Incertitude et tension !

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L’APW de Tizi Ouzou devrait tenir sa première session ordinaire de l’année 2019 aujourd’hui. Pour peu que le quorum soit atteint. Au menu, il sera question du vote du budget supplémentaire.

La majorité FFS – FLN – RND réussira-t-elle à réunir les 25 voix sur les 49 élus que compte l’APW cette fois après le rendez-vous avorté de la semaine dernière ? A défaut, l’Assemblée se retrouvera inéluctablement dans une impasse inédite dans ses annales. Paradoxalement, la balle est dans le camp des élus du FLN et de ceux du RND, qui devront faire respecter la majorité, car les six réfractaires du FFS ne seraient pas du tout enclin à revoir leur position. Pour l’instant, le bras de fer oppose les 13 élus du FFS aux 13 élus du RCD, auxquels se sont alliés les six élus-réfractaires du groupe FFS.

A vrai dire, la tournure que prendront les événements dans les rangs de l’APW de Tizi Ouzou dépendra de l’attitude des élus du RND et du FLN au nombre de sept chacun. Retour sur un conflit et un bras de fer qui ne font que commencer. Alors qu’elle devait avoir lieu, dimanche dernier, la session de l’Assemblée populaire de la wilaya de Tizi Ouzou a été reportée à aujourd’hui à cause de l’absence de plus de la moitié des élus dans l’hémicycle, où devait se tenir la rencontre, sachant que l’un de ses points essentiels a trait au vote du Budget supplémentaire (BS).

Du côté de la présidence de l’APW, on avait imputé l’absence de la majorité des élus au blocage de la RN12 par des citoyens, le jour même où devait se tenir cette session. Autre son de cloche du côté du groupe des élus du RCD, au nombre de 13, auxquels se sont alliés les 6 élus du FFS, lesquels s’opposent à l’actuel président de l’APW. Une alliance contre-nature qui peut être lourde de conséquences, si des élus du FLN et du RND venaient à s’absenter lors de la session d’aujourd’hui ou à rallier tout simplement le groupe d’élus du RCD et leurs 6 alliés du FFS.

En effet, si le quorum n’est pas atteint, aujourd’hui, la session de l’APW ne pourra systématiquement pas se tenir. Cela engendrera non seulement le blocage de cette Assemblée populaire mais aussi du budget de wilaya supplémentaire. Et si ce dernier n’est pas voté aujourd’hui, cela aura des répercussions directes et négatives sur pas mal de secteurs concernés, surtout celui de l’éducation d’autant plus que nous sommes à la veille de la rentrée scolaire. C’est d’ailleurs cette probabilité très plausible qui a fait réagir, hier, le député Tayeb Mokaddem. Ce dernier a adressé dans ce sens un courrier express à l’ensemble des élus du Rassemblement national démocratique (RND) pour ne pas manquer le rendez-vous d’aujourd’hui à l’APW. Dans ce sens, Tayeb Mokaddem rappelle aux élus du RND, les conséquences d’un second report de cette session de l’APW.

«Un deuxième report de la session de l’APW, aujourd’hui, pour motif d’absence de quorum, serait lourd de conséquences sur l’avenir de notre wilaya. Aussi, je vous réitère que votre présence tous à ces travaux est indispensable», souligne Tayeb Mokkadem.

La crise du FFS déborde sur le fonctionnement de l’APW

L’origine de la crise au sein de l’APW de Tizi Ouzou n’a bien entendu aucun rapport avec le fonctionnement de cette Assemblée ni avec une quelconque divergence fondamentale de stratégie ou un quelconque problème interne. La véritable origine de ce conflit a trait, en réalité, à la crise qui secoue le FFS (Front des forces socialistes).

En effet, il se trouve que la crise du FFS, qui perdure depuis quelques mois, au niveau de sa direction nationale, est ressentie d’abord dans les rangs de la Fédération de wilaya du plus vieux parti de l’opposition mais également à l’APW. Dans ce sens, les six élus du FFS, qui ont clairement affiché leur opposition à l’actuel président de l’APW, Youcef Aouchiche, et à tout ce qui reste du groupe du FFS (13 élus), ont fait le choix de rester fideles à la direction du parti en poste, à savoir l’instance présidentielle menée par Ali Laskri et le premier secrétaire Belahcel, auxquels ils expriment une solidarité sans faille. Il s’agit d’une attitude qui n’a pas été adoptée par Youcef Aouchiche et les 13 autres élus du FFS à l’APW, lesquels ont choisi de rallier la deuxième direction parallèle du parti emmenée à Tizi Ouzou par notamment les parlementaires radiés pour refus de démission des deux chambres avant que la direction ne consent à suspendre toutes les sanctions. Une chose est sûre, la crise interne que vit le parti de feu Hocine Aït Ahmed a eu un impact direct sur le fonctionnement de l’APW.

