Accueil Culture “L’humour fait partie de moi”

Ghilas Aïnouche Caricaturiste : “L’humour fait partie de moi”

3852
- PUBLICITÉ -

Dans l’entretien qui suit, le jeune caricaturiste,Ghilas Aïnouche nous parle de son expérience dans le domaine et ses projets.

- PUBLICITÉ -

La Dépêche de Kabylie : Qui est Ghilas Aïnouche ?

Ghilas Aïnouche : Un caricaturiste de 23 ans vivant en Kabylie. J’ai commencé dans un journal universitaire. Après des passages dans l’hebdomadaire ‘Avis’ ,’Berbère Télévision’ (émission YAL), ‘le jeune indépendant’, ‘le café littéraire de Béjaïa’, j’ai atterris dans le journal électronique ‘Béjaïa-aujourd’hui’. En parallèle, je poursuis mes études à l’université de Béjaïa.

Récemment, Djezzy m’a élu prodige algérien dans le domaine de la caricature.

Qu’est ce qui vous a amené à la caricature ?

Au début, je ne faisais que des dessins réalistes (portrait, nature…). Par ailleurs, je faisais, depuis l’âge de 7 ans du théâtre, du chant et des montages poétiques avec ma sœur Dihya. Deux albums sont sur le marché. C’est mon père (Karim Aïnouche dit ‘Winna’) qui composait les textes. Nous traitons les sujets avec humour. Avec mes amis, l’humour est toujours présent. Même les sujets sérieux, nous les traitons de manière humoristique. Les gags ne sont jamais absents dans nos discussions. Je lis énormément que ce soit les journaux ou les magazines. J’essaye de suivre l’actualité nationale et internationale, à travers la télévision ou la radio et lorsque l’occasion m’est offerte, j’assiste aux conférences-débats organisées ça et là. Je ne suis pas du genre qui se complait en restant assis devant son bureau. Je suis comme ça ! C’est ma nature. En résumé c’est la caricature qui répond au mieux à ma personnalité.

Quelles sont vos influences ?

Y en a tellement ! Le dessinateur que j’admire le plus, c’est Gotlib. Quand j’étais petit, je reproduisais tous les dessins qui accrochaient mon attention et avec le temps, j’ai pu me forger un style me distinguant de tous les autres.

Est-ce que vous visez un public bien précis, les jeunes par exemple ?

Je m’adresse à tout le monde. S’il s’agissait d’une seule personne, je n’ai qu’à m’adresser à elle en lui débitant mes pensées bien en face ou, à défaut, par e mail ou téléphone. Pas besoin de caricatures dans ce cas. Mon objectif est de toucher le maximum de gens possible.

L’art de la caricature rejoint la Bande dessinée dans ses procédés, avez-vous été tenté par cette dernière ?

Je touche à tout. Pour passer le message, y a plusieurs méthodes. Pour les courts messages, je me contente de dessins humoristiques Tout en tâchant d’être le plus percutant possible. Par contre, s’il est un peu long, y a le Comic Strip qui est une mini BD en une seule ligne. Quand il y a beaucoup de choses à dire, une ou plusieurs planches de BD peuvent répondre aux besoins. Tandis que sur scène, lors des conférences à l’instar de celles organisées par le café littéraire, j’emploie le cartoon event ( animation en direct par des dessins) qui est une excellente manière de capter l’attention du public.

Quelles sont les thématiques abordées dans vos dessins ?

Politique, social, économique, sportif, culturelle… Je traite de tout. Des fois même de n’importe quoi. Juste pour rire, histoire de passer un bon moment. Seulement, il n’y a rien pour rien. Y a toujours une leçon à tirer.

La caricature comme genre est basée sur l’humour, est-ce que vous en faites une priorité dans votre travail, comment conciliez-vous le tragique et l’humoristique ?

Non, je ne calcule rien avant de faire un dessin. La preuve, je n’utilise pas de calculatrice. L’humour fait partie de ma personnalité ce qui ressort automatiquement dans mes dessins. Avec tous les malheurs de ce monde, il est nécessaire de décrisper les lecteurs pour mieux les aider à supporter les aléas de la vie.

Y a-t-il des situations, des personnages que vous vous interdisez de représenter par autocensure ?

Juste un, c’est Mahomet (Que le Salut Soit sur Lui) pour éviter les manifestations de rues. Pour

le reste, je ne me donne aucune

limite.

Hormis le café littéraire où l’on voit exposer votre travail, y a-t-il d’autres espaces où le public pourrait vous découvrir ?

J’ai une page facebook : Ghilas Aïnouche, comme on peut voir certaines de mes œuvres sur You Tube.

On remarque dans votre travail une certaine prise de conscience par rapport au vécu social et politique, d’autre part, vous faites partie d’une génération blasée, violentée, qu’en pensez-vous ?

Depuis 2007, je n’ai pas cessé de faire du porte-à-porte dans les maisons de presse pour une éventuelle intégration. Malheureusement, c’est toujours sans suite. J’ai vu bon nombre de journaux qui n’ont pas de caricaturistes. Les responsables ne daignent même pas jeter un coup d’œil sur mes esquisses. La même question qui revient souvent: «T’as quel âge ?». Après constatation de mon jeune âge, toujours la même réponse aussi : «T’es encore jeune, t’as un grand avenir devant toi !». Désolé d’entendre de tels propos de la bouche de certains «justiciers» de la plume. J’ai appris que chez nous, les jeunes doivent s’armer de patience, avant de prétendre occuper une place dans la société. A moins d’avoir de larges épaules ou d’avoir un quelconque coup de pouce. Le talent n’est plus un critère de choix en Algérie. Aux plus futés et aux mal foutus reviennent les grands mérites. Le paradoxe est qu’ils sont toujours les premiers à dénoncer les injustices multiples, les malversations et les passes droits. Est-ce la loi du commerce ? Sûrement, oui! Dommage pour notre peuple, si digne et fier, d’être aussi malmenés par ses prétendus défenseurs. J’ai eu l’occasion de gagner des espaces dans certains journaux sans rien avoir en contrepartie. Malgré les contrats dûment signés et les ordres de mission, pas un centime de leur part n’a atterri dans ma poche.

Ceci explique largement le désespoir de notre jeunesse qui ne trouve pas d’oreilles attentives à ses attentes. Y a des raisons à tout. Les suicides, les dépressions mentales, les immolations, les harraga, …ont leurs explications. Le pays en payera le prix, tôt ou tard. Cela fera toujours partie de notre mauvaise conscience. La page noire de notre histoire.

Des projets de publication ?

J’aimerais publier un livre où figureront mes dessins, trouver un bon quotidien, exposer un peu partout dans le monde et faire rire les damnés de la terre.

Je vous laisse conclure…

Je rêve de liberté de démocratie, de justice, de progrès, de modernité de paix pour l’humanité toute entière. Que mon rêve devienne réalité. Amen.

Propos recueillis par

Nabila Guemghar

- PUBLICITÉ -