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UNIVERSITÉ MOULOUD MAMMERI - Colloque national sur l’œuvre de Lounes Matoub : Le Prix de la mémoire décerné au rebelle

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Le Prix de la mémoire a été décerné, hier, au chantre de la chanson kabyle, Lounes Matoub, lors du colloque national qui lui est consacré par l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou.

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Cette distinction, équivalente à l’Honoris Causa attribué par cette même université au poète chanteur Aït Menguellet pour l’occasion de ses 50 ans de carrière, a donc été décernée au rebelle à titre posthume. Sa sœur Malika Matoub, présidente de la fondation qui porte son nom, a reçu une copie (fac-similé) de ce prix.

L’université a prévu de remettre une autre copie sa veuve Nadia Matoub, mais cette dernière a décliné l’invitation et brillé par son absence. L’original de ce Prix sera remis au musée Matoub une fois qu’il sera réalisé.

«En attendant, il sera conservé au niveau de l’université», a affirmé à la Dépêche de Kabylie, Dr Said Chemakh, un des organisateurs de ce colloque intitulé «L’œuvre de Lounes Matoub revisitée». Il ajoutera qu’une copie du prix sera également remise à Nna Aldjia la mère du rebelle.

Par ailleurs, le ministre de la Culture, annoncé par les organisateurs, n’a pas assisté à l’ouverture du colloque. En revanche, le wali Abdelhakim Chater, le P/APW Youcef Aouchiche et la directrice de la culture Nabila Goumeziane ont marqué leur présence à cet événement. Dans une réaction à chaud, la présidente de la fondation Matoub, a souligné : «C’est avec une grande émotion que nous recevons ce prix.

Lounes, durant toute sa vie et durant les années difficiles de la revendication identitaire, a toujours été présent aux côtés des étudiants et des enseignants (…) Quand il y a eu la création des institutions en tamazight à Tizi-Ouzou, Béjaïa et Bouira, il a salué l’initiative avec sa fameuse chanson ‘’Ayafrukh adjel ferfer’’». Pour la sœur du chantre, «ce Prix est l’aboutissement de quelque chose (…) Cela veut dire que Lounes est toujours parmi nous et qu’il entre par la grande porte dans l’Histoire».

À propos du colloque, elle dira : «Il permettra à Lounes de rentrer dans les écoles, pour que ses œuvres soient étudiées et comprises même par ceux qui ne sont pas berbérophones». Le recteur de l’université rappellera quant à lui que l’engagement de l’UMMTO a été fait le 15 Mars 2017 : «On a proposé Honoris Causa pour Lounis Aït Menguellet et le Prix de la mémoire pour Matoub Lounes.

Une décision approuvée par la majorité absolue des membres de conseil scientifique. Et nous sommes là pour honorer notre engagement». Pour sa part, le P/APW dira : «Notre présence ici est un devoir de mémoire vis-à-vis de celui qui fut et qui reste un exemple et un symbole de combat pour la démocratie, les libertés et les droits de l’homme».

Il ajoutera : «Lounes Matoub est immortel, il restera présent à travers ses idées, son combat et l’héritage qu’il a laissé. Il a frayé un chemin et son combat sera honoré et poursuivi». Le wali Abdelhakim Chater saluera la pertinence et la portée du colloque : Il dira concernant le colloque : «Il est historique, il s’inscrira dans les annales de l’université Mouloud Mammeri».

Puis, la wali vantera le «mérite» de Matoub et l’«apport» de son œuvre : «L’œuvre musicale et poétique de Matoub mérite d’être étudiée. Il a été et restera une véritable idole intouchable. Il a marqué les esprits par le combat qu’il a mené avec conviction, pour la défense de la langue et de la culture amazighes.

Nous sommes heureux d’assister à l’aboutissement de ce combat, avec l’officialisation de la langue amazighe, l’inscription de la journée de Yennayer au calendrier officiel des fêtes nationales et la création de l’académie de la langue amazighe dont la composition vient d’être annoncée».

M. Chater ajoutera : «La valeur de Lounes Matoub est reconnue de tous. Et c’est en signe de reconnaissance de cette valeur que le président de la République a approuvé le projet de réalisation d’un musée, au village natal de Lounes, destiné à préserver sa mémoire et son héritage artistique et culturel.

