De l’art pour augurer un nouvel an joyeux

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Afin de renouer avec les familles et les auditeurs et dont l’objectif est de promouvoir et développer la langue et la culture amazighes, la Chaîne II de la Radio nationale a tenu, avant-hier, à célébrer Yennayer, en concoctant un programme riche où le public présent à l’auditorium Aïssa-Messaoudi, les auditeurs ont eu droit à plusieurs aspects culturels. Entre la chanson et la musique, pour cette fois-ci, la chaîne II a tenu à rendre un vibrant hommage à Muhend U Yahia, à travers sa célèbre pièce Sin nni, interprétée par le duo Tareb et Hadj-Ali du Théâtre régional de Bgayet. Un autre hommage pour les artistes, notamment la diva Nouara et le maître Medjahed Hamid, en présence d’une pléiade d’artistes, à l’instar de Si Moh, Lani Rabah et Djaffer Aït Menguellet. La rencontre d’avant-hier a su réunir d’abord des familles pour fêter le Nouvel An amazigh, deux générations d’artistes pour partager le même plateau. En somme, le gala spécial Yennayer, lors de l’émission Ighzif Ay Id, a réuni le temps des retrouvailles artistiques, des familles éprises de rencontres animées avec leurs idoles.

Si Moh pour donner le là !

La pièce de théâtre Sin nni de Muhya, interprétée par les jeunes comédiens du TR Bgayet donnait déjà comme un avant-goût à une soirée qui se veut riche en couleurs. L’histoire de deux immigrés résidant dans un sous-sol parisien. Se chamaillant sur les projets et la conception de l’immigration chez tout un chacun, les deux amis, le premier étudiant et le second venu gagner sa vie, ont fini par perdre tout espoir lié à leur projet d’avenir. L’un remet aux calendes grecques l’écriture de son ouvrage, l’autre délaissant le projet qui lui tenait à cœur, revenir au pays et bâtir une somptueuse villa pour ses enfants et sa dulcinée Ouardia.

La pièce, mise en scène par le talentueux Mouhoub Latrèche, pour rappel, Mouhoub a joué plus de 600 fois cette pièce, il estime que « le public la demande souvent », donc, c’est pour cette raison, que « nous avons décidé de la monter encore une fois sur scène ». En dernier lieu, Mouhoub a ajouté que d’autres projets sont en cours, avec, notamment, le Théâtre régional de Bgayet. Il s’agit d’une autre adaptation de Muhya, Si Partuf, (Tartufe de Molière)

Juste après la pièce, place à la musique. C’était si Moh, avec sa voix mélodieuse et ses rythmes doux de donner le là pour une soirée qui a promis d’être exceptionnelle et qui a tenu ce pari.

Interprétant quelques chansons, Si Moh, comme à l’accoutumée, a su regagner, encore une fois, le cœur d’un public qui le chérissait depuis.

Le choix des artistes et des styles n’étant pas fortuit. Ainsi, les organisateurs ont, directement enchaîné avec Djaffer Aït Menguellet trois chansons. Cette étoile montante de la chanson kabyle a, elle aussi, « secoué » le public qui a repris ses chansons en chœurs.

Ensuite, c’était au tour de Lani Rabah de donner sa prestation. Pour cette fois-ci, Rabah a choisi ses anciens titres, ceux qui lui ont donné cet éclat d’artiste à la voix idolâtrée. Il était le maître à bord, Rabah a su mener à bien son bateau et son équipage. Enchaînant sans tergiversation sa « triptyque » sans laisser le public se perdre. La prestation de ces artistes était surtout cette communion créée entre eux et un public qui sait s’adapter et apprécier de tels moments. Ce public sevré a enfin renoué avec les moments de joie et de gaieté. Le gala d’avant-hier soir n’était pas seulement une rencontre quelconque, mais la symbolique de la date, le choix de l’émission et des invités est monumental dans la mesure où il signe d’abord, d’un signe de bon augure, un retour d’une émission phare de la chaîne II et ensuite, les hommages et la célébration de Yennayer, jour de l’An amazigh pour dire toute la culture amazighe.

L’échange entre les artistes et le public fut spontané mais combien méritoire pour les deux parties qui se retrouvent, chaque fois, avec autant de bonheur.

Medjahed Hamid, Nouara deux carrières, même succès !

Une carrière de plus de trente ans, mais la vitalité de sa jeunesse est restée la même. Medjahed Hamid, puisque c’est de lui qu’il s’agit, n’est pas près de laisser tomber sa passion pour la musique. Ainsi, la tendresse de sa voix se sent avec la même tonalité d’il y a trois décennies. Qui des auditeurs kabyles n’était pas ébloui par la célèbre chanson Ay ul ou D kem ? Nul ne pourra l’infirmer surtout en ces moments où Medjahed Hamid renoue avec la scène. Sur scène, Medjahed Hamid, la grandeur est son caractère, parait toujours comme le guide ou le maître que l’on entendait sur les ondes de la Radio lors de l’émission, Icennayen uzekka. Charismatique sur scène, Medjahed Hamid, en croisant les jambes, tient avec une douceur infinie son instrument fétiche, sa mandoline pour laisser libre cours à des immortelles interprétations. Il sait manier l’instrument, dont les artistes, réunis, en face de lui, se disent, éblouis par « sa frappe ». D’autres disaient que c’est un vrai technicien.

Medjahed Hamid ne quittera pas la scène aussitôt sa prestation terminée, mais il restera pour accompagner Nouara, qui, comme lui, réapparaît sous les ovations et les youyous du public. Avant qu’ils ne prennent place sur scène, l’animatrice les invitent à ses côtés et se donnent à cœur joie pour des questions-réponses. Pour Nouara, qui n’a pas omis de rendre hommage a Dda Cherif Kheddam, en lui souhaitant un prompt rétablissement.

Apostrophée sur les raisons de son absence, Nouara n’a pas mâché ses mots. Elle a évoqué la condition de la femme kabyle en général. Pour elle, même si la femme a eu accès aux études, au travail, elle reste toujours sous commandes d’autrui. Un constat lourd de sens, émis par une femme artiste qui ne cesse, malgré son absence, son âge, de créer l’événement. Avec Medjahed Hamid, ils ont promis un retour tonitruant sur scène (voir encadré) « La quintessence de ses mélodies ont su préserver sa mélodieuse voix qui, à son âge, chante aussi juste, sans que son timbre vocal ne prenne de rides ». Cette phrase est de Belaïd Branis.

Elle résume, on ne peut plus juste, sur Nouara et ses superbes prestations musicales. Enfin, oui ! Ni les années ni le temps n’ont eu raison de sa belle voix. Elle reste incontestablement, la meilleure voix de la chanson kabyle.

Cela ne va pas sans dire que les autres femmes artistes n’ont pas de belles voix, mais celle de Nouara est gravée dans l’histoire de la chanson Kabyle. Elle est unique dans son style. Elle le restera ainsi pour l’éternité. Presque minuit, le duo Nouara-Medjahed Hamid ne peut en aucun cas mettre fin à la soirée puisque le public les sollicitait davantage. Au programme, trois chansons, mais l’insistance du public l’a chamboulé.

Nouara va interpréter encore plus, pour que le public puisse assouvir sa soif. Sa voix d’or dominant la salle de l’auditorium replongeait le public dans les années de sa jeunesse. Elle n’a pas perdu de son aura, elle restera unique !

M. Mouloudj

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