Le tapis d’Aït Hichem en fête

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C’est sous le slogan «Hommage à nos femmes tisseuses gardiennes de la mémoire» qu’a été lancée la seconde édition du Festival local du tapis d’Aït Hichem.

La cérémonie d’ouverture de cette grande manifestation a eu lieu jeudi dernier, à l’école primaire du village n’Aït Hichem, en présence de plusieurs personnalités, de la presse et du public. Ses organisateurs ont servi de guides pour la présentation des 7 ateliers que contient ce festival. Au cours de cette visite, les représentants de la chambre des métiers, de la direction du Tourisme et d’artisanat ainsi que la direction de la Culture, représentée par M. Ould Ali El Hadi, ont bien reconnu les efforts et admiré l’ouvrage des femmes tisseuses d’Aït Hichem qui ont saisi l’occasion pour faire part des problèmes qu’elles rencontrent dans le métier de tissage, à savoir la cherté et la rareté de la matière première par rapport aux années précédentes, entre autres. Des préoccupations que l’ensemble de ces directions a promis de prendre en charge pour que le tapis d’Aït Hichem puisse persévérer. La visite et les entretiens avec les tisseuses ont été suivis de prise de parole du représentant de la direction du Tourisme et du directeur de la culture de Tizi-Ouzou. M. Ali El Hadi n’a pas manqué l’occasion pour féliciter tous ceux qui ont attribué à la réussite de ce festival et a rendu également un grand hommage aux «vielles femmes tisseuses ainsi qu’aux jeunes filles qui ont pris la relève et n’ont pas permis la déperdition de ce métier précieux qui représente un magnifique trésor pour notre Kabylie et pour l’Algérie entière». Il a souligné en outre la grande dimension qu’a pris le tapis d’Aït Hichem qui est admiré à travers tout le pays. «Le Festival du tapis est une promotion qualitative et une opportunité à laquelle l’ensemble des secteurs tels que la chambre des métiers et du tourisme peuvent venir en aide par certains dispositifs pour que ce métier puisse se développer et renaître sur le plan économique, mais surtout prendre en charge les femmes ainsi que les familles qui le font». Le directeur du tourisme et de l’artisanat pour sa part nous a déclaré quant à lui : «Le tapis d’Aït Hichem n’a pas besoin d’être présenté. C’est un trésor qu’il ne faut pas seulement regarder et admirer, mais il faut qu’il travaille pour ceux qui le travaillent». Après ces allocutions l’ensemble des présents a été invité à partager une waâda. D’après des statistiques locales, il y a «40 femmes tisseuses recensées à Aït Hichem». Ces femmes tissent à domicile et l’une d’elles a soulevé l’absence d’une quelconque aide pour ce métier. «A l’opposé de tous les autres métiers, le tissage ne bénéficie d’aucune aide. Il n’y a même pas d’ateliers où nous pouvons apprendre le métier à nos jeunes filles». En réponse aux questions, comment et où ont alors sont réalisé les tapis magnifiques qu’elle a présentés, une exposante dira : «Je donne la matière première à d’autres femmes, qui tissent chez elles». En effet, le métier du tissage, souligne une des vielles qui n’ont jamais baissé les bras malgré les difficultés, «était jadis un moyen de se nourrir et d’élever ses enfants pour de nombreuses femmes». Elle raconte son histoire et son grand attachement à ce métier par lequel elle a pu élever ses deux fils, étant veuve dès son jeune âge. «Sans ce métier, mes enfants n’auraient pas pu s’instruire», déclare-t-elle. Par ailleurs, selon la plupart de ces femmes qui l’exercent, le tissage de tapis n’est plus rentable comme avant, et il risque la perdition vu la cherté et la rareté de la matière première, ainsi que la tendance des gens à l’achat des couvertures et couettes modernes en délaissant ces tapis jugés très chers. «Le coût élevé des tapis s’explique par la rareté et la cherté de la matière première», argumente une tisseuse. Cette dernière nous a fait part des prix de quelques tapis. A titre d’exemple, un tapis de 2 m2 de dimension fait 24 000 Da, celui de 1/2m2 fait 13 000 Da. Elle explique que ces prix diffèrent selon les dimensions du tapis et la matière de sa réalisation. Pour la durée de réalisation, elle varie, selon la même interlocutrice, entre une semaine et un mois, parfois même une année, pour certains tapis lourds et de bonne qualité». Rappelons que tous les problèmes soulevés par les tisseuses feront objet de débat d’un colloque et d’une journée d’études pendant ce Festival, une occasion pour «unir les efforts», selon le directeur du Tourisme, pour essayer de trouver les solutions à tout ce qui est considéré comme empêchement au développement de la vulgarisation du métier de tissage, en particulier, au magnifique tapis d’Aït Hichem qui a fait le tour même de l’Europe. C’est dans l’objectif de sa vulgarisation, de son développement, de sa prise en charge, et surtout sa persévérance, qu’un Festival du tapis est organisé pour faire part de son rôle important et pour la tradition et le patrimoine culturel de la Kabylie, ainsi que pour le tourisme et l’économie.

Rachida Selmani

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