Le changement ou le chaos

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« Lorsqu’un jour le peuple veut vivre, Force est pour le destin de répondre, Force est pour les ténèbres de se dissiper, Force est pour les chaînes de se briser ».

Chantés souvent dans les manifestations, ces vers d’Abou el Kacem Chabbi qui ponctuent l’hymne national tunisien ont trouvé une belle démonstration avec la chute du tyran Ben Ali et sa fuite hors du pays. Les Tunisiens ont, non seulement, bravé un Etat policier encrouté mais tenu à marquer l’effort jusqu’à son aboutissement. La tentative de « Restauration » conduite par Mohamed Ghanouchi ne passera pas. C’est le piteux échec du modèle Tunisien, qui a tant d’ admirateurs en Algérie, un modèle qui prétend allier une certaine performance économique à un verrouillage politique et qui assure le « pain », soit le « premier des droits de l’Homme », dixit Jacques Chirac qui illustre bien l’approche « œsophagique » des problèmes sociaux des anciennes colonies. Les Tunisiens ont évité ce qui est souvent à craindre dans l’aire géopolitique arabe et dans le Tiers-monde en général, la jacquerie, c’est-à-dire, un jeu de massacre sans perspective politique. C’est une victoire qui, de l’avis général, ne sera pas sans conséquence sur le Maghreb et le Monde Arabe. C’est assez anecdotique pour le moment, mais des Cairotes s’étaient, dés l’annonce de la désertion de Ben Ali, spontanément rassemblés devant l’ambassade Tunisienne pour exprimer leur joie et soutenir le peuple Tunisien. La chute de la dynastie Ben Ali devrait marquer le début d’une nouvelle ère dans le Monde arabe et au Maghreb comme la chute du mur de Berlin avait donné le coup de starter d’un vaste chambardement de l’ordre politique mondial. Pays proche géographiquement et sentimentalement, ce qui s’y passe ne peut que déteindre sur le devenir algérien. Sur les réseaux sociaux, les internautes qui se félicitent de la victoire arrachée de haute lutte par le peuple Tunisien abondent systématiquement dans le sens d’un parallèle avec l’Algérie et toute l’aire géopolitique arabe. L’Unique ne se trompe pas de logique qui, dans un zèle penaud, a pratiquement passé sous silence les évènements de Tunisie qui peuvent, en effet, donner de bien curieuses idées. Il est connu de tous les sociologues et observateurs que la Tunisie possède une classe moyenne et une élite bien mieux affirmées que les nôtres. C’est sans doute c’est cette caractéristique différentielle qui a conduit le mouvement de contestation vers plus d’efficience politique. Cela ne signifie pas que les Algériens ne sont pas capable d’un coup de grisou, à peine que cela risque d’arriver dans un chaos désastreux qui peut provoquer une sorte de « Somalisation » du pays. Les signes d’une demande de changement désordonné exprimée suivant un schéma poujadiste et non éthique ont été largement observés à l’occasion des derniers évènements qui ont mis en scène une jeunesse bouillonnante d’énergie certes, mais totalement dénuée de repères politiques et moraux. Les élites nationales sont appelées soit à organiser une transition démocratique ordonnée ou risquer une embardée politique aventureuse. D’autant que les islamistes ne sont pas les bénéficiaires politiques systématiques des mouvements de contestation populaire. Ben Ali aura grossièrement et vainement tenté d’assimiler les mouvements de rues à la subversion terroriste pour solliciter un appui occidental sur la base de la lutte mondiale contre le phénomène du terrorisme islamiste. Dans des accents qui ne vont pas sans rappeler le projet du Grand moyen orient (GMO) mis en avant par la précédente administration américaine, Hillary Clinton a de nouveau sommé les Etats arabes d’opérer des changements démocratiques pour éviter des évolutions brutales et aventureuses.

M. Bessa

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