Les décharges sauvages défigurent l’environnement

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La daïra de Ouadhias, située à 30 km au sud du chef-lieu de la wilaya de Tizi-Ouzou, regroupe quatre municipalités, à savoir Ouadhias, Tizi N’Tléta, Aït Bouaddou et Agouni Gueghrane, totalisant plus de 60 000 habitants.

Le problème de la pollution de l’environnement commence à inquiéter sérieusement les citoyens et les autorités locales, ainsi que la dégradation des paysages, pourtant paradisiaques, enlaidis par la négligence de l’homme et l’absence de moyens pour préserver cette belle nature que le tout puissant nous a généreusement octroyé. A Aït Argane, dans la commune d’Agouni Gueghrane, les gorges et les flans du majestueux montagne Djurdjura pourraient constituer une source de rentabilité économique inestimable pour toute la région, mais, hélas, les hommes n’ont rien fait dans ce sens. Aucune auberge, aucun restaurant et autres structures d’accueil ou d’orientation, n’est disponible. Du coup, cette générosité du ciel n’est pas exploitée. Bien au contraire, elle est malmenée par la plus pollueuse des créatures de dieu, l’homme. En visitant les différentes villes et les différents villages, le constat n’est pas reluisant. La multiplication des dépotoirs et des décharges sauvages est inquiétante. Les abords des routes et les caniveaux constituent un réceptacle pour toutes sortes de déchets, de bouteilles, de cannettes, de sachets noirs et de bien d’immondices. Ce qui renseigne, on ne peut mieux, sur le déficit en matière de collectes des ordures et le laisser aller de certains citoyens qui n’hésitent pas à déverser leurs détritus anarchiquement et sans aucun respect pour l’environnement. Une situation qui finira, à la longue, par être néfaste pour la santé des citoyens et pour l’écosystème de toute la région. Pour en connaitre davantage sur le ramassage des rejets ménagers dans la daïra de Ouadhias, nous avons essayé de nous renseigner auprès des autorités et d’élus locaux.

Ouadhias, les villages non concernés…

A Ouadhias, le ramassage des ordures ménagères ne concerne que le chef-lieu et les édifices publics. Quant aux villages, les comités se débrouillent comme ils peuvent. C’est comprendre que les décharges sauvages sont l’unique recours des citoyens. Il est à signaler que la commune de Ouadhias ne possède pas, à ce jour, sa décharge contrôlée. Cette commune, née pourtant pendant l’ère coloniale, ne dispose pas encore de décharge communale. Un projet dans ce sens est inscrit pour la municipalité l’assiette devant l’accueillir étant disponible, mais les financements, nécessaires à sa réalisation, ne sont toujours pas débloqués, au grand dam de la population et des autorités locales. Un projet d’ovoïde est inscrit pour mettre un terme au talweg de Ouadhias et même une station d’épuration est prévue en vue d’éviter la pollution qui menace jusqu’au barrage de Taksebt. Hélas, aucun de ces projets n’est lancé. Du coup, il n’est pas impossible de retrouver les sachets noirs de Ouadhias flotter sur les eaux du barrage de Taksebt. D’autant plus que la décharge sauvage de la localité se trouve en amont du Talweg de Ouadhias. Une source locale indiquera à ce sujet : « A Ouadhias, l’environnement est le parent pauvre de la commune. Les villages ne sont pas concernés par le ramassage des ordures. La cause est l’absence d’une décharge contrôlée. Les projets de la décharge contrôlée, de l’ovoïde et de la station d’épuration ne sont toujours pas lancés. Les instances concernées ne font que promettre. Officiellement, tout est inscrit mais les financements nécessaires n’arrivent toujours pas ». Concernant les rejets médicaux, ils connaissent la même destination que les ordures ménagères, indiquera une source au fait du dossier.

Tizi N’Tléta, une décharge à côté du lycée

Cette commune, née du dernier découpage administratif de 1984, essaye d’assurer une collecte régulière, même si elle ne jouit pas de grands moyens. La benne tasseuse et le camion à benne, dont elle dispose, font le tour des villages et des quartiers hebdomadairement. Ce qui est bien sur très insuffisant. En saison pluviale, la collecte est très perturbée, car l’accès à ladite décharge est rendu impossible par la nature argileuse des lieux. L’APC a pourtant essayé d’aménager un accès qui lui a coûté des dizaines de millions de centimes, mais en vain. A chaque importante averse, la collecte s’arrête, transformant la localité toute entière en zone à multiples poubelles. Le premier magistrat de la commune, que nous avons questionné à ce sujet, répondra : « Avec une seule benne et un seul camion, on ne peut pas faire mieux. Pendant la période des grandes pluies, l’accès à la décharge est impossible. Nous avons tenté de réparer cet accès, mais la nature argileuse du sol est une entrave. L’actuelle décharge est sise à proximité de notre lycée, nous essayons de la délocaliser, mais les opposition, des riverains ne nous le permettent pas. Nous lançons donc un appel en direction des responsables concernés, pour nous doter de plus de véhicules, et nous saisissons cette opportunité pour lancer un autre appel, en direction cette fois des citoyens dans l’optique d’éviter de s’opposer aux projets d’utilité publique ». Pour ce qui est des rejets médicaux, notre interlocuteur avouera : « Nous les ramassons au même titre que les ordures ménagères et nous les entreposons dans notre décharge pour les brûler en été. Nous n’avons pas d’autre lieu où les enterrer et nous ne possédons pas d’incinérateur ».

