Comment relancer l’économie

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Tizi-Ouzou a abordé le 3e milinaire, dans la douleur, de sorte que l’avènement du printemps noir s’est traduit par un désinvestissement  perceptible, une montée du chômage et de la violence, une diminution des recettes fiscales, qui s’est répercutée sur les budgets des APC et celui de la wilaya, et un déséquilibre financier des entreprises, tant publiques que privées, fortement affectées au niveau de leur approvisionnement et de la commercialisation.

C’est ainsi que la problématique de la relance économique dans la wilaya de Tizi-Ouzou se pose d’une manière telle qu’elle doit constituer une priorité dans l’action des pouvoirs publics et inciter à une mobilisation de toutes les forces saines, quelles que soient leurs tendances politiques, en vue d’offrir de meilleures perspectives à une jeunesse fortement désemparée.  Nous sommes convaincus que dans ce contexte douloureux, aucun programme et aucune stratégie ne peuvent constituer une réponse adéquate à cette problématique, sans un retour à la paix civile, qui ne peut se réaliser sans que ne soient apportées, entre autres, des réponses adéquates aux demandes citoyennes, qui s’articulent, notamment, autour d’une véritable démocratie et d’une reconnaissance de l’Amazighité qui n’est pas l’apanage de la seule Kabylie, et qui constitue, en fait, non pas un facteur de division, mais plutôt un trait d’union de tous les Algériens, d’Est en Ouest et du Nord au Sud.  Il y a lieu, aussi, de mener une lutte sans merci au phénomène de rapt qui sévit depuis plus d’une décennie à travers la wilaya, et qui constitue un facteur de désinvestissement.

 

I – Mise en place d’un vecteur de developpement par le bâtiment

Le bâtiment, étant connu comme étant un vecteur de développement économique, et sachant que notre wilaya a été fortement lésée, en termes de réalisations de logements à caractère social (10 000 logements environ, depuis l’avènement des différents programmes), il conviendrait que les  pouvoirs publics rendent justice à notre wilaya en lui octroyant un programme spécial de compensation, celui-ci devrait être aussi consistant que ce qui est réalisé jusqu’à présent et doit s’étendre à nos villages. Au niveau statistique, on doit cesser d’assimiler les aides à des réalisations de logements.  Ce vecteur mis en place, il y a lieu d’accorder toute l’attention aux potentialités de la région qui sont diverses et riches par :

– Les potentialités hydriques et  agricoles, qui restent à valoriser.

– Les 100 kms de côtes, très faiblement exploitées.

– Les traditions artisanales, très appréciées.

– Les potentialités touristiques.

– Les importantes forêts qui recèlent une pléiade de sous-produits à valoriser.

 

2 – Réhabilitation du chef-lieu : Poumon économique” de la wilaya

De par sa position géographique, ses infrastructures sociales, culturelles, éducatives, universitaires et sportives, sa part importante, en termes de foncier industriel, la ville de Tizi-Ouzou constitue le poumon économique de la région. À ce titre, et au regard de sa situation générale peu reluisante, elle doit nécessairement bénéficier d’un programme de réhabilitation  destiné à la rendre plus attractive et consistant notamment à améliorer la circulation par les actions suivantes :

– Etablir un plan de circulation qui permettra une meilleure fluidité de celle-ci.

– Etudier la faisabilité d’une rocade Nord, qui passerait au dessous de Redjaouna.

– Réaliser une couronne de circulation autour de la caserne militaire, celle-ci pouvant jouer le même rôle qu’une rocade, dont l’effet attendu est l’amélioration de la liaison ancienne ville-nouvelle ville, qui constitue le nœud gordien de toute la problématique de la circulation automobile dans la ville de Tizi-Ouzou et qui dépeint gravement sur l’attractivité de l’ensemble de la wilaya.

– À défaut de réaliser cette couronne, il ya lieu d’étudier la faisabilité d’un tunnel sous le Bordj Turc, et ce, toujours dans la perspective d’améliorer la liaison ancienne ville-nouvelle ville (Les deux grands ensembles communiquant très mal).

