Le vocabulaire des animaux (3)

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Des pratiques magiques liées aux oiseaux, on citera l’ornithomancie ou la divination par le vol, le cri et les entrailles des oiseaux, la fameuse t’ira des Kabyles, déjà dénoncée dans l’antiquité par Saint Augustin, proscrite par l’Islam, mais longtemps pratiquée. Quant au serpent, il tenait une place particulière dans les rites de fécondité : associé à la fertilité de la terre, il était tantôt vénéré, tantôt craint et combattu. Les oiseauxLe nom générique de l’oiseau est commun à la plupart des dialectes berbères. Il relève d’une racine GD’D’, et il est réalisé sous différentes formes :-ajd’did’ (touareg, mzab, Ouargla, rifain), agd’id’ (ghadames), ajet’it’ (Nef)acîiî « oiseau » (Siw, Skn), agd’id’ (kabyle, chaoui, Maroc central etc.)Le nom semble dériver d’un verbe signifiant « sauter, voler, s’envoler », attesté en touareg, egged’ et en ghadamsi, ekked’. Les parlers touaregs du Niger possèdent un nom d’agent, emajjad, avec le sens de « volatile, animal volant ». Signalons qu’en kabyle l’oiseau femelle, tagd’it’ a donné son nom à une maladie enfantine la dysenterie. Selon la légende, une oiselle a battu son fils sous le regard amusé des femmes qui ne firent rien pour l’empêcher de le tuer : l’oiseau a alors juré de s’en prendre, à chaque fois que cela lui était possible, aux enfants des humains et de les tuer. Quelques espèces d’oiseaux ont des noms communs.

Hirondelle – tafilellest, tifirellest « hirondelle » (kabyle)- tafelillest « hirondelle » (ghadames, siwa)- teflillist « hirondelle » (nefousi)- taflillist « hirondelle » (mzab)- taslallaft « hirondelle » (Ouargla)- taflilist « hirondelle » (aflillis « animal rapide placé, à l’extérieur de l’attelage dépiquant les céréales ») (Maroc-central)- tiflellust « hirondelle » (chleuh)- tifredjdjest « hirondelle » (rifain)- tifilillest « hirondelle » (chaoui) Aigle, vautour Un mot est commun à quelques dialectes. Il désigne parfois des espèces différentes mais le mot a partout le sème commun « oiseau de proie.- igider, ijider « aigle, vautour, milan, oiseau de proie » (kabyle)- eheder, ejadar « aigle » (touareg)- igider « aigle, vautour » (Maroc-central)- gider, ijidar « vautour, aigle » (chaoui)

Buse, milan, oiseau de proie – tamedda « buse » ameddiw « buse, épervier, oiseau de proie » (kabyle) – tamidda « nom d’un oiseau de proie » (touareg)- timdi « buse » amedda « milan » (Maroc-central)- tamedda « épervier » (rifain)

Corbeau – tagerfa « corbeau, corneille » agerfiw « corbeau, corbeaux (col.) » (kabyle)- udjerf « corbeau » (ghadames)- tejarfi « corbeau » (nefousi)- tjarfi « corbeau » (sokna)- ajerfi « corbeau » tajerfit « corbeau, corneille » (Ouargla)- tjarfit « corbeau » (rifain)- jarfi « corbeau » (chaoui)

Hibou, chouette – tawik « chouette » (touareg)- tiyukt « chouette » (siwa)- tawikt « hibou, chouette » (Maroc-central)- tawukt « hibou, grand duc » (chleuh)Le kabyle emploie des termes propres : awi’ruf, littéralement “savant, qui connaît”, sans doute un euphémisme, l’animal étant porte-malheur, et une onomatopée : bururu..

Les reptilesLe nom du serpent diffère d’une aire à une autre. Un seul mot est commun à quelques dialectes :- figher « serpent, reptile, vers intestinaux » (mzab, Ouargla)- ifigher « serpent, reptile » tifighra « vipère, couleuvre » (Maroc-central)- ifighar « serpent » (rifain)- figher  » serpent » (chaoui)Le kabyle emploie azrem, sans doute de az’rem ‘’boyau’’. Le mot commun, ifighar, est attesté dans la toponymie (ifigha), le même mot semble entrer en composition dans la formation du nom du « crabe » dans ce dialecte, ifiraghqes, composé probable de ifigha et eqqes « piquer ». Le touareg emploie accel pour désigner le serpent en général. Le diminutif, taccelt, désigne la vipère. Le mot se retrouve en mozabite, taccelt, avec le même sens. C’est un autre mot qui désigne, dans les autres dialectes.

La vipère– talefsa, tanefsa « vipère » (kabyle)- talifsa « vipère » (ghadames, Ouargla, mzab)- telifsa « vipère » (nefousa)- talifsa « vipère » alefsa “crapaud » (Maroc central)- talefsa, tarefsa « vipère » (rifain)- talefsa « vipère » (chaoui)

Le mot est peut-être à rattacher à un verbe, elfes, attesté en touareg avec le sens d’ »aplatir, être aplati », par référence à la forme aplatie de la tête du reptile.

Les batraciensUn seul batracien, la grenouille, porte un nom commun :- adjeru « grenouille » (touareg)- a’âedjdjur  » grenouille  » (ghdames)- ajru « grosse grenouille » tajrut « petite grenouille, reinette » (mzab, Ouargla)- agru, ajru « grenouille, crapaud » (Maroc-central)- agru « crapaud » (chleuh)- ajru « grenouille » (rifain, chaoui)Signalons que ce mot est passé dans l’arabe dialectal maghrébin, sous la forme djrana. En kabyle, on emploie un mot provenant d’une onomatopée : amqaqur, par référence au cri de l’animal. Signalons que l’animal est sacré et qu’il est interdit de le mettre à mort. C’est sans doute ce caractère sacré qui a fait que son nom est subsisté chez les populations arabisées.

Les poissons Le vocabulaire des poissons est très varié et chaque région côtière possède son propre vocabulaire. Nous reviendrons plus tard, dans un article spécial, sur ce vocabulaire. Signalé, ici, que le nom générique de l’animal est commun à tous les dialectes, y compris le Sahara.- asûlmay « poisson » tasûlmit « arête de poisson » (touareg)- aslem « poisson » taslemet “petit poisson, p. ext. muscle du bras » (Maroc central)- aslem « poisson » (kabyle, chleuh,)- asrem « poisson » (rifain)

M.A HADDADOU(A suivre)

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