Ouzellaguen / Louziaâ ressuscitée

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Ivouziden, un village reclus et quasi désert, niché au flanc de la montagne, au nord d’Ighzer Amokrane (Ouzellaguen), a ressuscité à l’occasion de la fête de l’Aïd une tradition ancestrale : Louziaâ. Une tradition dont il a été sevré depuis fort longtemps, mais dont il n’a, à l’évidence, jamais fait le deuil.

“La dernière fois que louziaâ a été organisée à Ivouziden remonte au début des années 1950, soit quelque temps avant le déclenchement de la guerre de Libération et la destruction du village par l’armée française « , se remémore Mokrane, un sexagénaire, natif d’Ivouziden. On s’y rend par une belle matinée ensoleillée de novembre, en empruntant une route fraîchement retapée mais escarpée à souhait et serpentant le relief accidenté de la montagne. Une fois n’est pas coutume, le village, où il n’y a pratiquement plus âme qui vive, a retrouvé l’espace d’un week-end, son ambiance d’antan. « Malgré que les habitants soient éparpillés un peu partout à travers la wilaya et même ailleurs, à Alger, Skikda&hellip,; nous avons pu les contacter et rassembler la majorité « , nous dira Ferhat, membre de l’Association sociale Hellouane-Ivouziden, initiatrice de cette opération. « Notre but, à travers la réhabilitation d’une tradition séculaire, est d’offrir une opportunité pour les enfants du village de se connaître les uns les autres », enchaînent. Amar et Mohamed Cherif, membres de la même association.

C’est vers 9h30, que le rite sacrificiel des 7 taureaux, acquis pour la bagatelle somme de 150 millions de centimes, a commencé. L’attirail étant fin prêt, les bêtes sont arrivées les unes après les autres pour être clouées au pilori. L’immolation a duré presque toute la journée dans une ambiance bon enfant. Quoi de mieux pour se restaurer dans cette atmosphère bucolique au milieu d’un écrin de verdure que la galette, la figue sèche et l’huile d’olive ? Grands et petits s’en sont donnés à cœur joie en consommant sans modération. « Pour la réussite de l’opération, nous avons impliqué tout le monde. Nous avons désigné des personnes pour distiller l’information, d’autres pour s’occuper de la collecte d’argent, une équipe pour le dépeçage des carcasses, une autre pour la découpe…etc. », souligne Arezki l’un des organisateurs.

Pour l’abattage, c’est un boucher attitré qui a offert gracieusement ses services. Le contrôle sanitaire des carcasses est assuré par un vétérinaire, un autre enfant du village.

La viande est repartie en lots (Thikhamine). « Nous avons enregistré 483 participants, ce qui représente plus de 80% de la population du village. Le prix de revient d’un lot est de 3000 da mais nous avons collecté plus de 8 millions de centimes en dons « , nous confie-t-on. Les nécessiteux recensés auront droit à leur part de viande, sans bourse déliée, naturellement. Quant aux têtes et aux membres des bêtes sacrifiées, ils sont adjugés aux enchères.

A noter en fin, que pour organiser louziaâ, l’Association a jeté son dévolu sur Takhlicht, située à la sortie ouest du village et ce, pour sa forte charge historique. C’est, en effet, à hauteur de ce lieu-dit qu’il y a eu le premier accrochage du Douar d’Ouzellaguen durant la guerre de Libération nationale. Cet accrochage, qui a mis aux prises les  » Fellagas  » et la soldatesque coloniale, s’est produit le 26 janvier 1956.

N. Maouche

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