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TIZI OUZOU - Journée mondiale du diabète : La détresse des diabétiques

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L’association des diabétiques de la wilaya de Tizi Ouzou dresse un tableau peu reluisant de la situation des malades, en matière de prise en charge sanitaire comme sociale. À l’occasion de la Journée mondiale du diabète, qui coïncide chaque année avec le 14 novembre, l’association des diabétiques de la wilaya de Tizi Ouzou, qui compte près de 19 000 adhérents, a établi un rapport détaillé sur la situation de ces malades. «Nous, les diabétiques au niveau de la wilaya de Tizi Ouzou, sommes loin de jouir d’un cadre de vie agréable.

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Sans vouloir exagérer, notre quotidien ne peut être qualifié que de supplice, car nous souffrons le martyre dans tout ce qui touche de près ou de loin à notre vie de tous les jours,» est-il indiqué dans le rapport. D’emblée, le topo est fait, avec cette introduction qui en dit long sur ce que vit cette frange de la société au quotidien. Sur le plan médical, le rapport parle d’une «prise en charge qui laisse à désirer aussi bien chez le public que chez le privé». La consultation des patients diabétiques, selon le rapport, est devenue «un acte machinal, au cours duquel de nombreux praticiens se limitent à la délivrance ou renouvellement d’une ordonnance sans prendre le temps de s’enquérir de l’état de santé du patient».

Il est «incompréhensible et inadmissible», estime-t-on, «qu’un praticien reçoive en quelques heures une centaine de malades, voire plus». L’association interroge : «Quelle qualité pourraient avoir les prestations de ce praticien dans ces conditions ?». Toujours dans le volet médical, le problème de «l’indisponibilité de certains bilans et examens dans le secteur public» est posé. Ce fait «contraint les malades à se diriger vers le privé». «À ce niveau, les prix des différents tests sont très élevés et ne sont pas pris comme référence pour le remboursement auprès des caisses d’assurance», regrette-t-on.

Les complications liées à la maladie, note-t-on, «ne sont pas bien prises en charge». Deux exemples sont cités dans le rapport, à savoir le pied diabétique et la rétinopathie. Pour ce qui est du premier, «aucune politique de prévention n’est initiée et les diabétiques qui en sont touchés ne bénéficient d’aucune prise en charge spécifique». Pour le second, le constat est que «si un diabétique commence à avoir des complications, il n’y aura pour lui aucune chance de salut !», s’alarme-t-on. Pour venir à bout de ces problèmes, l’association juge nécessaire de «conclure des conventions avec le secteur privé pour alléger la charge sur le secteur public» et «ajuster les tarifs remboursables à ceux pratiqués par le privé (…)

Ces derniers doivent êtres conformes à une grille arrêtée par les autorités compétentes en concertation avec les professionnels du secteur». Il est aussi utile d’aller vers «la formation des médecins généralistes à la prise en charge des patients diabétiques», souligne-t-on, en plus de la «sensibilisation».

Croissance du nombre d’enfants diabétiques

Le nombre d’enfants diabétiques est en croissance, observe l’association qui compte parmi ses adhérents une centaine d’enfants. «Nous enregistrons une croissance importante du nombre d’enfants diabétiques dont la prise en charge sur le plan médical demeure aléatoire», indique le rapport. Ce dernier fait part «de quasiment l’inexistence de diabéto-pédiatres». Et de poursuivre : «Les pédiatres du secteur privé sont réticents au suivi des enfants diabétiques, sous prétexte que c’est une spécialité de diabétologie, au moment où les diabétologues se montrent à leur tour réticents pour prendre en charge des enfants diabétiques sous motif qu’ils (les enfants) relèvent de la pédiatrie».

Le diabète dans le milieu scolaire est une autre problématique soulevée. «Les élèves diabétiques font souvent face à des difficultés, parfois énormes, dans leur milieu scolaire», fait-t-on savoir dans le document, soulignant l’absence de moyens au niveau des écoles pour prendre en charge les situations d’urgence chez un élève diabétique, notamment pour ce qui est des hypoglycémies, ainsi que la prise en charge psychologique des enfants malades. Les enfants diabétiques sont, depuis des années, regrette-t-on, «privés de colonies de vacances que l’Association organise depuis 1985 sous forme de regroupements thérapeutiques pour les enfants diabétiques, en collaboration avec les pouvoirs publics». L’association déplore que «les pouvoirs publics, depuis 2000 à ce jour, ont cessé de parrainer ces regroupements». Elle pointe du doigt «l’absence d’une politique bien définie et de moyens humains et matériels suffisants pour assurer une prise en charge empreinte d’efficacité et d’humanisme pour tous les patients diabétiques».

36% des adhérents de l’association sans couverture sociale

La situation des diabétiques sur le plan social est loin d’être satisfaisante. L’association tire la sonnette d’alarme. «Le patient diabétique (…) a besoin d’évoluer dans un milieu social favorable à ses spécificités (en tant que malade chronique), qui satisferait ses besoins et aiderait à son épanouissement. Un tel milieu est loin de faire le quotidien des diabétiques au niveau de la wilaya de Tizi Ouzou», écrit-on. Tout en reconnaissant les efforts de l’État dans la prise en charge des malades, notamment en ce qui concerne la couverture sociale, l’association précise que «des diabétiques continuent à en être privés».

Au niveau de l’association, qui compte près de 19 000 adhérents, 36% d’entre eux sont des chômeurs qui ne bénéficient pas de couverture sociale, apprend-on du secrétaire général de l’association. Le rapport, dans ce sens, explique que «l’État a mis en place des dispositifs de prise en charge des non assurés sociaux, dont font partie les diabétiques, tels que le dispositif AFS». L’inconvénient, estime l’association, c’est que «de nombreux diabétiques sont socialement démunis, ne sont pas couverts par la sécurité sociale et demeurent exclus de ces dispositifs».

La cause étant que «parmi les documents exigés par les services de la DASS et de la DSP, figurent une attestation de non-affiliation à la CASNOS et une attestation de non-imposition, des documents que ces deux (2) organismes (la CNAS et les Impôts) ne délivrent pas aux redevables, et de fait donc, ces derniers sont exclus de ces dispositifs». L’association des diabétiques de la wilaya de Tizi-Ouzou s’insurge particulièrement contre «le cas des enfants diabétiques privés de couverture sociale au motif que l’un de leurs parents est redevable vis-vis de la CASNOS ou des Impôts».

Elle invite les autorités concernées à «réfléchir à des mécanismes qui garantiraient une couverture sociale à tous les diabétiques, notamment aux franges vulnérables telles que les enfants», ainsi qu’à «lever les contraintes administratives qui privent des diabétiques de la couverture sociale». Sur la prise en charge des diabétiques dans le milieu professionnel, l’association souligne que « plus de 36% de nos adhérents sont des jeunes en quête de travail», elle suggère «la mise en place d’un cadre réglementaire pour encourager l’insertion des diabétiques dans le milieu professionnel». L’association des diabétiques de la wilaya de Tizi Ouzou, créée en 1985, compte exactement 18 698 adhérents dont 6 893, soit plus de 36%, ont entre 35 et 45 ans. 7 858 de ces malades sont sous insuline, dont 275 sont des enfants de moins de 5 ans et 1 179 entre 5 et 15 ans.

Kamela Haddoum.

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