Ce projet, qui a bénéficié d’une enveloppe financière, sera lancé prochainement». Le wali annoncera : «L’œuvre musicale de Lounes Matoub bénéficiera de l’orchestre symphonique pour le patrimoine musical amazigh que les services du ministère de la Culture s’apprêtent à mettre sur pied».

Des communications du colloque…

«Matoub, entre narcissisme et réalisme», est une des communications qui seront présentées durant ce colloque, par Mme Amrar Farida, doctorante, et Dr Hamdi Aissa, du DLCA de l’Université de Bouira.

Loin des jugements de valeur et des stéréotypes que stimule le sens commun, précise-t-on, les chercheurs se sont penchés beaucoup plus sur son ouvrage Le Rebelle, usant de la technique d’analyse du contenu visant ainsi à recueillir les données, directement, de l’acteur social, tel que recommandé pour toute recherche anthropologique.

Les différents vecteurs reflétant sa pensée, telle que : Matoub l’enfant difficile ; Matoub et sa mère ; Matoub et le colonialisme ; Matoub et la diversité linguistique ; Matoub et les pères blancs ; Matoub et l’éveil identitaire, etc. seront donc abordés.

«Regard sur la poésie matoubienne. Un legs multidimensionnel à sauvegarder» est une autre conférence qui sera animée par M. Arab Khaled, doctorant en anthropologie, à Université d’Oran 2.M. «… La voie initiée par Matoub Lounes empruntait les raidillons du gémissement sans voile, de l’expression débridée et des rêves fous de toute une génération qui voulait en finir avec le despotisme qui avait ligoté les libertés individuelles et collectives, confisqué l’identité millénaire d’un pays et pris en otage le sort de tout un peuple assoiffé de lumière et de justice.

Apportant un nouveau style à la chanson kabyle engagée : style dénonciateur et revendicatif, le lion indomptable des montagnes se situait d’emblée aux antipodes des stéréotypes de l’époque». La communication se veut «une relecture du génie poétique de Matoub Lounes, en associant un ensemble de mots intimement liés à sa personne – Algérie, Montagnes, Kabylie, Boudiaf, Châabi, Djamila, El Anka, Femme, Gala, Hommage, Izem, JSK, Kenza, Nadia, Octobre 1988, Pèlerinage, Québec, Rebelle, San Fransisco, Tajalt, Unesco, Yemma, Zénith, etc. – et leur synergie pour en savoir davantage sur le personnage contesté et incontesté de tous».

Une autre communication portant sur la «Contribution à l’étude sémiotique du texte ‘’Amjazi ou communion avec la patrie’’ de Matoub Lounes» sera présentée par Dr Bellal Nordine, du DLCA de l’Université de Bouira. Le conférencier abordera «L’approche de texte poétique de Matoub Lounes».

A travers laquelle «nous viserons de réaliser une lecture sémiotique d’un poème de ce poète-chanteur qui sera comme un exemple d’étude de ses textes poétiques, c’est-a-dire, nous nous proposons de mener une analyse sémiotique, comme une nouvelle lecture du texte ‘’Amjazi ou communion avec la patrie’’.

Nous avons choisi de porter notre intérêt sur l’étude des composantes narratives et discursives de ce texte, afin de dégager ses structures signifiantes et constituantes. Nous nous appuyons sur la théorie sémiotique pour accéder au sens véhiculé dans ce poème et comprendre comment Matoub a construit et structuré cette signification dans son poème».

«L’œuvre poétique de L. Matoub : un livre ouvert sur l’Histoire» est une autre thématique qui sera abordée par Mme Bouzenada Leila, doctorante au département de Français de l’Université de Blida. «L’œuvre de Lounès s’oppose, à travers plusieurs textes, au mensonge historique et à l’Histoire instrumentalisée. Elle constitue en effet un livre ouvert sur l’Histoire, un fonds inépuisable qui servira toujours à démythifier l’Histoire idéologique et à la sortir des carcans de la censure», résume-t-elle.

Dr Chemakh, quant à lui, concentrera son intervention dans ce colloque sur «Les langues Tamaziɣt et Taɛrabt» dans les textes matoubiens. Significations et interprétations plurielles. «Sur un corpus constitué de plus de 130 textes poétiques chantés durant la carrière de L. Matoub, les langues, particulièrement Tamaziɣt et Taɛrabt, sont citées de façon explicite ou implicite dans près de 20 textes», souligne le conférencier. En tout, 37 communications sont au programme de ce colloque qui s’étale sur deux journées.

Kamela Haddoum.

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