Ifri est en effet un haut lieu à partir duquel le regard peut embrasser à la fois l’aspect politique et militaire, le civil et l’enrôlé, la métropole et le djebel, les réalisations et les tâches révolutionnaires contrariées et, de par les débats et les controverses que le 1er congrès du FLN suscite, l’intérieur et l’extérieur, voire le sillage stratégique dans les rapports interidéologiques et géostratégiques de la révolution dans les rapports internationaux. Ifir-Ouzellaguen est dépositaire de ce privilège d’une extrême complexité de par les contentieux mémoriels qui entourent le cheminement de la révolution et l’inachèvement de l’écriture de son histoire. Si le 1er congrès ne s’était pas tenu à Ifri, cet immense privilège aurait pu revenir à la Qalâa des Ath-Abbas ou à une autre localité voisine d’El-Tarf. Et si l’adresse à laquelle les 21+1 fondateurs du FLN ou le congrès de Tripoli offraient les mêmes possibilités, les débats autour de la révolution auraient pu se diversifier et s’intensifier par une sorte de concurrence des commémorations. Ce privilège, aussi complexe soit-il, se révèle donc aussi quasiment unique. Aussi cette place ferait gagner tout le monde à se rehausser d’un forum annuel, sinon permanent, sur l’histoire nationale et des décolonisations. Les collectivités locales et les associations encore actives aideraient, quant à elles, beaucoup à donner de l’âme à un tel forum en s’inspirant de la collégialité révolutionnaire en anticipant lucidement et pédagogiquement ces travers de l’histoire que certaines attitudes pourraient entraîner, et en veillant surtout à éviter des glissements dévalorisants de la révolution et certainement décevants pour l’attachement des populations aux réalisations institutionnelles de la Révolution et de l’indépendance.
Tahar Hamadache, auteur
