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Le professeur Sanhadji à cœur ouvert

Son profil de chercheur éminent en immunologie, s’intéressant plus précisément à la transplantation et au sida, n’a pas changé d’un iota les liens plus qu’affectifs de cette personnalité scientifique à son pays natal, l’Algérie, à qui il veut “greffer” son domaine celui de la recherche scientifique dont il dit attirant et prometteur. Depuis 2002, le chercheur convaincu de mêler politique et science est conscrit candidat sur la liste FLN, immigration, pour dira-t-il donner son souffle à la recherche scientifique dans notre pays. En visite au pays, ce natif de Kouba dont les parents sont originaires de la vallée de la Soummam s’est pressé de rendre visite à quelques services de l’hôpital Benmerad-El-Mekki de la ville d’Amizour où il se trouvait. Voyant la grandeur de leur hôte, les autorités de cet établissement l’ont invité à une petite rencontre avec le représentant d personnel et la presse locale. Humblement, le chercheur a parlé avec des termes simples sur les avancées de la science dans le traitement du sida, sur le rôle de génie génétique dans la transplantation d’organes et aussi d’un projet qui lui tient à cœur, celui de la création d’un laboratoire de recherche en immunologie, ici même, en Algérie.

Sida : le vaccin n’est pas pour demainLa maladie du siècle qu’on connaît sous le nom de syndrome immuno déficitaire acquis, ou sida, (aids chez les Anglos-saxons) n’est pas reconnue comme la bête noire des chercheurs et ce, en dépit de milliards investis dans la lutte contre le virus HIV sans pour autant arriver à trouver un remède définitif à cette endémie ayant infectée déjà quelques 50 millions de personnes dans le monde. Car, pour le chercheur Kamel Sanhadji, “depuis que la science et la recherche se sont penchés sur le sida, la médecine a évolué de plusieurs crans et beaucoup d’autres maladies ont été depuis mieux élucidées et plus connues.”Ce syndrome reconnaît le professeur ne tue plus comme avant et ce, grâce à la découverte de la multithérapie qui ne consiste pas à guérir définitivement mais à prolonger la vie des malades atteints depuis plusieurs années.“Avec la trithérapie (association de trois médicaments), nous avons pu assurer une survie de 10 à 15 ans et la médecine actuellement songe à passer à la quadrithérapie, la recherche progresse a faire gagner plus de temps au malade et la science.”Comment peut-on expliquer cette impuissance de la science et des chercheurs à fabriquer un vaccin seul moyen efficace et préventif à mettre un terme à ce virus HIV ravageur de l’humanité ?La question est simple dira le chercheur, c’est une équation purement biologique difficile à résoudre jusqu’à l’heure actuelle.“Le virus a des capacités d’esquisse en changeant et un renforçant sa coquille externe à chaque fois qu’il se trouve confronté à une nouvelle substance pharmaceutique capable de le détruire, c’est un virus qui est mutant”. Il y a de bonnes et mauvaises nouvelles concernant le sida si la recherche du vaccin anti-HIV n’est pas pour demain, malgré les travaux toujours en cours, il faut penser aux malades déjà atteints et encourager d’autres moyens prophylactiques selon notre interlocuteur qui ajoute : “Pour éradiquer le virus du sida d’une manière complète, il faut stimuler et éduquer le système immunitaire seul capable de nettoyer le corps de la charge virale.” Ce nouveau remède est déjà sur les paillasses du laboratoire du professeur Sanhadji. Il s’agit de ce que les scientifiques appellent la thérapie génétique. Ses premières retombées sont déjà optimisantes, nous a fait reconnaître Sanhadji.“La formule est simple à comprendre : le virus du sida vit uniquement six (6) heures dans le sang puis rejoint les globules blancs (GB) où il se fixe sur les récepteurs (CD4) d’une partie de ces cellules sanguines qu’on appelle les lymphcytes T, agents du système immunitaire chargés de défendre l’organisme de toute intrusion virale ou microbienne. La recherche actuelle consiste à reproduire ou à fabriquer (artificiellement) d’autres lymphocytes T avec leurs récepteurs analogues au (CD4) des cellules types Taïwan qu’on injectera aux malades infectés par le HIV. Cela permettra au virus de s’inoculer sur les fausses cellules du système immunitaire. Au bout d’un temps, les cellules reproduites au labo et ayant capté une bonne charge virale vont mourir biologiquement et seront éliminés par la voie physiologique. Cette thérapie est au stade expérimental sur des petits animaux proches de l’homme, il faut cinq ans peut-être pour passer de l’études in vitro au stade in vivo c’est-à-dire chez l’homme.En parallèle, le laboratoire du Pr Sanhadji, à l’instar d’autres chercheurs, travaille sur la maîtrise et la manipulation de la génie génétique et de l’umminologie pour faire avancer la médecine de la transplantation d’organes. Une technique de pointe qui peut permettre à des millions de malades chroniques de retrouver leurs fonctions organiques déficitaires, un remplacement de l’organe défectueux par un autre similaire qui peut provenir d’un être humain et peut-être d’un animal, d’un mammifère.Pour le sida, les chercheurs s’apprêtent à mettre à la disposition des malades infectés par le virus HIV un cocktail de quatre substances pharmaceutiques qui permettra d’améliorer l’état général du malade et de lui faire gagner plusieurs années, de vie.“Le terme porteur sain est à bannir”, dira le professeur qui explique que “tout individu infecté par le virus du sida (séropositif) pourra un jour ou l’autre après même plusieurs années, manifester des signes de ce syndrome.”Il y a 15 à 16 000 personnes infectées en Algérie par le virus du sida, fera avancer l’orateur en faisant foi des statistiques données par ONUSIDA. Selon cette même organisation mondiale, sur les 50 millions de personnes infectées dans le monde, 40 millions appartiennent à la partie Sud du globe, donc 90% de pays touchés par ce syndrome sont du tiers-monde.Un paradoxe dira le Pr Sanhadji, car “la trithérapie, traitement actuel contre le sida n’est pas distribuée d’une manière équitable où 90% de ce remède sont destinés aux pays riches représentant 10% des personnes atteintes dans le monde, et 10% seulement sont réservés aux pays pauvres représentant 90% des malades”. L’Afrique est le continent le plus vulnérable, vu ses aspects sociologique, culturel, économique et politique où même la transmission du virus par le lait d’une mère atteinte à un bébé représente quelque 10% selon le Pr Sanhadji. Enfin la recrudescence de la promiscuité notamment la prostitution et la drogue en Algérie et en Kabylie font peur au professeur qui a reconnu que les tabous sont aussi des facteurs à combattre pour diminuer la propagation du sida, dont le coût du traitement par personne n’est pas considéré comme une bagatelle.

