La saison des figues fraîches tire à sa fin après avoir été durant deux mois à l’origine d’un rush sans précédent cette année sur les vergers de figueraies, en raison de sa coïncidence avec le mois sacré du ramadhan. Il est utile de signaler que dans la région de M’chedallah, ce fruit exotique très prisé est toujours offert gratuitement par les propriétaires des figueraies à ceux qui n’en possèdent pas ; ce qui est une aubaine pour ces derniers, puisqu’il remplace sur les meidas les autres fruits, dont les prix sont hors de portée pour la plupart des bourses. La saison de ce délicieux fruit, cultivé depuis la nuit dés temps en Kabylie constitue, avec l’olivier, l’unique richesse de nos aïeuls, dont que le niveau de richesse de chacun, s’évaluait selon le nombre de pieds d’oliviers et de figuiers qu’il possède. Donc, immédiatement après la saison des figues, les éleveurs lâchent leurs cheptels dans les vergers des figueraies : après la ripaille des citoyens commence celle des animaux ruminants bovins ovins et caprins, qui trouvent là une pitance. A commencer par les figues abîmées ou de mauvaise qualité abandonnées sous les arbres, celles hautement nutritives pour le bétail, asséchées avant maturité par la canicule du mois de juillet dénommées localement sous le vocable «Amjah» ou «Akerkouche» dans certaines régions de Kabylie. Avant la fabrication et l’industrialisation des aliments de bétails, nos ancêtres font des provisions de grains de figues immatures, de caroube et de glands qu’ils utilisaient pour l’engraissement du bétail, méthode abandonnée depuis l’apparition d’aliments fabriqués à base de maïs de sorgho et soja, une composante avec laquelle on obtient un engraissement rapide. Après les figues abîmées et celle immatures, le bétail ruminant se nourrit des feuilles de figuiers qui, en plus de servir de nourriture nutritive, provoquent chez l’animal un déparasitage parfait, en éliminant tout les vers tel que les ascaris, les oxyures et même le ténia animal, grâce a la sève contenue dans ces feuilles, une matière qui s’apparente au vermifuge et antiparasites fabriqués en pharmacie. Les éleveurs qui ne mènent pas leurs bêtes dans les champs leurs ramènent quotidiennement des sacs remplis de ces feuilles qui remplacent, durant tout l’automne, le foin et la paille. Dans ces régions reculées de Kabylie l’on continue toujours à utiliser la cendre obtenue des branches mortes du figuier, comme une composante du tabac a chiquer (chema), un autre procédé millénaire, à la simple différence qu’à la place de la boite ronde et plate en fer blanc ou encore des récents petits sachets en cellophane pour y mettre sa ration de chema (tabac a priser), nos ancêtres utilisaient des cornes de bœufs, ces mêmes cornes qu’utilisaient les «vikings» pour orner leurs effrayants casques. Malheureusement le figuier subit une redoutable agression depuis ces 20 dernières années, avec l’apparition d’une étrange maladie qui a décimé des vergers entiers, en attaquants les figuiers au niveau des racines. Un cas évoqué par le passé dans ces mêmes colonnes, mais qui ne semble pas inquiéter, pour autant, les services de l’agriculture. Certes, le figuier est moins résistant que l’olivier et que sa fragilité nécessite beaucoup plus de soins et d’entretien. il est abandonné depuis l’avènement du terrorisme et de l’insécurité particulièrement les parcelles éloignées. Un état de fait aggravé par l’exode rural massif vers les zones sécurisés ; mais cette maladie sévit même dans les figueraies bien entretenues. C’est pourquoi elle nécessite des recherches de la part des ingénieurs agronomes pour en détecter l’origine et lui trouver un traitement.
La prolifération de sangliers, qui s’attaquent aux figuiers en leur brisant les branches, est aussi l’un des facteurs de leur destruction et du net recul du nombre de figuiers qui reste dans la région.
Oulaid Soualah
