«Je lui ai chanté sa chanson préférée le 8 mars»

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Pour Hacène Ahres, c’est devenu un rituel d’entamer ses concerts avec des chansons de Lounès Matoub.

«C’est la grande réussite de Lounès : quand vous chantez ses chansons, elles sont reprises en chœur par le public. ça fait plaisir ! C’est que son message est bien parvenu. On nous l’a arraché trop tôt. C’est, si je peux dire, une exception de la chanson kabyle. El Hassnaoui aussi a donné, Slimane Azem et j’en passe… mais Lounès a fait quelque chose de merveilleux en si peu de temps, on n’a même pas vu comment il a atteint les cimes en juste 20 ans de carrière, à peine ce qu’il faut pour un artiste pour se faire connaitre. Sans doute que la manière avec laquelle il est parti a rajouté à sa légende, mais ça n’enlève en rien à l’immensité de son œuvre qu’il nous a légué». Ainsi parle Hacène Ahrès de Matoub qui l’avait aidé à s’élancer. «Je me souviens quand il m’avait presque imposé de faire sa première partie pendant huit jours de suite à l’Atlas, alors qu’il reprenait à peine à vivre comme tout le monde. Je me rappelle qu’il revenait de loin, et il me demandait ça à moi ! Il fallait le faire. Il n’y avait même pas mon nom sur l’affiche. J’avais les jambes qui tremblaient, mais je me rappelle cette phrase de lui : écoute, je sais qui j’ai ramené avec moi. Alors vas-y, tu vas réussir ! Ce n’était pas évident mais une fois le trac du premier concert passé, on a fini par en faire neuf au lieu de huit tellement ce fut toujours complet !», se rappelle encore Ahrès. Quand il évoque sa dernière rencontre avec Matoub, Hacène remonte à son gala de la même année de la disparition du rebelle qu’il avait animé le 8 mars à l’occasion de la Journée de la femme à la Maison de la culture de Tizi-Ouzou. «J’ai encore les images qui me reviennent à l’esprit : j’étais sur scène et je le voyais faire son entrée dans la salle et descendre les escaliers au milieu de la foule faite que de femmes. La salle allait exploser pour lui des youyous fusaient de partout. Il était seul au milieu d’une salle remplie de plus de huit cents femmes. Il y avait de quoi me déstabiliser, mais c’était un plaisir et un honneur de le voir là. Et j’ai fini par enclencher le spectacle. Lui avait pris place devant. D’ailleurs, c’est une femme qui s’était levée pour lui céder sa place. Et d’un signe de sa main, j’ai compris qu’il voulait que je lui chante sa chanson préférée de mon répertoire et je me suis vite exécuté. Pendant la pause, je devais souffler juste un quart d’heure, mais comme il m’avait rejoint dans les loges, j’ai tellement tardéque des hurlements nous parvenaient de la salle. C’était un artiste d’exception, un homme pluriel, il a subi dans sa chair ce que l’Algérie a subi dans son histoire», conclut Ahrès sur Matoub. Voilà des propos qui expliquent bien pourquoi il continue de chanter les chansons de Lounès à chacun de ses galas.

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