«Si la JSK ou l’EN me sollicitent, je prendrai le premier avion»

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Originaire de Beni-Douala et ayant fait toutes ses classes à la JS Kabylie, ce jeune et ambitieux technicien est très au fait des arcanes du football algérien. Dans cet entretien qu’il nous a accordé de France où il réside et prépare un master en performanceet entraînement sportif, il livre ses impressions sur l’épopée des Verts, sa conception du football moderne et ses ambitions de rentrer un jour en Algérie afin de mettre en pratique ses connaissances et transmettre ses compétences. Il dit être disponible si on faisait appel à lui. Pour le reste, écoutons-le plutôt !

La Dépêche de Kabylie : Pour commencer, présentez vous à nos lecteurs.

Nadjib Berchiche : J’ai 33ans, je suis né à Alger, j’ai commencé à taper dans un ballon très jeune. J’ai été sélectionné à la JS Kabylie dès l’âge de 9 ans où j’ai fait toutes les catégories jusqu’aux Espoirs (1998), J’ai effectué quelques apparitions en équipe nationale des jeunes. De 1999 à 2002 j’ai joué dans des clubs de D2 et de régional (Khemis El Khechna, Bordj El Kiffane, Boukhalfa…) en 2002, j’ai pris en charge la formation des benjamins de la JSK, et je suis ravi de savoir que certains jeunes, que j’ai encadrés lors leurs processus de formation, jouent dans des clubs de ligue 1, tel que Lamhen à la JSK et Daoud au MCA.

J’ai effectué mes études supérieures à l’Institut des Sciences et Technologie du Sport (ISTS) où j’ai obtenu mes diplômes de conseiller en sport (football) et d’éducateur 3ème degré. J’ai joué en France dans un club de CFA et de PH et j’ai entraîné des équipes seniors de niveau excellence et des jeunes de niveau PH. En France, je finis un master en performance et entraînement sportif à l’université de Paris 5, et j’ai obtenu le diplôme fédéral d’animateur senior et un diplôme très renommé qui est le brevet d’état 1er degré cette formation qui s’est déroulée au centre technique de l’équipe de France de football (Clairefontaine), durant cette formation très sélective j’ai côtoyé de grands noms du football français et de la DTN, à ma connaissance on n’est pas très nombreux venus d’Algérie à avoir ce diplôme.

Vous êtes originaire de quelle région d’Algérie ?

Je suis né à Alger, mais mes parents ont très tôt rejoint Tizi-Ouzou. Je suis originaire de Béni Douala mais j’ai vécu à Tizi-Ouzou ville, précisément dans le quartier des Genêts où j’ai passé toute mon enfance.

L’idée de rentrer en Algérie pour y travailler vous tente-elle ?

Vous savez bien que le football algérien à besoin de tous ses techniciens pour hausser son niveau, il n’y a pas de secret dans la performance, c’est la qualité du travail accompli qui fera la différence. Personnellement, si on me sollicite, je serai disponible pour transmettre mes compétences et les connaissances que j’ai acquises. Le model français de performance et de formation est l’un des meilleurs au monde. Ca serait profitable pour le développement du football national de s’en inspirer, sauf qu’il faut mettre en place une politique de développement nationale. C’est un travail qui doit se faire au niveau de la DTN et des ligues, harmoniser les cycles de formation des joueurs et instaurer une politique de jeu que je dirais presque commune au niveau des catégories jeunes des clubs. Sans vouloir tirer sur des personnes et c’est malheureux de le dire, je trouve que le niveau actuel du football algérien est très bas par rapport au potentiel existant. Ce n’est pas la peine de chercher mille causes alors je dirais simplement que le football algérien se contente du peu. Les clubs ne travaillent pas assez pour atteindre la performance mondiale. J’ai l’impression que les joueurs sont livrés à eux-mêmes et ne jouent qu’avec leurs acquis, j’exagère peut-être on disant cela mais croyez-moi, la performance n’est atteinte que par un processus de planification réfléchi et élaboré par rapport à des critères et objectifs bien précis. Je vais vous citer un exemple qui m’a frappé j’ai eu l’occasion d’assister ici en France aux entraînements d’un grand club de Ligue Une algérienne. Avant l’entraînement, j’étais en discussion avec l’entraîneur (d’une grande renommée) et son adjoint ; et à l’arrivée des joueurs, l’entraîneur a demandé à son adjoint ce qu’ils vont mettre en place comme séance d’entraînement. C’est inadmissible à ce niveau.

Ici en France, rien ne doit être laissé au hasard, on planifie à l’intersaison tous les objectifs sportifs à atteindre et avec quels moyens (séances d’entraînement), bien sûr cette planification doit être modulée au cours de la saison par rapport à l’évolution des objectifs et les différents critères interférant dans la performance. Donnons aux joueurs une formation de qualité qui répond aux exigences de la compétition. Soyons exigeants avec nous-mêmes avant de l’être avec les joueurs, remettons-nous en question continuellement, ce n’est que de cette manière qu’on pourra avancer.

