»Sur scène, je suis aux anges ! »

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La Dépêche de Kabylie : Pour commencer, qui est Tinhinan ? Tinhinan : Tinhinan, Tina pour les intimes, est une jeune chanteuse kabyle et lycéenne qui va sur ses dix-neuf printemps. Tout enfant que j’étais, douée d’une superbe oreille musicale, j’apprenais vite des chansons en kabyle et même dans des langues que je ne connaissais pas encore. A l’époque, ma sœur, qui chantait dans une chorale de la Maison de jeunes d’Akbou, m’a proposé d’intégrer sa troupe. Ce que j’ai fait. Quelques années plus tard, ma famille s’est installée à Ighzer Amokrane où j’ai intégré une autre chorale de la Maison de jeunes. Accompagnée de trois musiciens, je me suis produite en solo à l’occasion d’un hommage rendu à Aarav Awzellag. Franchement, je ne m’attendais pas à ce que les choses aillent si vite pour moi !

Ensuite, tu as participé à bon nombre de concours musicaux et tu as été maintes fois décorée… ll En effet, j’ai obtenu plusieurs prix. A titre d’exemple, moi et ma troupe Tina, nous avons obtenu la première place lors d’un concours à Souk El Tenin et qui a vu la participation de 29 Maisons de jeunes ! J’ai décroché également le premier prix de musique moderne lors d’un concours organisé par l’Etoile culturelle d’Akbou à l’occasion du festival de la Soummam dédié à Mohamed Iguerbouchene, etc.

Tu as sans doute plein de beaux souvenirs à partager avec nous, n’est-ce pas ?ll Ma foi ! Ma prestation lors du festival dédié à Iguerbouchene, le mois de juillet 2005 à Bgayet, restera gravée à jamais dans ma mémoire : les ovations du public, les sollicitations des médias, et j’en passe, c’était tellement magique et émouvant que je me sentais incapable de gérer tout cela. C’est mon meilleur souvenir ! Pourtant, au début, j’avais un trac fou !Quelles sont tes influences musicales ?ll J’aime d’abord tout ce qui est chanson kabyle. Je cite la légendaire Nouara et le maestro Chérif Kheddam. A vrai dire, je suis une mélomane boulimique : mes goûts vont de la sublime Yasmina à Mohamed Allaoua en passant par Céline Dion et Hélène Segara.

Quels sont tes projets ?ll Je souhaite vivement produire un album en solo. Toutefois, pour le moment, je suis satisfaite car je fais ce que je veux : je chante. Mon plus grand bonheur, je le ressens sur scène en face du public. C’est ce contact direct qui m’intéresse plus que les studios. Outre la scène, je fais des duos avec d’autres chanteurs. Actuellement, je travaille dans un studio d’enregistrement à Seddouk, en duo avec trois chanteurs. J’essaie également de m’organiser pour ne pas perdre mes études. La chanson, c’est certes ma passion, mais un chanteur doit être aussi cultivé. Je sais que quand on a de la volonté, de l’ambition, on peut tout faire : chanter, étudier, faire du sport,…

Comment vois-tu la chanson kabyle contemporaine ? ll Autrefois, les paroles avaient une place cruciale dans une chanson. De nos jours, c’est plus la musique qui compte. Pour ma part, je suis pour un travail de groupe. Chacun doit intervenir dans son domaine pour faire une belle chanson et pour que la chanson kabyle aille de l’avant. Cela dit, je demeure convaincue que la voix joue le rôle le plus important. Elle met en valeur la chanson.

Un mot pour conclure… ll Il faudrait peut-être déplorer le fait que ce soit encore que quelques femmes qui ont le droit d’être artistes chez nous. Même les hommes n’échappent pas non plus aux tabous anachroniques qui bloquent notre société. A titre d’exemple, il y a un jeune homme qui a sincèrement toutes les qualités d’un grand artiste, mais son père s’est fermement opposé à ce qu’il réalise son rêve de chanteur. C’est bizarroïde : d’une part, ces gens-là considèrent l’homme qui chante comme un efféminé, d’autre part, ils prohibent à la femme de chanter ! A mon sens, la première victime du patriarcat, c’est … l’homme. Quant à moi, je dirais que j’ai de la chance d’avoir un père compréhensif qui m’encourage dans tous mes projets. Mes premiers fans sont les membres de ma famille. Je n’oublie pas de rendre hommage aux pionnières de la chanson kabyle. C’est grâce à elles que nous, les jeunes femmes kabyles d’aujourd’hui, avons le droit de chanter. Enfin, je remercie ma troupe Tina, sans oublier notre journal la Dépêche de Kabylie de m’avoir donné cette occasion de m’exprimer !

Entretien réalisé par Karim Kherbouche

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