Les 14 élus du RCD, quant à eux, ne pouvaient que profiter de cette aubaine pour exercer un forcing dans l’espoir de faire pression sur l’actuelle présidence de l’APW. Ces derniers ont donc saisi cette occasion pour observer un sit-in de protestation, dimanche dernier (jour où devait se tenir la session de l’APW pour la première fois), devant le siège de cette Assemblée. Ces 14 élus ont été presque naturellement appuyés par les six élus frondeurs du FFS. Un sit-in où les mots d’ordre des élus «protestataires» étaient, entre autres, «qu’il serait anormal de tenir une session de l’APW» au moment où Samira Messouci, élue dans la même APW, est actuellement incarcérée. La situation semble donc complexe, surtout quand on sait que les six élus du plus vieux parti de l’opposition ne sont pas près de revenir à de meilleurs sentiments à et se réconcilier avec le groupe APW de leur parti qui demeure aussi farouche opposant à la direction actuelle du parti. A vrai dire, seules les positions qui seront prises par les élus du RND et du FLN détermineront le sort qui attend l’APW de Tizi Ouzou.

Le citoyen, otage des conflits internes aux partis

Comme on peut aisément le constater dans ce qui a précédé, les intérêts des citoyens et l’intérêt public sont relégués au dernier plan. Preuve en est. Dans le conflit qui secoue de plein fouet l’APW de Tizi Ouzou, les intérêts des citoyens, la prise en charge de leurs problèmes socio-économiques, le blocages d’une infinité de projets, l’état catastrophique de pas mal de routes, le problème crucial de la pénurie d’eau potable, les incendies de forêt qui ont ravagé des centaines d’hectares, cet été, le blocages de dizaines de projets de logements, entre autres, ne sont guère la priorité absolue des élus à l’APW. Bien entendu, le citoyen devrait d’abord attendre des mois et des années pour que ces mêmes élus règlent d’abord leurs problèmes internes pour que, peut-être, au bout du compte, ils se pencheront enfin sur ses problèmes et autres préoccupations afin de les prendre en charge. Ce même genre de problèmes s’est, pour rappel, posé également avec acuité, au lendemain des dernières élections municipales avec le blocage de plusieurs dizaines d’Assemblées populaires communales n’ayant pas pu dégager une majorité pour la constitution d’un exécutif et des commissions communales. Il a fallu alors de longs mois, voire des années dans certaines APC, pour que les choses rentrent un tant soit peu dans l’ordre, mais après avoir causé d’énormes problèmes aux collectivités, sans compter le blocage des projets ainsi que des salaires des travailleurs communaux. Pour revenir au conflit à l’APW de Tizi Ouzou, est-il vraiment judicieux et censé d’entraver toute une wilaya à cause d’un problème interne qui se pose dans les rangs d’un parti politique ? Placer l’intérêt du parti avant celui des citoyens, qui ont élu les membres de cette Assemblée, n’est-il pas un acte déplorable ? Tenter d’exercer une pression au sein de l’Assemblée populaire de wilaya pour essayer de faire renverser la vapeur dans les partis politiques auquel on appartient n’est-il pas un choix incompatible avec les intérêts des citoyens d’une wilaya, dont l’unanimité est acquise quand il s’agit de reconnaître le retard énorme qu’elle accuse en matière de développement et de parler de son instabilité avérée ? A noter qu’en moins d’un mois (août), la wilaya de Tizi Ouzou a enregistré des dizaines d’actions de protestation, comme la fermeture des routes, dont les RN 12 et 25, les dizaines de fermetures de sièges d’APC, de daïra et des unités de l’ADE (Algérienne des eaux), sans compter les grèves. Toutes ces actions ne sont motivées que par le seul fait que les citoyens en ont marre de frapper à des portes de responsables qui ne s’ouvrent jamais. Ainsi, au lieu de tendre une oreille attentive à toutes les revendications légitimes, dans la majorité des cas, exprimées par les citoyens des 67 communes que compte la wilaya de Tizi Ouzou, on risque de se retrouver aujourd’hui face à deux nouveaux problèmes occasionnés par l’attitude des élus. Il s’agit du blocage du budget supplémentaire de la wilaya et carrément la paralysie de l’APW pour une durée qui risque d’être indéterminée. Quant au citoyen, il semble être le dernier maillon de la chaîne.

A Mohellebi

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