La transgression par le lyrisme

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La narration devient par la force des choses un instrument implacable de transgression. Tous ses romans, depuis La soumission qui fut un best-seller en passant par Le sommeil des mimosas suivi des Sonates des loups et Razzia respirent l’impertinence et le verbe iconoclaste. Dans son dernier-né Haras de femmes, l’auteur poursuit un travail empreint de beaucoup de fantaisie. Il invente un monde qui vogue entre rêve et réalité. Un univers que nous décrit la narratrice attitrée, la jeune Hajer. Un regard d’adolescente dont le corps s’éveille à la sensualité. Elle est témoin de la saga familiale en essayant de la restituer dans son authenticité fantasmagorique. Elle parle de sa mère Balkiss qui est une sorte de réincarnation de la reine de Saba. Une femme dont tous les hommes sont amoureux et qui partage sa couche avec le père et le fils. Le père de Hajer qui accepte cette situation incestueuse pour l’amour de Balkiss érige dans le désert : ’’La cité d’Allah le beau’’, une ville où une nouvelle religion est révélée. Une religion qui vénère le sexe de la femme et la poésie. L’écrivain pose à travers cette allégorie une question fondamentale qui se résumera en ces termes : ’’Pourquoi l’Orient détiendrait il le monopole de la spiritualité ? ’’ Les contrées occidentales avec ce nouveau prophète qui répond au doux nom biblique de Cain infligent aux idées reçues un sévère démenti. Dans cette cité, le pouvoir est détenu par les femmes, exit donc le machisme qui bloque les sociétés traditionnelles.

La cité d’Allah le beau regroupe une humanité attachante qui a des codes fondés sur la liberté et où l’humanité retrouve la plénitude de ses instincts. Un monde onirique où les personnages se prennent au jeu des superstitions. Ils réinventent l’histoire universelle en lui donnant une dimension artistique. Quelques personnages deviennent des légendes vivantes, des héros aux exploits extraordinaires.Un monde qui affranchit la femme de ses servitudes millénaires en lui restituant la liberté de disposer de son corps. Mais ce monde est menacé par la jalousie d’une femme : ’’Balkiss’’.Cette dernière lèvera une armée d’amazones pour aller sauver le cœur de son époux Cain des sortilèges de l’autre Balkiss celle qui règne sur La cité d’Allah le beau. Ce combat entre les deux reines tournera à l’avantage de la première femme, la mère de Hajer.Dans ce roman qui se lit comme un conte baroque, Amin Zaoui confirme que l’art romanesque est toujours dédié au rêve et non le reflet d’une réalité banale.

S. A. S.

Haras de Femmes par Amin Zaoui aux éditions Le serpent à plumes

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