Rubrique animée par Hamid Oukaci
La Dépêche de Kabylie : Et si en commençait par la fin. Que devient Mustapha Anane ?
Mustapha Anane : Actuellement, je fais la prospection au niveau de la JSK, afin de dénicher de jeunes talents qui pourront assurer l’avenir du club. Je vous signale au passage que ce poste, je l’assure depuis trois années, avant, j’ai exercé la carrière d’entraîneur pendant plus de 20 ans après avoir obtenu mon diplôme d’entraîneur.
Si on revient à vos débuts dans le football ?
Comme tous les jeunes de ma génération, j’ai commencé à taper dans le ballon très jeune dans mon quartier à la Haute ville, et de temps en temps, on jouait à l’école primaire du quartier, justement c’est de là que le défunt Hamouténe m’a repéré et m’a emmené à la JSK pour l’intégrer dans la catégorie minimes en 1964.
Donc, vous êtes un pur produit de la JSK ?
Effectivement, j’ai fait toutes mes classes à la JSK, d’ailleurs étant junior, je participais aux joutes amicales avec les seniors. Mon premier match amical, fut face à une équipe russe, à l’époque de Ben Fedda qui était entraîneur-joueur. Il voulait me lancer et il m’a convoqué pour les rencontres amicales malgré mon jeune âge, par la suite, j’ai intégré l’équipe seniors et mon premier match fut face à Guelma.
Racontez-nous l’ambiance après la première accession
Ce fut une très grande liesse, et comment ! La JSK a retrouvé sa place parmi l’élite du football national, malgré qu’elle soit venue un peu tardivement, mais c’était dû aux méthodes extra-sportives, car parfois, on perdait des matchs à cause des arbitres, mais grâce au sacrifice de tout le monde, on a réussi à relever le défi. Je me souviens encore des dernières minutes lors du dernier match face à Boufarik à Oukil Ramdane pour assurer notre accession; je me souviens même, qu’il y avait des supporters qui ont quitté le stade avant que tout le monde n’explose de joie, après, le but de Kouffi.
Vous avez accédé en Division I et vous avez retrouvé de grandes équipes, comment vous vous êtes adapté à ce nouveau rythme ?
Certes, on a retrouvé de grands clubs mais nous aussi, on possédait un très bon groupe qui a muri et acquis une grande expérience. Ajoutant à cela, le fait qu’on possédait de très bons dirigeants qui ont su faire de la JSK un grand club, sans oublier notre cher public qui nous soutenait partout où on allait, pour venir nous encourager, et bien entendu, il y a aussi la volonté des joueurs qui jouaient pour les couleurs du club ; tous ces facteurs ont fait la force de la JSK à notre époque, la preuve durant notre première saison en première division, on a terminé 4e du championnat et demi finaliste en coupe d’Algérie.
Mais l’équipe commençait à vieillir et il fallait injecter un nouveau sang dans le groupe ?
Effectivement, durant notre premier titre on a vu l’arrivée de plusieurs joueurs, à l’image de Larbes, Dali, Aouis, Cerbah, mais, je vous assure que cela nous n’a gêné nullement, la preuve et qu’on a terminé champion. Je vous rappelle que l’année, d’avant, on l’a échappé belle, n’était-ce notre dernier succès à Oukil Remdane face au MO Constantine, et c’était moi, qui ai marqué l’unique but de la rencontre au début du match, d’ailleurs, El Moudjahid a titré le lendemain dans sa page sportive « Anane, le but du maintien ».
Racontez-nous l’ambiance au sein du groupe ?
A la JSK, on était une vraie famille, on vivait dans une grande osmose, on avait cette rage de vaincre pour représenter toute la région de la Kabylie, d’ailleurs même les joueurs qui sont venus d’ailleurs se sont vite intégrés dans le groupe car, on ne trichait pas. On mouillait nos maillots sur le terrain, on se donnait à fond pour notre club pour rendre heureux notre merveilleux public qui était toujours derrière nous. Quand on perdait un match on se cachait à la maison par respect justement à ce public qu’on avait déçu mais, nos supporters sont des connaisseurs et ils savent très bien que nous nous sommes donnés à fond, d’ailleurs, je garde l’estime et le respect du public jusqu’à nos jours et c’est une chose qui me fait vraiment plaisir.
Pourquoi en vous surnomme le poumon de la JSK ?
