La vie tourmentée d’une femme courageuse !

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Invitée à une soirée ramadhanesque organisée par Rose Sifa Blanche et ses amis, à la salle des fêtes Ali Rezzouk, samedi dernier, la chanteuse Taous a bien voulu répondre à nos questions.

La Dépêche de Kabylie : Taous est un pseudo, Quels sont vos vrais nom et prénom ?

Taous : Je m’appelle Harrouche Djamila. Je suis du village Afir, relevant de la commune de Boudjima. Le pseudo Taous, c’est une très longue histoire. Entre 1982 et 83, j’étais enseignante dans une école primaire de mon village. Mon fiancé était allé s’installer en France et moi je suis restée au village. Et dieu sait que ma famille était contre notre relation et n’admettait pas ma passion pour la chanson. Mon producteur Massinissa Abdenour me conseilla de choisir un pseudo et j’ai choisi le prénom Taous.

Parlez-nous de vos premiers pas dans la chanson ?

Le premier à m’avoir écoutée, c’est Ali Ferhati. Il voulait faire un duo et ne trouvait pas la voix qui allait avec la sienne. Nous avons fait un essai avec le titre «Awidh i leqman» et c’est de cette manière que tout a commencé. Nous avons fait le premier album intitulé «El vavour» qui eut du succès.

Il a combien de chansons ?

Huit environ, j’ai chanté l’émigration, la déception, la tristesse de la femme kabyle dont le mari est parti à l’étranger, ma propre expérience. Il y a les titres «A yavehri awiyid southis» ; «A Taous ghouram, ghouri»… Le titre «El Vavour» symbolise l’émigration, la séparation, la déchirure. C’est aussi l’histoire des jeunes qui veulent quitter le pays. Ils prennent « El Vavour » de fortune sans pour autant être sûr d’arrivés à bon port.

Peut-on savoir pourquoi vos parents n’acceptaient pas votre fiancé ?

Je suis une fille de moudjahid. Je suis tombée amoureuse d’un fils de harki sans la savoir. Et il s’est avéré que mon père a été emprisonné à cause de son père qui avait fait beaucoup de mal aux habitants du village. Le mariage n’a pas eu lieu mais nous étions attachés l’un à l’autre.

Parlez-nous de votre parcours artistique ?

J’ai commencé juste quand le terrorisme faisait rage et ça ne m’a bien sûr pas aidée. J’ai même été menacée par des membres lointains de ma famille : ou j’abandonnais la chanson, ou je mourais ! L’un d’eux est venu me menacer, avec un fusil, jusque dans le logement de fonction que j’occupais.

Quelle fut votre réaction ?

Je suis partie à l’ambassade d’Italie pour demander un visa car j’ai des amis là-bas. Un Algérien qui y travaillait a confisqué mes papiers et mon passeport. J’ai décidé de faire une grève de la faim dans les locaux de l’ambassade et poussé les responsables à déclencher une enquête. J’ai pu ainsi récupérer mes papiers. J’ai demandé un visa de dix jours, ce qui m’a été accordé. Je suis partie le 12 novembre 1996, le jour de naissance de mon père. C’était un signe. Arrivée là-bas, la chance continua à me sourire. Une nouvelle loi disait que «Toute personne présente sur le sol Italien avant le 15 Novembre 1996, aura droit un titre de séjour». J’ai donc eu ma carte de séjour et j’ai travaillé comme aide aux personnes âgées. J’ai appris l’italien, puis travaillé comme interprète à la Gendarmerie (Carabinier), durant cinq ans. J’ai aussi travaillé dans une fabrique de chaussures.

Vous êtes toujours en Italie ?

Avec Schengen, j’ai rejoint la France et j’y ai retrouvé mon fiancé. De belles retrouvailles et beaucoup de bonheur.

Le prochain album est pour quand ?

Je travaille dessus actuellement. Il sortira cet été et sera intitulé «Anevdhou». Un mot à deux sens : la saison d’été et «nous commençons». J’y utilise différents styles de musique : le Hawzi, le sentimental…

Vous-êtes vous déjà produite en France ?

Oui. J’ai fait le Palais des congrès, le zénith, l’Olympia, à Montreuil et plusieurs autres villes. La première fois, c’était en 2000. Je chante aussi en Italien. Je ne tarderai pas à rentrer en France pour peaufiner mon travail et je reviendrai en été pour l’album !

Votre conclusion ?

Saha Ftourkoum et d’ores et déjà bonne fête à vous tous. Je vous donne RDV cet été.

Entretien réalisé par M.A.Tadjer

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