ? Y aura des Kabyles qui vont s’y bousculer pour se permettre une telle adresse.

ça ne sera pas donné !” Le commentaire est du confrère Méziane Ourad présent ce jour où le maire de Paris, Bertrand Delanoë, avait procédé à l’inauguration de la « Rue Matoub-Lounès » dans la capitale parisienne. C’était le 3 juillet dernier, dans le XIXe arrondissement plus précisément. L’allée relie le boulevard Macdonald à la rue Emille-Bollaert. La plaque est accrochée au coin du square Claude-Bernard. Pour s’y rendre : par métro, il faut prendre la rame de passage sur Porte de la Villette. Par bus c’est par Porte d’Aubervilliers. C’est ça Paris. Pour s’y retrouver, il faut maîtriser ses portes. En faite, pour ceux qui ne le savent pas, il n’y a rien de sorcier dans l’histoire. Pour désengorger Paris, on a pensé au métro et aux « périph »… C’est une sorte de ceinture en plusieurs voies qui entoure Paris et vous permet d’accéder à la ville selon la destination de votre choix. C’est un peu comme la rocade sud de Tizi qui vous permet de rejoindre Tizi-Ouzou par plusieurs rentrée : par « l’Habitat », par « Hasnaoua », par « Anar Amellal »… On aura alors « Porte de l’Habitat », « Porte de Hasnaoua »… Sauf qu’à Paris, c’est tout autre chose… Bref ! Il y avait un grand monde ce jour-là pour Lounès. Bertrand Delanoë s’était présenté tout fier d’être là pour dire : « Voilà, j’ai tenu promesse. » Il était accompagné de Roger Madec, maire du XIXe arrondissement, et sénateur de Paris ainsi que de Pierre Schapira, adjoint au maire de Paris chargé des relations internationales, des affaires européennes et de la francophonie, député au Parlement européen. L’histoire retiendra que le mérite revient à ce trio quand bien même, il s’en sont trouvé des voix kabyles qui ont trouvé à redire… Du genre : « Pourquoi, on a écrit sur la plaque : Matoub Lounes chanteur et poète algérien d’expression berbère ? Et non pas tout juste chanteur kabyle ?  »

Pour revenir à l’événement, la cérémonie a été rehaussée par la présence de la grande famille de Lounès. A l’exception de sa veuve, Nadia. Mais sinon, les autres, il étaient tous là. Même les deux demi-frères (le frère, avocat, et la sœur)… « On a le même nez non ! » Ainsi, tentait Malika, en sourire et en larmes pour se libérer de l’émotion qui l’étranglait. N’na Aldjia passait pour la…vedette. On la félicitait de partout. Même Maxime le Forestier est allé à sa rencontre… Takfarinas, Farid Ferragui, Akli D., Allaoua le blanc (le célèbre percussionniste) pour ne citer que ceux-là, étaient également présents pour partager cette reconnaissance que lui manifestait la France. « Matoub incarnait une voie, la belle voie de l’Algérie », disait de lui Jacques Chirac. Ya boreb ! Des hommages de ce genre, le rebelle en a eu à la pelle. Et pas des moindres, ni de n’importe qui s’il vous plaît ! Les nombreux souvenirs immortalisés avec Danielle Mitterrand, le Dalaï Lama, Isabelle Adjani,…témoignent de sa grande notoriété internationale… Il a fait quasiment toutes les prestigieuses salles de spectacles. Il fut l’invité des grands plateaux des chaînes de télévision françaises. L’éblouissante Anne Sinclair qui le recevait, dans le temps, dans 7 sur 7, après Madonna, avait brusquement calé lorsqu’il lui balançait : « Madame, je préfère mourir de mes idées que de vieillesse et de lassitude… »

C’est du pur Matoub ! Rien à voir avec « comme tu le vois, je t’aime trop à mon amour ». Lounès n’est certes plus là, mais il passe pour le Kabyle le plus présent de tous sur cette terre. Son chant résonne toujours en Kabylie et ailleurs.

Chacune de ses chansons est une leçon de vie. Il demeure dans les esprits, et les cœurs des siens. Ses portraits sont partout : dans les commerces, les demeures, sur les places publiques… Idir a son cadre dans son salon, tout près du piano auquel il se met presque chaque soir. Une autre référence : un Ivoirien, un vrai, résidant en France chante du… Matoub à susciter la jalousie de Kamel Bouyakoub. Ce n’est pas une blague, le gars vit toujours.

La voix de Matoub ne s’estompera vraisemblablement jamais. Elle fuse encore et toujours des foyers, à travers les vitres des voitures, et des transporteurs…

Même en Afrique du Sud ou à Abidjan, un chauffeur de taxi pourrait vous surprendre avec une cassette de Matoub. Si ça venait à vous arriver cela ne devrait pas vous étonner, car c’est déjà arrivé à d’autres. Dites alors juste comme dirait un jour le premier locataire kabyle à rue Matoub-Lounès à Paris : « Putain, ça fait plaisir ! » Excusez le terme…

Djaffar Chilab

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