«Progresser ne veut pas dire oublier ses références»

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Djamel Izli est un artiste mozabite.

Il chante avec sa fille Amira, deuxième au concours de la chanson locale tenu l’an dernier à Ghardaïa. Malgré les pressions qui s’exercent sur lui et sur sa fille, vu le caractère « rigide » de la société mozabite, Djamel ne recule devant rien. Il veut, sur le plan social, « faire bouger les choses et aller de l’avant» et du côté artistique, « donner une autre dimension» à la chanson mozabite.

La Dépêche de Kabylie : On commence d’abord par vos impressions après le spectacle ?

Djamel Izli : Je pense que notre passage été très apprécié par le public, ce qui est impressionnant pour nous. Moi, j’ai fait un travail et je suis venu partager ce moment de bonheur avec le public. La réaction du public a été positive et encourageante. Cela nous aide à progresser. Je sens que j’ai partagé quelque chose de beau avec le public de Tamanrasset.

La chanson mozabite se modernise, elle prend de nouveaux sentiers et vous êtes de ceux qui veulent lui donner une autre dimension, quel est votre objectif et pourquoi vous voulez tant ce changement ?

Mon objectif est celui de tout artiste qui veut que la chanson reste à la page. Je travaille dans le sens de permettre à la chanson mozabite de se rattraper par rapport à celle des autres régions du pays et surtout à la chanson amazighe. Donc, je fais tout pour que la chanson de ma région ne reste pas renfermée parce que, comme vous le savez, nous sommes les enfants d’une société très conservatrice. Je comprends bien le fond de la société mais si on fait tout cela, c’est parce qu’on a besoin de se battre pour ce qu’on aime. Progresser ne veut pas dire oublier ses références ou ses racines. Progresser, pour ceux qui aiment avancer, c’est avancer et conserver. Pour la chanson mozabite, elle fait ses pas, doucement mais sûrement, grâce au festival institué par le Ministère de la culture dans la région du Mzab, de nouvelles sonorités et des voix commencent à sortir de la léthargie et de l’oubli. Ces jeunes s’accrochent à la chanson du Mzab pour la faire avancer.

Vous avez parlé de stagnation, effectivement, on a l’impression que votre chanson est figée sur les thèmes religieux …. ?

La chanson du Mzab existe, mais elle est étouffée. Il y’a une certaine complicité entre l’artiste et ceux qui sont contre la chanson. Pour moi, un artiste qui aime sa chanson, qui est sincère et qui aime chanter, n’a qu’à le faire. C’est un combat qu’il doit mener où qu’il soit. En ce qui concerne la chanson religieuse. C’est en la modernisant, tout en gardant nos références et nos valeurs, qu’elle pourra garder sa place.

Vous avez parlé de combat, justement comment avez-vous fait face à toutes les pressions, surtout que votre fille, Amira, a eu le deuxième prix du festival de la chanson mozabite l’an dernier ?

Salah Aghlane a eu le premier prix, Amira, ma fille le deuxième et enfin, Brahim Khezmati, le troisième prix. Pour moi, qui suis le père de cette jeune fille, je pense que l’éducation est basée d’abord sur la confiance. Cette confiance partagée entre les parents et les enfants est primordiale dans la vie d’une famille. Depuis que ma fille est née, elle me voyait chanter. Elle a aimé la chanson et c’est depuis qu’elle a voulu chanter. Le jour où elle m’avait demandée de chanter, j’ai accepté parce que je garde cette relation de confiance qui nous lie. Peut importe ce qui se dit autour de moi. Je ne veux qu’accompagner mes enfants dans la réalisation de leurs rêves. Je suis là pour les aider dans leurs projets. Du coté artistique, je pense, en tant qu’artiste, que ce que fait ma fille actuellement est synonyme de celles qui pratiquent le sport. Elle ne sait rien de ce qui se passe dans notre société. Elle grandit et elle aime ce qu’elle fait. Elle veut continuer, et si un jour elle décide de changer, je vais, encore une fois, l’accompagner dans ses choix de vie.

Propos recueillis par M. M.

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