Par Abdennour Abdesselam :
La chanson « Cfu ay Ixef-iw » est un chef d’œuvre musical chanté par Amar Sarsour. En effet, l’œuvre est une véritable chronologie qui décrit les différentes étapes du cheminement de la revendication Amazighe. Pas à pas, Sarsour fixe et décrit les événements depuis la bataille d’Icheridène, conduite par Fadhma N’Soumeur, aux événements d’avril 1980 en passant par la tenue du congrès de la Soummam, pendant la guerre d’Algérie de 1954 à 1962. Amar décrit une maturation, sans cesse évolutive et grandissante, des actions menées par des générations successives, chacune s’instruisant des expériences de la précédente pour revenir chaque fois à la charge de la revendication, avec encore beaucoup plus de détermination à défendre la langue, la culture et l’identité amazighe. La chronologie poursuit également la mission d’entretien de la mémoire pour que personne n’oublie les nombreux sacrifices consentis pour que les acquis actuels soient. Amar Sarsour va jusqu’à tenir à témoin les permanents témoins des événements qui ont marqué la Kabylie. Il interroge l’imposante montagne du Djurdjura, l’immense ciel la couvrant, les vents qui sont passés par là et cette terre, que de fois imbibée au rouge du sang de tous ceux qui ne sont plus de ce monde. Il interroge tout les panoramiques par lesquels nous jurons et desquels nous revient l’écho amplifié de nos voix, lorsque nous les implorons. Et pendant que défile un fond musical adouci, surgit alors, d’où nous ne savons, l’emblématique voix rassurante du faiseur de paroles magiques qu’est l’éminent poète Ben Mohamed. Cette voix énergique, tel le rugissement d’un volcan débordant de partout son cratère, porte en elle cette note d’espoir et d’optimisme qui annonce qu’après moult tortures, après les affreuses situations imposées, après tous les désespoirs mais, surtout, après tant de gabegies, de mensonges et de tricheries, l’Amazighité refait surface en poussant sur cette terre fertile et fertilisante qu’est la Kabylie. Il est vrai que Chikh Mohand disait : « Irgazen am irden, mi ghlin s aludh ad kkren ». Ici Tanekra (le digne relèvement) est celle de tout un peuple sur un territoire qui s’élargit à mesure que tombent et se fracassent les dictatures, et la dernière en date est celle du tristement célèbre Kadhafi qui a terriblement torturé le peuple amazigh de Libye.
Abdennour Abdesselam ([email protected])