Foisonnement de livres en Kabylie

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Assurément, l’année 2015 et ce premier trimestre 2016 sont à marquer en lettres d’or pour la littérature kabyle tant la production à connu un essor quantitatif jamais égalé auparavant. Des dizaines de romans, de nouvelles et de recueils de poésie ont vu le jour, pour le plus grand bonheur des mélomanes des lettres et de la lecture.

De plus en plus audacieuses, les maisons d’éditions osent, enfin, investir dans cette littérature que d’aucuns croyaient impossible dans les années 70/80 du siècle dernier. En effet, si la poésie kabyle, encore confinée dans l’oralité en ces années d’éveils sur la culture berbère, connaissait déjà une mutation qualitative grâce aux maîtres incontestés du genre, comme Ben Mohamed, Mohya, Lounis Ait Menguellet, Matoub Lounes, Ferhat Mhenni, ce fut par contre tout timidement que les premiers romans dans la langue kabyle ont vu le jour (édités à compte d’auteurs). Les premiers récits romanesques en langue kabyle furent signés par Rachid Aliche «Asfel», Said Said «Askuti», Amar Mezdad «Id akked wass». Ces romans sont venus en prolongement des premiers essais entrepris auparavant par Belaid Ait Ali et Said Boulifa. Le tabou fut cassé ! Désormais, ce qui était considéré comme utopique est devenu réalité. On découvrait avec bonheur que la langue kabyle peut investir en dehors du conte et de la poésie pour flirter avec le genre romanesque, les nouvelles et même plus tard avec des pamphlets, les textes journalistiques et scientifiques. Suivant l’adage qui dit : «c’est en forgeant qu’on devient forgerons» ou bien «l’appétit vient en mangeant», beaucoup de jeunes auteurs Kabyles vont investir dans ce créneau à partir des années 90, même si à cette époque, leurs écrits ne trouvaient pas le chemin vers l’édition. Le petit changement viendra avec les éditions du HCA qui publieront pour pas mal d’auteurs même si, hélas, ces livres, ne sont, malheureusement, pas commercialisés en librairie, ce qui démunie de leur impact psychologique sur ce genre littéraire nouveau, et contribue un peu à faire connaître ces auteurs et leurs œuvres au grand public. Néanmoins, grâce à ces éditions, des auteurs comme Abdelah Hamane, Slimane Zamouche, Slimane Bleharet, Abdelah Arkoub, Said Iamrache, Remdane Ouslimani, Said Chemakh, Hadjira Oulbachir, Nadia Benmouhoub, Akli Outamazirt, Mohand Ouali kezzar et tant d’autres, ont pu voir leurs travaux édités. Le mérite des éditions du HCA est de confirmer la tendance : la littérature moderne kabyle est bien lancée et pour de bon puisque le point de non retour fut désormais atteint. L’engouement est tel que bien des auteurs choisiront d’autres voies (que celle des éditions du HCA) pour faire valoir leurs récits, à l’image de Tahar Ould Amar qui publiera son fameux roman «Bururu» chez les éditions «azur» de Béjaïa. Dans la foulée, les éditions «Tira» et celles de «Remadane Achab» ouvriront leurs portes à beaucoup d’auteurs, comme Boubekeur Drissi, Djamel Arezki, Rachid Oulebsir, Djamel Igi, Dihya Lwiz, Brahim Tazaghert, Salem Zenia (aux éditions Tira), mais aussi à Mourad Irnaten, Akli Kebaili, Ali Akkache, Ahsene Taleb (aux éditions Ramdane Achab). Ce qui fait dire à beaucoup d’observateurs du monde de la culture que la production littéraire kabyle a le vent en poupe. Confirmation de taille puisque, en plus de la création, beaucoup d’auteurs se dirigent de plus en plus vers la traduction d’œuvres universelles vers la langue kabyle. Dans ce registre, on peut souligner la fameuse traduction du «Vieil homme et la mer» d’Hemingway et «l’étranger» d’Albert camus par Mohamed Arab Ait Kaci, «Les quatrains d’Omar Khayyam» traduits par Abdalah Hamane et aussi par A.S. Hamid, «Le prophète» de Khalil Djibrane traduit par Louni Hocine, le fameux roman «Nedjma» de Kateb Yacine traduit par Rabeh Bouchaneb, pour ne citer que ces quelques exemples ! C’est dire que la littérature d’expression kabyle est désormais en plain encrage, puisqu’elle a ses éditeurs, ses auteurs et ses lecteurs. C’est pour cela que d’aucuns voudraient un catalogue complet de cette production et une étude évaluative de ce foisonnement de récits.

A.S. Amazigh

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