Chanson : Steqsi ul-iw le nouvel album de Aldjia

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Après «Zwag Ughurru» sorti en 2008, la chanteuse Aldjia revient cette année avec un nouvel opus, tout en rose, sorti la semaine dernière dans les bacs.

Intitulé «Steqsi Ul-iw», ce nouvel album se veut toujours fidèle à l’image de la chanteuse et représente toute sa dimension artistique qu’elle cultive maintenant depuis trente années. En collaborant en harmonie avec ses compositeurs et paroliers tels que Karim Slaïm, Mariche Hacène et Meradi Omar, elle en sort du studio la Muz avec un album complet où les thèmes varient et les mélodies épousent formidablement les paroles interprétées par une voix douce de plus en plus entraînante, se ressentant à fleur de peau et le tout enregistré mixé et arrangé par Madjid Halit.

La première chanson qui est le titre de l’album est une berceuse d’amour et de complainte avec tous les paradoxes où la fille dont l’amour est trahi est confrontée à une situation contradictoire partagée entre le pardon difficile ou la rupture, non sans retombées. Le deuxième titre Islan (Les mariés), comme le premier, représente un hymne au mariage enrobé dans un folklore typiquement kabyle; C’est un hommage rendu aux mariés dans une cérémonie de henné avec un air en Tivugharine, sous un rythme quatre-quatre qui accompagne les louanges lancées par alternance aux deux mariés. Une chanson originale qui célèbre l’union par le mariage mais aussi par l’amour.

Serhemt iteghratine (Faites-nous des youyous), n’est que la suite de la précédente, elle invite, avec son rythme intense et son dosage d’instruments, à faire la fête et danser sous ses vibrations. Elle décrit un climat de joie et de bien être, de relâchement jusqu’à l’aube.

Elle rend hommage à Zohra…

Dans le neuvième titre, Aldjia rend un vibrant hommage à Zohra avec la reprise de la chanson émouvante de cette dernière, «Akehkugh», une chanson qu’elle interprète avec une grande fidélité dans un style et un grand respect pour la structure de l’œuvre, à savoir le prélude «acewwiq», et la justesse dans les couplets et refrains. Sur le plan musical, les arrangements sont fait avec beaucoup plus d’instruments. A travers cet hommage, Aldjia voudrait se recueillir auprès de Zohra, saluer son œuvre mais aussi briser le mur de l’oubli autour de la cantatrice des ath Irathen et montrer encore au jeune public le talent de la regrettée Zohra. Awin uryengi leqdar, Ditilik, sont deux chansons qui décrivent pour la première, l’amour trahi et le manque de respect pour la femme, et pour l’autre, la possessivité et la morbidité dans un couple avec toujours une vision féminine.

Taqvaylit, Ilikem kan dkem et Yiwen wawal, sont autant de titres à découvrir, vêtus de thèmes sensibles comme l’honneur, le combat féministe et les racines.

Steqsi Ul-iw est un album venu pour sortir un peu du stéréotype dans lequel la chanson estivale baigne avec une uniformisation morbide du rythme, mélodie et thème. Aldjia propose un travail pur et intemporel avec un style qui se refuse d’être à la mode mais qui ne risque pas de démoder.

La voix inépuisable de la femme

Depuis plus de trente années et ses débuts avec le prestigieux groupe Djurdjura en 1979, la chanteuse kabyle Aldjia ne cesse de nous enchanter avec ses sublimes mélodies et sa belle poésie féminine qui s’inspirent des louanges et des complaintes de nos grand-mères. Tirées d’un profond terroir véhiculé par le chant féminin qui, à travers l’espace et le temps défie toute mode, sa chanson atypique est à son image pure; avec sa belle allure, ses belles robes et sa joaillerie kabyle dont elle ne se sépare jamais, elle interprète ses chansons douces, sensuelles et rythmées avec une voix pleine d’innocence mais parfois remplie de colère. Connue beaucoup plus par le grand public après le succès de son tube arrouba nechache, sorti en 1987- une chanson dont chacun a fredonné au moins le refrain-, elle n’a cessé de produire des albums tout en gardant le même style, la même allure et une énergie qui ne s’épuise jamais avec le temps. De Rruba Neccac (1982) à Zwag Ughurru (2008), passant Assimouh Ouali et encore Siwlas Ayafroukh et Afzim. Aldjia a su porter haut et fort la voix de la femme kabyle, celle du village confrontée quotidiennement au dictat de la société ou simplement à celui de l’homme. En traitant de l’amour interdit, le mariage forcé les mauvais moeurs et le machisme kabyle, elle se fait la voix de la femme réprimée inspirant des centaines de milliers de jeunes filles, leur donnant l’espoir de pouvoir s’émanciper un jour.

Djillali Djerdi

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