Témoignage : Bahmed Brahim (lycéen en 1980)

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«Notre marche sera tout de suite réprimée ».Très jeune, alors que j’étais encore au CEM, je savais ce que signifiait Tifinagh et je savais aussi qu’une grammaire berbère existait, je connaissais « Ekker a mmis n umazigh ».. C’est vous dire que bien avant le lycée, et tout comme mes camarades de classe, nous avions déjà conscience de notre identité. Avril 80 nous retrouvera, pour ainsi, dire « aguerri » et prêts à battre le pavé. L’interdiction de la conférence de Mouloud Mammeri et les ‘’insultes’’ de presse qui s’en suivront seront, en quelque sorte, la goutte d’eau qui fera déborder le vase. Et c’est à partir de là que lycéens que nous étions, avions décidé de protester contre le déni de notre identité. Cela se traduira par la marche que nous avions organisée le 14 avril 1980. Nous étions près de 800 lycéens à nous rassembler devant le portail du lycée, avant de marcher. Banderoles, slogans, carrés… tout était préparé. Nous avions aussi compté sur la mobilisation des citoyens à l’extérieur. Il était convenu, qu’une fois dehors, ils se rallieraient à nous. Seulement, nous n’avions pas atteint le centre de la ville. A 200 mètres du lycée un cordon des services de sécurité nous attendait de pieds fermes. Notre marche sera tout de suite réprimée. Les lycéens pourchassés à travers champs. Mais cela ne fera que renforcer notre conviction. La mobilisation restera tel quel jusqu’en 1982. Beaucoup de mes camarades seront exclus en octobre 1981. D’autres (dont votre serviteur) seront interpellés et ‘’auditionnés’’ par les services de la direction des personnels et de la justice militaire (Tagarin, Alger), il y a ceux qui écoperont d’un mois de prison.

Oulaïd Soualah

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