Par Abdennour Abdesselam:
Comme nous n’avions pas l’habitude d’oser seulement croire que notre langue pouvait disserter sur les grands genres et rendre l’analyse sur une pensée scientifique même descriptionelle, alors nous nous sommes autocensurés mais surtout nous étions peu sûrs de nos valeurs linguistiques et leur portées. Lorsqu’un événement est rapporté et argumenté dans une langue autre que la nôtre alors nous accordons à l’orateur toute notre attention et notre intérêt. On dira subséquemment : « yeghra » (il est instruit). Lorsqu’un intervenant kabyle ose une répartie du niveau de l’analyse ou même de la description on dira, avec cependant un sentiment mitigé: « yessen » (il sait). Ainsi le concept de l’instruction (taghouri) dépasse injustement celui du « savoir populaire ». Il s’en est allé de cette spéculation des années, des dizaines d’années durant, voire des siècles. Voilà un exemple frappant de notre défaillance. Sur les ondes de la chaîne deux, le météorologue Meziane donne le temps dans toutes ses réparties, ses influences, ses instabilités, ses allées et venues, ses transformations et sa complexité le tout vu à travers l’objectif fixé sur le cosmique, dans une langue courante, quotidienne et à la portée de tous. Il n’a mis à sa portée qu’un seul néologisme «tafesna, pluriel : tifesniwin» et qui signifie (degré (s). Il n’a pour ainsi dire pas chargé ni truffé son discours de soucis scientistes. Mais pour que la parole s’en aille suivre, sans heurt et sans gêne, le sens d’une logique scientifique et dite en kabyle, Meziane joue dans la combinaison particulière qu’il fait de l’usage des éléments et des connecteurs des phrases. Sans hésitation aucune, notre météorologue nous déroule une explication au degré élevé de l’assimilation des phénomènes cosmiques. Il fait accomplir à l’oralité une mission didactique par l’entremise d’une succession d’images parlantes et fortes si bien qu’on prend plus de plaisir à l’écouter, lui et son explication, plutôt qu’à se reporter sur les cadrans souvent morose de la description télévisuelle. C’est pourtant si simple mais à condition de pénétrer l’âme de cette belle, douce et harmonieuse langue berbère de Kabylie avec toutes ses techniques naturelle faites de rhétoriques, de métaphores, d’harmonies et de paraboles langagières. Un véritable cours sur la manière de rendre un raisonnement cartésien dans la simplicité qu’offre la langue. Merci Meziane.
Abdennour Abdesselam
(kocilnour@yahoo.fr)