Le 20 août 1956 marqua une étape importante de la révolution algérienne : le 1er congrès du FLN. Celui-ci institua deux organisations supérieures à la tête du FLN : le CNRA (Conseil national de la révolution algérienne) et le CCE (Comité de coordination et d’exécution). Il mit aussi fin au paradoxe du premier exécutif que constituaient les « Neuf historiques », collégialement souverains depuis près de deux ans, mais incapables de se réunir ou d’établir des liaisons et communications au moins satisfaisantes.
Dans le texte adopté, dénommé Plate-forme de la Soummam, furent définies les orientations politiques du FLN, ses objectifs, ses moyens. Désormais, cette Plate-forme, qui fut la première tentative d’élaboration doctrinale du FLN, servira comme document de base à la conduite de la guerre. Le Congrès fonda sa légitimité sur les maquisards authentiques de l’intérieur. Ainsi, l’unanimité put être faite sur un certain nombre de questions :
– Était affirmée la primauté du politique sur le militaire, comme de l’intérieur sur l’extérieur.
– L’ALN était dotée de structures nouvelles qui faisaient d’elle une armée “moderne’’ avec grades, uniformes, tribunaux militaires. Un commandant en chef était nommé : Krim Belkacem.
– L’organisation politique du FLN était structurée. Un CNRA fut désigné qui, à son tour, élit un CCE. Ce dernier fut confié à cinq membres. Abane Ramdane, Benyoucef Ben Khedda, Larbi Ben M’hidi, Krim Belkacem et Aïssat Idir (ce dernier était en prison ; plus tard, Saâd Dahlab prendra sa place).
Ben Bella et Boudiaf, hostiles aux décisions du Congrès de la Soummam, voulaient réunir un autre congrès à l’extérieur pour les annuler. Après l’arraisonnement de l’avion de la délégation extérieure (le 22 octobre 1956), Ahmed Mahsas essaya de soulever l’ALN à la frontière tunisienne contre les décisions de la Soummam. Mais le CCE dépêcha le colonel Ouamrane pour y mettre de l’ordre et celui-ci réussit. Le CCE, pour mieux affirmer son rôle à l’échelle nationale, décida de s’installer à Alger, qu’il déclara ‘’Zone autonome’’ placée sous sa propre autorité (…)
Le Congrès de la Soummam a clarifié la situation politique du FLN en lui donnant une nouvelle direction et de nouvelles structures adaptées, mettant ainsi fin aux tâtonnements et hésitations. Le CCE préfigurait déjà le GPRA. Fort de sa légitimité, le Congrès de la Soummam a fait œuvre de “législation’’ en édictant les nouvelles règles de fonctionnement du FLN et de l’ALN, et en instituant des structures para-étatiques composées d’un conseil souverain (le CNRA) et d’un comité exécutif (le CCE) responsable devant le premier, contrairement à l’exécutif précédent des « Neuf historiques » qui n’était responsable devant personne. Mais le Congrès n’a pas empêché la querelle de la légitimité de continuer entre l’intérieur et l’extérieur, et par la suite entre “militaires’’ et ‘’politiques’’.
Abdelkader Yefsah
La question du pouvoir en Algérie
Éditions ENAP-1990