3 – Les infrastructuresde base

Le bilan des réalisations dans ce domaine est peu reluisant, de sorte que l’on continue à circuler sur les routes de l’ère coloniale, dans une wilaya à très forte densité de population, qui recèle le deuxième parc automobile à l’échelle nationale.  Cette donne n’a pas manqué de se répercuter très négativement sur l’attractivité de la région, en raison d’un flux automobile difficile à supporter, tant sur le plan du bien-être, que sur le plan économique.  A titre d’exemple, le trajet Tizi-Ouzou – Béjaïa (120Kms) peut durer autant que le trajet Alger-Oran (500Kms).

Les actions proposées sont comme suit :

– Canalisation de l’oued Sébaou, en créant un axe autoroutier Azazga-Boumerdès, dont une entreprise aura la charge de gérer l’infrastructure, ainsi que l’exploitation rationnelle du sable, pour assurer les besoins en agrégats de la wilaya, sans porter atteinte à l’environnement. Le financement d’un tel ouvrage pourrait se faire partiellement, par le produit de la vente de terres agricoles qui ne manqueront pas d’être dégagées.

– Création d’un nouvel axe autoroutier Fréha-Sidi Naâmane, parallèlement au gazoduc .

– Extension de l’activité des ports d’Azeffoun et Tigzirt au transport de voyageurs et de marchandises.

– Extension de la ligne de chemin de fer d’Oued Aïssi à Azazga.

– Au risque d’apparaitre rêveur, je rajouterai un aéroport international, pour lequel la région de Timizart offre les potentialités foncières nécessaires.

4 – Les infrastructures énergétiques

Le projet d’une centrale électrique reste incontournable pour assurer la pérennité et la qualité de la distribution de l’énergie électrique à travers la wilaya. S’agissant des produits pétroliers (carburants), si les capacités de stockage assurent une bonne autonomie, il n’en demeure pas moins que les moyens de ravitaillement par rails rend celle-ci quelque peu aléatoire. Il serait très intéressant d’examiner la possibilité de relier le dépôt carburants d’Oued Aïssi par un pipeline multi-produits, qui emprunterait le même couloir que celui du transfert d’eau vers Alger. Il y a lieu de savoir qu’initialement, les services de KDG avaient projeté de réaliser le gazoduc de renforcement Ф 16״, au niveau de ce couloir qui offrait l’avantage d’être déjà indemnisé. Concernant, l’alimentation en gaz butane, les aires du stockage régulateur sont fortement recommandées, au niveau des communes de haute montagne.

5 – En matière de fonctionnement de la chambre de commerce et de l’industrie du Djurdjura

La CCID, qui peut constituer un acteur important de cette relance, doit faire l’objet d’une véritable réhabilitation pour lui permettre de jouer pleinement son rôle, il s’agit notamment de :

– Lui octroyer un nouveau siège, à la hauteur de ses missions.

– Relever la contribution financière accordée annuellement par l’Etat.

– Engager une campagne d’adhésion plus active auprès des commerçants et des industriels, en les sensibilisant notamment sur la nécessité de préserver leurs intérêts.

– Améliorer la prestation de formation et de toute activité lucrative pour renflouer les caisses de la CCID, laquelle formation doit s’élargir en particulier en direction des créneaux qui font défaut dans notre wilaya, tout en sortant de la formation académique et en répondant aux vrais besoins de la wilaya en termes de recyclage, de perfectionnement et de mise à niveau.

6 – En matière de redynamisation de la chambre de l’agriculture

Les mêmes recommandations émises pour la Chambre de l’industrie sont à reconduire pour celle de l’agriculture.

7 – En matière de viabilisation des zones d’activités

La viabilisation des différentes zones d’activités demeure très faible dans notre wilaya, de sorte qu’une intervention est nécessaire pour tous les réseaux (routes, assainissement, AEP, Téléphone…). 

