Accueil Culture La veuve et l’ogresse (Thadjalt d’teriel)

La veuve et l’ogresse (Thadjalt d’teriel)

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(2e partie et fin)

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Invitée à partager son maigre dîner fait de galette, de figues et de lait caillé, la vieille femme refuse arguant qu’elle avait mangé, et qu’en aucun cas, elle ne toucherait au manger des petits. Mise en confiance, la jeune veuve sourit. Elle lui indique un endroit pour la nuit.La vieille refuse de se reposer. Au contraire, elle se met à côté de la veuve pour faire avancer l’ouvrage. Elle est contente de cette heureuse initiative. Les deux femmes travaillent d’arrache-pied, mais de temps en temps, la veuve surprend la vieille, en train de lorgner vers les petits endormis, se pourlécher les babines et laine tomber des gouttes de salive. Teriel salive de plus en plus jusqu’à écumer et mouiller les fils de laine qu’elle touchait. La jeune veuve est intriguée, elle la regarde dans la pénombre. Soudain comme mordue par un serpent, elle prend conscience de son inconscience.Elle réfléchit au moyen de s’en sortir avant qu’il ne soit trop tard. Le kanoun (âtre) dégageait une douce chaleur. La jeune veuve se lève et ajoute des brèches (isgharen ou iqefchouden). Le feu ravivé éclaire la chambrée. Teriel n’attend que l’instant où la veuve va sombrer dans le sommeil pour dévorer tranquillement toute la famille. Mais c’était sans compter sur l’instinct de conservation de la jeune veuve et de l’amour sans bornes qu’elle éprouve pour ses petits. Elle invite la vieille à se reposer un instant près du feu rougeoyant. Feignant tout-à-coup une vive démangeaison dans sa tête, la veuve s’écrie : »Enghant iyi thilkine ek’mez negh qim »- (Les poux me dérangent beaucoup, il n’y a que le feu pour en venir à bout !)Joignant le geste à la parole, elle s’empare d’un tison enflammé (aqechoudh ireqen) et se met frénétiquement à se gratter avec le bout où il n’y a pas le feu. Aussitôt elle dit : « Ilha ! ilha ! c’est bon ! c’est bon ! Ça soulage parfaitement ! » Teriel (l’ogresse) dont les cheveux hirsutes sont pleins de poux lui dit :- « Moi aussi, j’ai des démangeaisons. Passe moi un tison ! », c’est l’occasion rêvée qu’attend la veuve pour se débarrasser de Teriel. Elle choisit un tison presque entièrement consumé et le lui tend. Teriel s’en empare et la porte à sa tête. Elle imite la veuve, mais le bout non incandescent est trop petit pour atteindre son cuir chevelu. Aussitôt sa tignasse prend feu. Sous l’effet de la douleur, elle se précipite dehors en arrachant la porte. Sous l’effet du vent, le feu attisé se propage à ses vêtements. Elle court vers la rivière pour éteindre les flammes, elle glisse et tombe dans une mare recouverte d’une mince couche de glace qui craque sous son poids. Les flammes s’éteignent mais Teriel l’ogresse se noie. »Our kefount eth’houdjay i nou our kefoun ird’en tsemz’ine. As m-elâid’ ametch ak’soum ts h’em’zine ama ng’a thiouanz’iz’ine. »(Mes contes ne se terminent, comme ne se terminent le blé et l’orge. Le jour de l’aïd nous mangerons de la viande avec des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).

Benredjdal Lounès

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