Appel à préserver le caractère pacifique

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Au troisième jour de la supposée grève générale nationale (hier), Alger, la capitale, n’a toujours pas répondu au mouvement. En matinée, comme à son habitude, la ville (le centre) a pris tout son temps pour se réveiller. Mais ça restait une journée ordinaire comme une autre : vers 10 heures, les magasins étaient ouverts, transports sur les circuits, institutions, administrations ouvertes et service assuré. Bref, aucun souci à signaler.

Tout le monde vaquait à sa tâche. Les cafétérias, les coiffeurs, les kiosques tabac, les librairies… tout le monde répond présent. Les journaux sont disponibles et normalement distribués. Mieux, cette supposée grève nationale, on n’en parle même pas… En Kabylie, tout est à l’arrêt depuis dimanche dernier. Une situation qui n’a pas été sans conséquences et pour les commerçants et pour le simple citoyen. Mais bon, là c’est une toute autre histoire à digérer à froid, plus tard. Pour le moment, il faudra dépasser cette tension qui enveloppe le quotidien de la région à la veille de l’élection présidentielle, rejetée par la population locale.

Une tension qui devient de plus en plus pesante avec la multiplication des manifestations à l’approche du jour J. Plusieurs mairies et autres sites, qui ont abrité précédemment l’opération de vote, ont fait l’objet de fermeture par les citoyens quand ce n’est pas carrément un mur qui est érigé à l’entrée. Le dernier épisode en date c’est celui de la daïra du chef-lieu dont l’accès principal a été muré avant-hier. Hier encore, deux autres marches (populaire et celle des avocats) ont été organisées à Tizi Ouzou-ville, en marge de la grève générale largement suivie à travers la wilaya.

Les robes noires, puis des manifestants en nombre ont, en effet, bruyamment manifesté, hier encore, leur rejet de l’élection présidentielle dans les conditions qui prévalent présentement. Heureusement que tout s’est passé sans le moindre écart. Car avec la tension qui monte d’un cran, nombre d’observateurs redoutent des dérapages surtout qu’il y a tout de même des faits nouveaux qui inquiètent, avec notamment cette violence manifestée dans le verbe et dans l’acte par certains manifestants (fermeture de daïra, mairies, dernières émeutes nocturnes à Larbaâ Nath Irathen…). D’où ces voix qui se multiplient et appellent au calme et à sauvegarder le caractère pacifique du mouvement de contestation.

R.A.S à Alger et grève et marches à Béjaïa et Tizi-Ouzou

A Béjaïa, la rue gronde toujours. Hier, à J-2 de la Présidentielle, les artères du chef-lieu de wilaya étaient pleines de monde. En effet, la wilaya de Béjaïa, paralysée par une grève générale depuis dimanche, a renoué, hier encore, avec les manifestations de rue. Étudiants, fonctionnaires, retraités, avocats et autres citoyens lambda étaient au rendez-vous, en maintenant la grève générale, suivie dans tous les secteurs d’activité, publics et privés, et par quasiment tous les commerçants.

A noter que le mauvais temps et la grève des transporteurs n’ont pas empêché des dizaines de milliers de Béjaouis d’investir, dès les premières heures de la matinée, la rue pour réaffirmer leurs exigences. Les avocats, en robes noires, étaient les premiers à s’être ébranlés depuis la cour de Béjaïa pour réitérer leur «attachement à une période de transition courte avec des mécanismes de gouvernance consensuel». Les avocats ont exigé aussi la libération immédiate et inconditionnelle de tous les détenus d’opinion et la cessation de toutes poursuites judiciaires à leur encontre.

Quelques minutes plus tard, des milliers de manifestants ont envahi la rue de la Liberté pour afficher leur opposition à la tenue de la Présidentielle. Reprenant en chœur leurs slogans habituels, les marcheurs ont appelé au départ de tous les symboles du régime, tout en exigeant la libération des détenus d’opinion. Une marche organisée à l’appel des animateurs du Pacte de l’alternative démocratique (PAD) de Béjaïa, de la communauté universitaire, qui en est à son 42e mardi de mobilisation, et des syndicats autonomes.

En outre, pour le 3e jour de grève générale et de mobilisation contre le scrutin présidentiel, des dizaines de citoyens de la commune de Seddouk ont entamé, depuis hier, une grève de la faim, en signe de solidarité avec les détenus d’opinion. A signaler, par ailleurs, que des rassemblements et des marches ont été organisés, le même jour, aux quatre coins de la wilaya de Béjaïa.

Bouira entre les pour et les contre

à Bouira, au troisième jour de la grève, les mêmes localités étaient toujours paralysées et avec l’absence de transport, aucun élève n’a rejoint les salles de classe. Les administrations étaient également fermées et l’ensemble des commerces ont baissé rideaux. Il s’agit bien sûr des localités de la région berbérophone en plus du chef-lieu de wilaya, alors que pour les 28 autres communes sur les 45 que compte la wilaya, les activités n’ont connu aucune perturbation et le cours de la vie n’avait pas été impacté par l’appel à la grève. Hier matin encore, le chef-lieu de wilaya s’est réveillé dans un climat rappelant le mois de Ramadhan avec une paralysie totale des commerces hormis les pharmacies, les boulangeries et les services sanitaires qui ont assuré de manière continue leurs services.

Même l’hyper marché de Bouira a adhéré au mot d’ordre de grève et ce n’est que vers 17h que le centre ouvre ses portes depuis dimanche dernier. Depuis cette date, le chef-lieu connait quotidiennement des marches populaires et pacifiques aussi bien diurnes que nocturnes et hier encore, un nombre important de citoyens ont battu le pavé en rejoignant la 43e marche des étudiants. Des étudiants pour la plupart qui n’ont pas pu rejoindre le chef-lieu en raison de l’absence de transport universitaire et autre transport. L’université Akli Mohand Oulhadj a d’ailleurs été désertée hier.

Même les avocats ont accompagné les marcheurs en décrétant une grève de deux jours (hier et aujourd’hui, ndlr). «Nous avons toujours accompagné le Hirak depuis le 22 février dernier et aujourd’hui plus que d’habitude, nous relayons l’appel au rejet de l’élection ainsi que pour la libération des détenus d’opinion», confie une robe noire adhérant à l’appel du barreau pour ce débrayage. Les avocats de Bouira s’étaient réunis à l’intérieur de la cour en un sit-in de solidarité pour appeler également à la libération des détenus. L’entame de la marche s’est déroulée sur la RN5, à quelques centaines de mètres de l’hôtel Nassim aux alentours de 10h et au fur et à mesure que la foule se rapprochait du centre-ville, la procession humaine prenait de l’ampleur.

Au niveau du centre-ville, plus précisément sur la place publique, une autre marche était organisée en simultanée avec des slogans hostiles au pouvoir. Emblème national et drapeau amazigh au devant du premier carré des marcheurs entonnaient les habituels slogans contre les symboles du système et leur rejet de l’élection présidentielle dans la situation qui prévaut présentement.

Amar A, F.A.B. et Hafidh B.

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