Les cafés et les places publiques ne désemplissent pas à longueur de journée. Et ce n’est certainement pas de gaieté de cœur que ces jeunes et moins jeunes passent leur temps “à compter les passagers” où à siroter leur café “en prenant tout leur temps”. C’est que, ceux-ci n’ont rien d’autre à faire. En un mot ils sont chômeurs. Certes le dispositif de l’ANSEJ et des autres organismes du genre a réussi à sortir des familles entières du marasme, des familles qui se retrouvent du jour au lendemain “fortunées” en bénéficiant d’un matériel coûteux avec en sus des voitures, mais dont les remboursements risquent de s’avérer compliqués. Qu’à cela ne tienne, l’essentiel étant que des jeunes et des pères de famille soient désormais préoccupés par leur travail que leur ont offert l’ANSEJ et autres. Mais toujours est-il que des pans entiers de la société souffrent des affres du chômage dont les conséquences peuvent s’avérer désastreuses. Le banditisme, les vols mais aussi les suicides qui prennent de l’ampleur dans la région sont très étroitement liés à ce phénomène du chômage. Pour les spécialistes, ce dernier explique les autres. En somme, Tizi-Ouzou n’est pas encore sortie de l’auberge, l’emploi n’est pas disponible. Les entreprises publiques et privées ne recrutent plus et quand elles le font, c’est sur la base d’une expérience qu’elles exigent et qu’elles ne trouvent pas chez les nouveaux diplômés. Ces derniers découvrent, la mort dans l’âme, que la fameuse attestation de fin d’étude qu’ils ont obtenue après plusieurs années de sacrifice n’est pas suffisante pour accéder à la vie active telle qu’ils l’ont imaginée. L’expérience, la condition sine qua non pour espérer avoir “le boulot de ses rêves”, il faudra aller la chercher ailleurs, en acceptant des postes “pré-emploi” à un salaire de misère. C’est en quelque sorte le prolongement de la formation reçue à l’université, une sorte de stage pratique. Que dire alors des employés de l’IAIG et de l’Esil qui touchent 3 000 DA par mois pour la première catégorie et 1 300 DA/mois pour la seconde. A Tizi-Ouzou, ils sont des centaines à faire des sans-emploi leur unique gagne-pain, avouons que c’est aberrant pour la classe “A” de la société algérienne. Et quand on sait que la vie devient de plus en plus dure, on peut aisément imaginer dans quel état vivote à Tizi-Ouzou cette catégorie. Ce n’est certainement pas par hasard que la mendicité se généralise à travers la wilaya. Une wilaya qui a hérité de cette réalité frappante et qui a considérablement contribué à l’aggravation du chômage et de sa conséquence directe, la pauvreté. Plusieurs entreprises ont plié bagages au début de cette décennie, pour s’installer sous des cieux plus cléments. D’ailleurs, des centaines de jeunes et pères de famille ont également préféré fuir la wilaya en quête d’un emploi dans d’autres wilayas. Leur distination de prédilection est le sud, où plus d’un a fini par trouver son compte. A Tizi-Ouzou, en somme, ce n’est pas encore l’Amérique. On allait l’oublier, il faut pourtant signaler que des centaine de Kabyles continuent à gagner leur pain dans “l’eldorado” que constitue pour eux l’oued Sebaou où le pillage du sable est devenu un métier qu’on pratique “au noir” dans la capitale du Djurdjura.
M. O. B.