«La JSK est la locomotive du combat identitaire»

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l’acien libéro international de la JSK, Mouloud Iboud parle du combat du club kabyle pour l’amazighité. Il est revenu en arrière en se remémorant les souvenirs qu’il a vécus, avec ses partenaires, ses dirigeants et les supporters.

La JSK a marqué l’histoire du football algérien, soit à l’échelle locale ou continentale, n’est-ce pas ?

Exact, la JSK est un club qui a fait son chemin en réussissant à marquer l’histoire du football algérien, de fort belle manière, avec plusieurs consécrations à son palmarès, que ce soit à l’échelle nationale que continentale. Ce club continue de rafler des titres et représente dignement le football algérien dans les différentes compétitions africaines. C’est donc devenu une tradition et ce club ne peut se permettre de jouer les seconds rôles. Des hommes se sont sacrifiés pour ce club pour qu’il puisse être à la hauteur, chaque saison.

Ce prestigieux club, qui a réussi à gagner plusieurs titres, a aussi participé au combat identitaire, n’est-ce pas ?

Oui, la JSK est un club différent des autres. En plus du volet sportif, la JSK joue aussi pour l’identité et l’amazighité. Ce club était vraiment la locomotive de ce combat identitaire, et ce, sans diminuer du rôle joué par les artistes, les écrivains et autres acteurs de la culture. Il a participé au fait que Tamazight soit connue et reconnue et par l’établissement de son statut dans le pays. On a contribué à notre façon, à l’épanouissement de la culture et de l’identité berbères.

Quand est-ce que la JSK a commencé à prendre de l’ampleur, sur le plan culturel et identitaire ?

C’est à partir des années 70, après la montée en première division, mais le combat de la JSK pour l’amazighité a commencé à partir de cette Coupe d’Algérie remportée face au NAHD. Vous savez, à notre époque, quand un joueur portait le maillot kabyle, il ressentait une grande responsabilité. Cela pesait sur nos épaules, car en plus du résultat sportif final, il fallait représenter dignement la Kabylie et l’amazighité. C’était un vrai combat qu’on menait pour donner une autre dimension à notre langue et à notre culture. J’estime que la JSK a bel et bien contribué dans ce sens.

Comment avez-vous vécu ces années de combat en tant que joueurs ?

C’était très difficile, sachant qu’à cette époque, il était très difficile pour une personne de parler kabyle, mais la JSK a pu transmettre le message, à sa manière, et mener le combat vers le succès. Et, avec les réussites qu’on lui connaît, la JSK a pris une autre dimension, pas uniquement sur le plan sportif, mais aussi sur les plan culturel et identitaire.

Quel était le slogan véhiculé par l’équipe pour l’image du combat identitaire ?

En plus de nos résultats, on était mal vus par les autres clubs et leurs supporters, qui voyaient en nous des étrangers. Nos supporters, de leur coté ont joué un rôle prépondérant pour l’épanouissement de la culture berbère. Et la JSK a su drainer et réunir les foules autour de ce combat. Face au NAHD, lors de la finale de Coupe d’Algérie en 1977, il y avait 80 mille supporters qui chantaient des slogans pour l’amazighité et l’identité. Ces derniers ont trouvé un espace d’expression pour faire passer le message. C’est grâce à la JSK que, venus des quatre coins du pays pour nous soutenir, ils ont pu passer ce noble message. « Maâlich Ma Nemmuth Argaz Tamettout JS Imazighen Atsehyu tamurt », c’était le slogan scandé par les milliers de supporters. C’est pour dire qu’on a été à l’avant-garde de ce combat comme c’est le cas pour d’autres qui ont lutté chacun à sa manière, pour que Tamazight triomphe.

Et qu’en est-il de ce combat en dehors du pays, lors des aventures africaines ?

La JSK a aussi mené ce combat en dehors des frontières en faisant connaître notre culture. Lors de nos différentes aventures africaines, tout le monde se demandait d’où on est venus et de quel pays on est. Je vais vous raconter une anecdote, en 1986 lors d’un match qui nous avait opposés au Zamalek d’Egypte, les gens nous demandaient si on était vraiment des Algériens. Ils sont allés loin en nous traitant de juifs, vu qu’on parlait une langue qu’ils ne comprenaient pas. Donc notre combat pour l’amazighité a vraiment dépassé les frontières nationales, et c’est grâce à la JSK et ses consécrations que Tamazight est connue même en dehors du pays.

A l’occasion du 31e anniversaire du Printemps Berbère, un message à transmettre aux Amazighs là où ils se trouvent ?

Je profite de l’occasion pour saluer tous les Amazighs là où ils se trouvent, en leur disant que la JSK a contribué à sa façon, au combat pour la promotion de la culture et de la langue berbères, et c’est grâce, aussi, en partie, au club phare de la Kabylie que Tamazight a pris la dimension actuelle.

Un mot sur l’actuelle formation kabyle et ses chances dans les différentes compétitions où elle est engagée ?

La nouvelle génération continue toujours de mener le combat, même si actuellement, l’argent a beaucoup d’influence sur le football. Mais, tout de même, la JSK continue à gagner des titres, ce qui est déjà un acquis pour le combat identitaire. La JSK de cette saison peut terminer son parcours en apothéose avec au moins un titre. En Coupe d’Algérie, je pense qu’elle peut éliminer le MCO. En championnat, le titre reste jouable si l’équipe parvient à tenir en échec l’ASO, lors du match qui va les opposer, sinon, la deuxième ou la troisième place ne peut lui échapper. En Coupe de la CAF, je pense que le club, s’il parvient à atteindre la phase des poules, pourra aller loin, et avec la qualification des nouveaux joueurs et le renforcement de son effectif, la JSK peut prétendre au sacre final.

Entretien réalisé par Amazigh Omar

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