Le “gros village” se meurt

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Bouira traînera, tel un boulet, ses haouchs, écuries héritées de l’ère coloniale et convertis en habitations et ses artères désuètes et en inadéquation avec les besoins de l’heure. Bouira c’est, jusque-là aussi, l’absence criante de cachets attractifs. Depuis qu’elle a été promue wilaya en 1974 jusqu’à l’avènement des actuels responsables, elle a subi des tonnes de bétons, sans que l’imagination suive. Du coup, l’esthétique normative est desservie au détriment d’une expansion tentaculaire, sans goût et sans âme. Cet état de fait est-il rattrapable ? Il semble que oui. L’actuel wali et son chef de daïra anticipent la vision, avant le béton. Cela a déjà payé : les quatre boulevards mis en chantier et en passe d’être réceptionnés donnent une toute autre image à la ville. La petite forêt qui a supplanté un bidonville que le centre-ville supportait, depuis les années soixante, est une autre image qui participera à la réinvention de la cité. D’autres édifices publics (théâtre de Verdure, annexe de la Bibliothèque nationale, la Maison de l’environnement…) retenus pour la ville consacreront davantage “Bouira cité digne de ce nom”. Cependant, le vieux tissu urbain hérité du colonialisme pose problème à la volonté de le requalifier. Cette problématique se situe essentiellement au niveau de l’immobilier et de l’assiette foncière privée. C’est d’ailleurs cet aspect sur lequel bute la rénovation du vieux tissu urbain qui emmène le chef de daïra à organiser une journée de sensibilisation, avant-hier dans l’après-midi. La rencontre avait regroupé les responsables de l’urbanisme et de la construction, des promoteurs représentés par l’UGEA, le comité de rénovation, le représentant des notaires et des propriétaires. Après l’allocution du wali, suivront des communications portant sur “la rénovation du tissu urbain de la ville”, “la stratégie et objectifs de la rénovation de la ville de Bouira” et “la vision de l’APC vis-à-vis de la rénovation urbaine” assurées, successivement par Mme la DUC, le chef de daïra et un membre du comité de rénovation. Après ces briefings, arrive le tour du représentant des notaires. Le conférencier traitera de la “transaction du foncier dans l’indivision”. Un thème important, puisqu’il permet aux propriétaires d’être informés sur l’aspect juridique à même de leur permettre d’assainir leur situation. Seulement, le représentant des notaires à user d’une langue qui n’est pas forcément à la portée des propriétaires.

Ouvrons une parenthèse à ce propos pour souligner que cette tendance à châtier l’arabe ou le français lors des rencontres qui se veulent de sensibilisation, va à contresens de la vulgarisation, le but recherché. Cela étant, le chef de daïra rattrapera le coup, lors du débat qui s’ensuivra. Usant d’un langage clair et accessible à tous en répondant aux questions des uns et des autres, il aura permis aux concernés de mieux cerner le problème dans lequel ils pataugent. Et dans la lancée, il ne se généra pas, en donnant des exemples vivants, de remettre les “appétits disproportionnés” de quelques propriétaires à leur place. Nous retiendrons, à titre indicatif, l’exemple de ce propriétaire d’un vieux bâti qui négocie un logement, alors qu’il occupe une villa. Pour clore la rencontre, le wali apportera de l’eau au moulin du chef de daïra. Le premier magistrat sera catégorique en ce qui concerne l’esprit mercantile que nourrissent des propriétaires du vieux bâti. En gros, il rappellera que la vocation de l’Etat n’est pas de gérer la propriété privée. Cela étant, il rappellera la disposition de l’autorité à lui venir en aide dans le cadre de l’auto-rénovation, une auto-rénovation qui n’exclut pas un montage financier. Pour finir, il y a lieu de relever que le représentant des notaires s’est engagé à accompagner la démarche de “la requalification du vieux tissu”, en ouvrant gratuitement les portes des bureaux de Bouira.

T. O. A.

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