8 – En matière de satisfaction des besoins de la wilaya en agrégats

Tous les techniciens s’accordent à affirmer, et les essais techniques le démontrent, que le « concassé » présente de meilleures qualités pour le béton que le « roulé ». De plus, l’exploitation du sable d’oued ne pouvant se faire sans occasionner de dégâts aux ouvrages routiers et aux terres agricoles, et considérant les risques de catastrophe qui pourraient s’abattre sur la population par la contamination irréversible des eaux, il y a lieu d’aller à vers un programme de reconversion des sablières vers les carrières de montagne, tout en assurant les besoins de la wilaya au cours d’une période transitoire qui devra être aussi courte que possible. Certaines personnes font remarquer, à juste titre, que le Parc National du Djurdjura jouit, malgré son éloignement des sites abritant les forces de sécurité d’une meilleure protection que l’Oued Sébaou qui demeure livré à des « prédateurs » qui se recrutent dans toutes les couches de la société. Une modification des contours du Parc du Djurdjura est recommandée, de manière à permettre l’installation de nombreuses carrières au sud de la wilaya, en les soumettant au préalable à une étude d’impact sur l’environnement. Un effort d’imagination nous permettra de nous apercevoir que la wilaya regorge d’agrégats, notamment au niveau de la zone Nord, où ils se présentent sous forme de rochers multidimensionnels à ciel ouvert. Il est possible de procéder à leur exploitation par des mini concasseurs mobiles, dont il faut doter des micro-entreprises de jeunes, qui auront à assurer une double prestation :

– Mise en valeur des terres (en particulier la zone côtière).

– Mise à disposition d’agrégats qui aura un impact certain sur le coût des travaux de bâtiment, de travaux publics et des constructions privées (abondance et rapprochement de la matière). Pour ce volet, il faut avoir en mémoire l’expérience des ex « Ponts et Chaussées » hérités de la période coloniale, qui assuraient, en toute facilité l’entretien des routes, grâce à ces mini-concasseurs qu’on pouvait installer sur n’importe quel site, sachant que la durée de vie de leurs activités étaient très réduites, et par conséquent ne généraient pas de problème environnemental et de réaction hostiles des riverains.

9 – En matière de nécessité d’une protection des gîtes de minéraux nobles

Malgré l’existence d’une unité de recherches minières à Tizi-Ouzou, nous relevons que très peu d’études sont réalisées à travers le territoire de la wilaya, qui regorge de gites de substances utiles (construction, chimie, industrie, aliment bétail…).

Il y a lieu de procéder, au plus vite, à l’identification de ces cites et de les classer zones inédificandi pour assurer leur future exploitation. Une seule étude a été menée en 1990, celle-ci consistait notamment à identifier les gites d’agrégats.

10 – En matière de nécessité de mettre fin au marché informel

Le commerce informel a notamment prospéré au niveau du chef-lieu de la wilaya, au point de rendre la vie insupportable aux citoyens, au niveau de certains sites. Les pouvoirs publics ont pris conscience de la nécessité d’y mettre fin et les actions engagées sur le terrain, ne doivent pas être conjoncturelles.

 

11 – Recupération et re-utilisation de certaines infrastructures

Il subsiste, à travers la wilaya, de nombreuses infrastructures ayant abrité des activités commerciales, industrielles, culturelles, ou autres, laissées à l’abandon, pour certaines d’entre-elles, depuis plus de deux décennies. Un recensement général de ces infrastructures pourrait réserver bien des surprises.

12 – Restructuration de la zone industrielle de Oued-Aïssi

La répartition des surfaces foncières au niveau de la zone industrielle d’Oued Aïssi, ne s’est jamais faite de manière rationnelle, de nombreux espaces peuvent être récupérés, en vue de leur réinjection au profit de nouveaux investissements. Une expertise des lieux est vivement recommandée.

Oussadi Mouloud, ex-ingénieur

principal à la DEM de Tizi-Ouzou

( A suivre dans notre

prochaine édition…)

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