Aït Bouaddou, seul le chef-lieu bénéficie de la collete

A Aït Bouadou, région montagneuse, la collecte des détritus ne concerne pas tout le monde. Hormis le chef-lieu et les édifices publics, où des camions à benne et des tracteurs assurent régulièrement le ramassage des rejets ménagers et médicaux pour les déposer dans des décharges sauvages et les incinérer à ciel ouvert, les villages se débrouillent comme ils peuvent. Du coup les dépotoirs et les poubelles foisonnent, mettant sérieusement en danger la santé de la population et défigurant l’image de la localité. Le maire de Aït Bouadou regrettera : « Nous n’avons ni benne tasseuse, ni décharge et encore moins de centre d’enfouissement technique. Le ramassage des ordures n’est assuré qu’aux édifices publics et au chef-lieu communal. Les ouvriers de la voierie se chargent de cette tache. L’incinération à ciel ouvert est notre unique solution. C’est un appel de détresse que nous lançons aux instances concernées, en vue de nous inscrire un projet de décharge contrôlée et de nous doter de plus de véhicules. A la longue, c’est tout notre milieu environnemental et la santé des populations locales qui sont menacés ».

Agouni Gueghrane, même son de cloche !

Agouni Gueghrane est une commune qui peut bien devenir une destination touristique tellement les paysages sont exquis et sublimes. Le grand rocher et la proximité du majestueux Djurdjura rendent les lieux envoûtants. Un vrai régal pour les yeux et un véritable havre de paix pour se ressourcer et recharger les batteries. Seulement, les hommes n’ont rien fait pour rentabiliser ces sites dignes de l’imagination d’Issiakhem. Au contraire, la négligence et le laisser aller menacent le grand parc du Djurdjura. Les décharges sauvages et les dépotoirs enlaidissent plusieurs endroits. La commune d’Agouni Gueghrane, toujours bloquée, peine à sortir la tête de l’eau. Les paisibles habitants sont contraints de subir le sous développement qui sévit dans leur commune. Les luttes politiques, ayant engendré son blocage, font de cette municipalité une commune qui recèle un grand retard. Pour revenir à notre sujet du jour, disons que c’est le même son de cloche, sinon pire. Avec deux camions à benne, le ramassage des rejets ménagers n’est assuré qu’au chef-lieu. La destination de ces rejets est, aussi, les décharges sauvages. Les villages ne sont pas couverts, en terme de collectes de rejets ménagers. Pourtant, un projet de réalisation d’une décharge contrôlée existe, mais il ne voit toujours pas le jour. A ce propos, le P/APC révélera : « Notre commune est prise en otage. Un projet de décharge existe, mais certains éléments nous mettent les bâtons dans les roues.

Il n’y a pas que le problème de ramassage des ordures, qui ne se fait pas correctement. Du coup, le développement de notre commune et la réalisation de projets d’envergure ne sont pas les bien venues, puisque c’est un élu du FLN qui est à la tête de l’Assemblée populaire communale ». Il est à rappeler que la commune d’Agouni Gueghrane est l’une des dernières communes qui continue d’être bloquée. L’absence de décharges contrôlées, de centre d’enfouissement technique et de véhicules, pour assurer une collecte régulière et quotidienne, feront dans un avenir proche des Ouadhias une région polluée et à risque. En final, nos rejets ménagers vont droit aux décharges sauvages pour y être brûlés. Les gaz, à effet de serre et toxique, finissent par nous retomber sur la tête. Chose qui accentue l’apparition de maladies telle que le cancer, l’asthme et autres maladies pulmonaires. Dans certains cas, nos rejets arrivent jusque dans les barrages et risquent de nous revenir via les robinets.

Il est urgent de réfléchir sérieusement à ce problème en vue de trouver des solutions qui préserveraient la santé de la population et l’environnement. Avec un tel état des lieux, il convient de dire que l’environnement est le parent pauvre de toute la daïra de Ouadhias.

Hocine Taib

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