La leçon de la rue !

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Longtemps décroché de la chose politique, le peuple algérien avait donné, durant près de deux décennies, des signes d’une asthénie craintive. Le réveil tonique des masses populaires, demandant le changement, est une preuve que l’Algérien est loin d’être passif sur son avenir.

La grande explication des mouvements du 22 février et du 1er mars est une leçon à méditer pour au moins deux générations, suivant la chronologie des événements populaires de l’Algérie indépendante. Cette fois-ci, la portée de cette sortie pacifique de tout un peuple aux quatre coins du pays restera indélébile tant la revendication portée par les masses appelle, sans demi-mesure, à un changement radical de la sphère politique dans le fond et dans la forme.

C’est un appel mesuré explicite qui met au pilori toute la classe politique réunie qui n’a su porter cette aspiration populaire encore moins avoir répondu à ses attentes. Ce peuple qu’on a chargé, à tort, -ou à dessein-, d’atone et fataliste face à la chose politique. De sang méditerranéen, l’Algérien est à vrai dire un politisé dans la moelle, qui ne réagit pas au quart de tour des rumeurs et autres affabulations des salonards.

Lui qui a fait fondre et éclipser ces mêmes salonards, pris par la trouille de rater quelque chose à l’occasion de cette élection présidentielle, lors des manifestations d’avant-hier. Vendredi, ce premier mars était une journée d’une leçon de haute facture à retentissement intérieur et extérieur. Jamais le peuple algérien ne s’est mis debout comme un seul homme depuis le cessez-le-feu en 1962. Déterminé et droit dans ses exigences il a crié avec calme et correction pour réclamer un changement du système politique, et le renoncement à l’option du cinquième mandat.

Les centaines de milliers de citoyens et citoyennes de tous âges, toutes classes sociales confondues, ayant investi les rues algériennes sans qu’aucun incident ne soit enregistré, est un cours d’anthologie en maturité politique d’un peuple laissé pour compte par «ses» leaders qui sois disant incarnaient l’opposition durant 20 ans. Ces mêmes leaders qui, toute honte bue, se sont faufilés dans la foule algéroise pour entonner, pour la première fois de leur carrière politique pour certains, des slogans qu’ils n’ont pas choisis.

Ali Benflis qui avait instauré l’interdiction des marches dans la capitale a été amené comble de l’ironie à suivre cet élan et briser sa propre interdiction. La locomotive est devenue un accessoire de rames auquel très peu de gens font attention ! Les chefs de partis ayant donc frôlé le mépris, si ce n’est le chahut des masses à l’image de Louiza Hanoun, prise à partie par la foule avant-hier, vont devoir, derechef, revoir leurs brouillons initiaux et corriger la trajectoire de leur ligne politique, mais également leur attitude envers ce peuple qui n’est pas prêt à descendre de son piédestal.

Le changement à tout point de vue s’impose désormais, pour que ce grand peuple reste grand dans sa patrie, et aux yeux de ceux qui le croyaient en hibernation. Un peuple qui a su rester zen, sage et patient par crainte pour son pays guetté par des charognards qui ont déchiqueté tant de peuples qui avaient cru être aimés par leurs ennemis. La peur, quand elle est canalisée, devient une source d’énergie pour tout affronter savamment.

M A Temmar

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