Effectivement, j’avais plusieurs surnoms, et parmi eux, le poumon de la JSK, et cela est dû au poste que j’occupais puisque je jouais en 6, et je fournissais beaucoup d’efforts sur le terrain. J’étais infatigable, donc, on m’appellait comme ça et ça me faisait toujours plaisir qu’on reconnaisse mes efforts sur le terrain.
Malgré que vous aviez occupé un poste plutôt défensif mais vous avez inscrit beaucoup de buts, quel est le secret ?
Effectivement, malgré mon rôle de milieu de terrain, je contribuais souvent aux offensives, d’ailleurs j’ai marqué plusieurs buts, des fois décisifs comme celui que j’ai marqué face au MOC où on a assuré le maintien. J’arrive aussi, a marqué des buts spectaculaires comme le but que j’ai inscrit face au RC Kouba d’un tir puissant du milieu du terrain.
Quels sont les moments forts que vous avez vécus avec la JSK ?
En réalité, j’ai passé beaucoup de bons moment avec la JSK, des moment inoubliables comme l’accession, le premier championnat, chaque victoire de mon club me remplissait de joie, mais le titre qui m’a vraiment marqué, c’est incontestablement la finale remportée face au grand NAHD. Je me souviens qu’avant le match notre adversaire a mené une guerre psychologique pour nous déstabiliser, mais nous en contrepartie on est rentré en regroupement à Sidi Fredj, loin de la pression. Avant le match, on a fait une réunion entre les joueurs et on a juré de ramener la coupe avec nous à Tizi Ouzou, Dieu merci, chose faite, on a réussi à remporter le premier doublé de l’histoire de la JSK.
Vous-avez aussi de mauvais souvenirs ?
Malheureusement, j’ai vécu des moments très difficiles à cause d’une blessure que j’ai contracté en 1978 durant le stage d’intersaison, ce qui ma éloigné des terrains pendant plusieurs mois. Il y avait aussi la manière dont j’ai quitté la JSK, qui m’est restée en travers de la gorge. En réalité j’était prêt à continuer au-delà de la saison 1979/1980, mais quelque part, j’étais forcé à arrêter à cause de l’entraîneur qui me faisait remplacer chaque fois ; un jour, j’ai claqué la porte et je l’ai quitté définitivement.
Donc vous avez arrêté de jouer en 1980 ?
Non, après avoir quitté la JSK, j’ai continué à jouer deux années avec l’ASTO, durant la première saison, on a raté l’accession en division deux, face à El Biar par les tirs aux buts ; l’année d’après, j’ai intégré l’équipe de Draâ Ben Khedda, comme entraîneur-joueur, et c’est là, que j’ai mis fin à ma carrière de joueur en 1983.
Avez-vous entamé une carrière d’entraîneur ?
Absolument, après avoir passé le stage d’entraîneur, j’ai dirigé plusieurs clubs à l’image de Baghlia, Larbaâ Nath Irathen, Sidi Aissa, j’ai aussi entrainé les juniors de la JSK, avant de me reconvertir au poste de prospecteur des jeunes depuis trois années comme je vous l’ai dit auparavant.
A votre avis, quelle est la différence entre la JSK de votre époque et celle d’aujourd’hui ?
Vous savez, à notre époque, on jouait avec le cœur et pour les couleurs du club, on se donnait à fond sur le terrain. L’argent ne comptait pas beaucoup pour nous, ce n’est pas comme aujourd’hui. Je vais vous parler d’une anecdote, un jour, l’ancien joueur malien de la JSK, Demba est venu au bureau du président je lui ai montré la photo de l’équipe qui a remporté le doublé en 1977, il m’a dit « vous avez eu sûrement des valises remplies d’argent », et quel fut son étonnement quand je lui ai répondu que la seule récompense était un téléviseur couleur.
Un mot sur la qualification de notre équipe nationale au prochain mondial ?
Je pense que c’est une qualification amplement méritée, je rends un vibrant hommage aux joueurs qui ont su négocier le dernier match, car ils ne sont pas tombés dans le piège des Egyptiens, je crois qu’on a une très bonne équipe, très solidaire.
Un dernier mot pour conclure ?
Je vous remercie pour cette rubrique que vous avez réservé pour faire connaître à la nouvelle génération, les ancien joueurs de la JSK ; je profite de l’occasion pour lancer un appel à toute la famille de la JSK de se départir de leurs différends et se donner la main ; afin de redonner à notre cher club son lustre d’antan.
H. O.
Pour vos contactes itranddk@yahoo.fr
