Qu’il s’agisse de la ville ou de la campagne, le marché, le souk dit-on est un espace d’échange et un lieu de vie, tout comme le café pour les hommes ou le hammam pour les femmes. On y va pour acheter les denrées dont on a besoin mais aussi pour rencontrer des gens qu’on n’a pas l’occasion de rencontrer. On discute, on échange des informations, on colporte, aussi des nouvelles : le marché jouait un peu le rôle de la presse ou de la radio. Autrefois, en Kabylie, chaque tribu avait son grand marché. La toponymie en a gardé le souvenir avec des noms composés avec le mot Larbaa, c’est-à-dire “souk du mercredi” : ainsi Larba Nath-Irathen, “souk des Nath Irathen, “Larba Nath Ouacif, “souk des Nath Ouacif, Larba Nath Ouaghlis, souk de Nath Ouaghlis etc. Les marchés étaient de grandes étendues plates que l’on prenait soin de débroussailler et qu’on débaraissait de leurs pierres, les marchands étaient regroupés en fonction des marchandises qu’ils mettaient à la vente. Et un code d’honneur non écrit prescrivait la concurrence déloyale entre les vendeurs et interdisait le vol… les marchés ont bien changé depuis : n’importe qui peut s’afficher marchand, les étals sont placés n’importe comment et la plupart des lieux choisis pour ce genre de commerce sont insalubres: enfers en été, bourbiers en hiver ! Quant aux voleurs, il sont aussi nombreux que les clients, gare à la poche que l’on peut délester de son portefeuille ou au couffin que l’on pose pour souffler. Ils risquent de disparaître en un tour de main !
S. Aït Larba