Revenons un peu en arrière, si vous le permettez : Avez-vous suivi la dernière Coupe du monde et quelle est votre appréciation sur la participation de l’Algérie ?

J’ai suivi la plupart des matchs, cette édition restera dans les annales du football mondial, du fait qu’elle s’est déroulée pour la première fois dans le continent africain et aussi que c’est la première fois qu’un pays européen est vainqueur hors du vieux continent. Le niveau de jeu de cette édition était juste au dessus de la moyenne car l’enjeu a pris le dessus sur le jeu. L’Espagne (Championne du monde) et le FC Barcelone (l’équipe qui produit le meilleur football) ont montré que la tendance du football moderne réside dans la maîtrise technique individuelle et collective (tactique) du ballon, c’est des équipes qui excellent dans l’art de la conservation et la progression du ballon. Concernant la participation de l’Algérie à cet événement, elle me procure comme pour tous les Algériens je suppose, un sentiment de frustration. Si je me place du côté des supporteurs, je dirais que la participation était plutôt honorable (après 24 ans d’absence dans cette compétition). Mais mon statut d’expert ne me permet pas de me contenter de cette analyse. Vous savez que l’un des critères qui différencient l’amateurisme du professionnalisme est l’obligation du résultat dans ce dernier, en analysant ceux des Verts, le constat est vite fait, 3 matchs joués, 1 point pris et zéro buts marqués !!!! On ne peut pas dire que le bilan est bon. C’est une équipe qui a donné beaucoup d’espoirs aux Algériens, mais malheureusement, la réalité du haut niveau a vite pris le dessus. Si vous prenez les joueurs algériens, rares sont ceux qui jouent régulièrement avec leurs club, mis à part 3 ou 4 éléments, les autres ont un faible temps de jeu lors des saisons. Rien ne remplace la compétition pour élever son niveau de jeu. Si on prend la saison qui a précédé le mondial, les joueurs des autres nations, en moyenne, ont joué entre 30 et 50 matchs de haut niveau, alors que nos joueurs ont joué bien moins que ça. Les résultats obtenus reflétaient le vrai niveau de cette équipe.

En ce moment, comme vous devez le savoir, l’équipe nationale a un autre entraîneur en la personne de Benchikha. Pensez-vous que le départ de Rabah Saâdane est venu au bon moment ?

D’abord, permettez moi de féliciter M. Benchikha pour ce poste, je l’avais comme conseiller pédagogique durant ma formation à l’ISTS, pour moi, il mérite d’avoir sa chance, et c’est une suite logique dans sa carrière d’entraîneur, c’est quelqu’un qui à fait ses preuves dans le championnat tunisien, puis il a confirmé de la qualité de son travail avec les A’ ne le jugeons pas sur son premier match, les conditions n’étaient pas réunies pour relancer une équipe en plein doute. Revenant sur le départ de M. Saâdane, il ne faut pas salir tout ce qu’il a fait et apporté au football national, c’est un entraîneur qui mérite un grand respect. Dans le football malheureusement, quand il y a une performance, le mérite revient aux joueurs, et quand c’est une contre-performance, on désigne l’entraîneur comme responsable. A mon avis, il aurait dû s’arrêter après la Coupe du monde, c’est lui-même qui l’a déclaré – si je me réfère à certaines de ses déclarations – qu’il allait partir après le mondial. Mais que voulez-vous faire, l’ambition est plus forte que la raison.

Quelles sont les chances pour l’Algérie de se qualifier pour la prochaine CAN 2012?

Il reste 12 points à prendre, alors les chances de se qualifier sont toujours intactes, sauf que dans le contexte actuel, ce serait difficile de trouver les ressources nécessaires pour le faire.

On ne va pas parler de ce qui n’a pas marché dans le match contre la CentrAfrique, mais vous avez bien vu que la performance de nos joueurs est au plus bas de leurs niveaux. La confrontation contre le Maroc dans 6 mois sera décisive et à mon avis, l’entraîneur doit sélectionner les joueurs les plus en forme et les plus compétitifs.

Un dernier mot pour les lecteurs de la Dépêche de Kabylie

D’abord, je tiens à vous remercier de m’avoir donné l’occasion de me faire connaître et parler du football algérien par le biais de votre journal, nous qui sommes dans l’hexagone n’avons pas souvent cette opportunité. Je salue tous les lecteurs de la Dépêche de Kabylie et tous les gens de cette région, je leurs dirais de soutenir toutes les bonnes actions qui favorisent son développement, elle en a vraiment besoin. Je souhaite que la JSK fasse le meilleur parcours possible en Championnat et s’illustre dans les prochaines compétitions africaines. Je souhaite également à la JSM Béjaïa autant sinon mieux.

Interview réalisée par Karim Zafane

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