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Alors que plus de 200 Algériens sont tués et jetés dans la Seine : Papon refusait de reconnaître ses crimes

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Pour l’histoire, rappelons que préfet de Paris en 1961, Maurice Papon avait imposé aux Algériens le couvre-feu « au faciès » le 5 octobre 1961. Puis il avait supervisé la sanglante répression de la manifestation pacifique des Algériens de Paris et de sa banlieue à l’appel du FLN contre ce même couvre-feu.

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Dans le livre — de référence sur le sujet — La bataille de Paris sorti en 1991, Jean-Luc Einaudi décrit minutieusement les mécanismes et les responsabilités de cette tragédie. Le 17 octobre 1961, plusieurs milliers d’Algériens descendent en cortèges désarmés et pacifiques des banlieues vers le centre de Paris, répondant à l’appel du FLN pour protester contre le couvre-feu décidé par le préfet de police, Maurice Papon. Maurice Papon avait en effet décrété la fermeture des débits de boissons fréquentés par « les Nord-Africains » (en fait, cela s’adressait aux Algériens), dès 19h, pour empêcher les attentats du FLN contre les forces de police. Dans la nuit du 17 octobre, plus de 11 000 arrestations sont opérées : depuis la rafle du Vel’d’Hiv, presque vingt ans plus tôt, c’est la plus grande rafle de l’histoire. Les mêmes autobus de la RATP servent, comme en 1942, à transporter les Algériens au Parc des expositions. Les arrestations continuent les jours suivants. Les manifestants sont battus, torturés, assassinés, jetés dans la Seine. Plus de 200 d’entre eux sont tués et jetés dans la Seine. Un crime qui ne sera là aussi reconnu que quarante années plus tard. En effet, le 26 mars 1999, la justice française, en déboutant Maurice Papon de sa plainte en diffamation contre Jean-Luc Einaudi, reconnaissait officiellement, pour la première fois, le massacre des manifestants pacifiques algériens perpétré les 17 et 18 octobre 1961 par la police de Paris au nom de l’Etat français. Jean-Luc Einaudi, qui a contribué à sortir ces événements de l’oubli, nous affirmait dans une de nombreuses interviews qu’il nous a accordées que « la pire des choses, c’est le mensonge, la négation, l’organisation de l’oubli. Refuser de reconnaître les crimes commis, c’est refuser de reconnaître les victimes, c’est continuer à porter sur les victimes un regard qui les nie dans leur dignité d’hommes, de ce qui fait leur humanité. C’est évidemment porteur de toutes les dérives ».

Papon refusait de reconnaître ses crimes

Son avocat au procès que lui avait intenté Maurice Papon nous affirmait alors qu’« au procès, 180 documents et témoignages ont corroboré les propos de Jean-Luc Einaudi, soit qu’il y a bien eu un massacre le 17 octobre 1961 et les jours suivants ». L’avocat nous a par ailleurs affirmé que « l’ouverture des archives permettra enfin d’obtenir gain de cause pour la manifestation de la vérité au nom des victimes, mais aussi pour la démocratie. C’est également important pour les jeunes issus de l’immigration qui sont à la recherche de leur identité et de repères. La restitution de leur mémoire leur permettra d’affirmer leur identité. Il est bon que les jeunes générations sachent que leurs proches ont perdu la vie la tête haute, dans la dignité et pour leur dignité ». Par ailleurs, Maurice Papon avait été condamné pour son rôle dans la déportation des juifs durant la Seconde Guerre mondiale alors qu’il était secrétaire général de Gironde. Condamné à dix ans de réclusion criminelle par la Cour d’assises de Gironde le 2 avril 1998 pour « complicité de crimes contre l’humanité », Maurice Papon avait été incarcéré fin 1999 après avoir été arrêté en Suisse où il avait fui. Après trois ans de détention, il avait été libéré le 18 septembre 2002 pour raisons de santé deux experts médicaux l’ayant déclaré « impotent » et « quasi-grabataire ». En 1942 à Bordeaux, ville considérée comme particulièrement « collaborationniste », Maurice Papon devient, à 32 ans, secrétaire général de préfecture, une place stratégique qui coiffe le bureau des questions juives. Il fait carrière sous l’égide du général de Gaulle, devenant préfet à Constantine, avant d’être nommé en 1958 à la tête de la préfecture de police de Paris (1958-67). Valéry Giscard d’Estaing en fera son ministre du Budget.

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