Labo de recherche : un projet qui dérangeUn parcours du combattant qui a duré six ans. Le professeur ne désespère pas et, sans lâcher prise, il continuera toujours à faire croire que le domaine de la recherche scientifique est un champ d’investissement très prometteur en Algérie. C’est pour cela qu’il a été invité par Amar Tou, ministre de l’Enseignement supérieur de l’époque.“Il a rapidement accepté mon idée de créer à Alger un département de la recherche scientifique qui s’intéressera plus précisément à l’immunologie”. Le rêve de voir le projet concrétisé est tombé comme un château de cartes.“Suite à de multiples problèmes bureaucratiques, je voyais l’équipe, mise au service de ce projet se disloquer complètement”. Le professeur a tiré des enseignements dans ce projet avorté. “Le problème ne se situe pas au plus haut niveau, au contraire, mais ceux qui mettent des bâtons dans les roues sont des responsables moyens.”

Que faut-il faire pour faire aboutir le projet ? “Une fois député national j’ai pu utiliser ma casquette politique pour remettre de nouveau sur le tapis cette nécessité de créer des labos de recherche pour nos futurs universitaires et nos hôpitaux. Heureusement que tous mes camarades de l’Hemicyle, toutes tendances confondues ont été à mes côtés car on voyait en moi un homme de science plus que celui de politique.” Mais c’est surtout l’arrivée d’Ahmed Ouyahia à la tête du gouvernement que le bout du tunnel commence à apparaître au chercheur : le projet vient d’être repris et soumis à l’étude avec une seule condition celle de l’évacuer hors de la capitale, un recours qui a accepté de faire pour échapper aux des mains de ceux qui l’ont étouffé dans l’œuf. L’université de médecine de Tizi Ouzou est devenue le gilet de sauvetage de ce grand projet qui a accepté de mettre son site au service de ce chercheur international.“L’université de Tizi Ouzou recèle un potentiel humain très compétent dispose aussi d’infrastructures très conformes à mon laboratoire.” Quatre équipes sont déjà mises en place, chapeautées par un médecin hématologue sous la direction technique du professeur Sanhadji.“Le matériel sera disponible en quantité et en qualité pour dynamiser la recherche et faire bénéficier la transplantation d’organes dans notre pays ainsi que le travail sur la génétique et le sida.”

Nadir Touati

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