Le lot quotidien des villageois

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Des centaines de jeunes sans emploi battent la semelle à El Kseur. «Ces forces vives de la nation», une ribambelle d’oisifs et de désœuvrés, sont abandonnés à leur propre sort. Nassim 27 ans, son parchemin en poche depuis déjà quelques années, mais point de travail à l’horizon, Désabusé il dira : «J’ai constitué des dossiers et rédigé un tas de demandes avec des formules de courtoisie à la limite de l’obséquiosité. Sans résultat !». Vivant depuis des lustres aux crochets de ses parents, Salim un autre diplômé résidant au niveau du quartier populeux de Berchiche, soutient avoir honte de rencontrer son géniteur qui, la soixantaine bien sonnée, continue néanmoins d’user ses vieux jours dans la fonction publique. «Je me culpabilise de n’être d’aucun secours pour mon père et ça me fait beaucoup de peine de le voir se débrouiller seul avec son salaire de misère pour nourrir toute la famille », nous confie-t-il, tourmenté. Recalé au bac pour la deuxième fois, Belaïd est dirigé selon la formule consacrée d’une pléthore d’illusionnistes, «vers la vie active». Et notre juvénile héros se retrouve de facto aspiré à son corps défendant, dans le tourbillon des miasmes existentiels. Il tente tout de même, après une longue traversée du désert, de forcer le destin en s’improvisant garçon de salle dans un restaurant. «J’ai travaillé sans couverture sociale chez un restaurateur de Bgayet, et au bout de deux mois j’ai claqué la porte. Le patron n’ayant consenti de me payer que la moitié du salaire convenu», raconte avec des relents de dépit, l’infortuné jeune homme. Pour ceux qui ont suivi une formation professionnelle diplômante, la situation n’est guère reluisante non plus. Djamel, un jeune de 24 ans habitant la cité Polysi d’El Kseur, vit son «statut» de chômeur depuis plusieurs années, après avoir bouclé avec succès son stage de programmateur en informatique. Il relate ses déboires. «J’ai tapé à toutes les portes. On m’a opposé invariablement une fin de non recevoir, se cachant derrière le prétexte fallacieux du manque d’expérience professionnelle». «C’est la quadrature du cercle : pour travailler il faut une expérience professionnelle et pour avoir cette dernière il faut travailler !», s’offusque-t-il. Le cas de Djamel, on s’en doute, n’est pas unique. Ayant appris à ne pas prendre pour argent comptant tous ces discours mielleux, qui nourrissent plutôt l’illusion que l’espoir, ces jeunes à la dérive n’en finissent pas de mâcher leur désarroi et de ressasser leur ras-le-bol. Ras-le-bol de la mal vie et du rêve qui se fait cauchemar quotidien

N. Maouche

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