La voix de la Soummam

Partager

Charmant natif de la petite Kabylie, Zerrouki Allaoua, avec une voix de troisième e mélodieuse, avait pu séduire le large public et envahir le milieu artistique par la grande porte dès son début. Né le 05 juillet 1915 à Akrouma, village appartenant à la commune de Sidi Aïch, sise dans la wilaya de Bougie. Son père, imam du village l’initia au Coran dès son jeune âge. A l’instar de tous ses semblables que la misère d’antan avaient enveloppés de peines et de souffrances, Zerrouki Allaoua, lui, aussi, passait son temps à garder le maigre troupeau de la famille. C’est dans ces champs de la vallée de la Soummam que, Zerrouki Allaoua avait commencé à apprendre la musique.Aux côtés des bergers, il découvrait les sens magiques de la flûte, chantait les airs et les textes religieux.Les dures conditions de vie de Tadert, qui se limitaient aux travaux ruraux, n’avaient pas cessé de troubler l’âme de Zerrouki. En effet, son amour pour la chanson le taraudait, le poussait à abandonner son hameau pour faire exploser le don musical, dont il est doté. C’est à Bougie, ville où il avait exercé le métier de coiffeur qu’il avait perfectionné ses connaissances musicales. Sa rencontre avec le feu maître, Sadek Abdjaoui lui avait été fructueuse et assez importante pour sa carrière artistique qui venait de commencer. Ses fréquentes visites au village provoquaient l’ire des ses parents et de ses proches. Zerrouki, qui tenait beaucoup à sa toilette, soignait à l’extrême son élégance, était mal vu aux veux des villageois qui voyaient en lui un être fantaististe.Bien que son début artistique ait commencé en Algérie, Zerrouki n’avait composé ses propres chansons que sur le sol français. En effet, en 1942, alors que la fuite vers l’ailleurs inconnu battait son plein, Zerrouki, l’enfant Chérif, qui avait renié tout travail pénible, était affecté aux mines de Rochebelle, sise dans le département de Gard. Se trouvant dans une situation critique engendrée par les dures conditions de travail auxquelles il n’était pas préparé, Zerrouki abandonnait son travail rapidement pour se consacrer désormais à la musique.Reconnu comme un bon vivant, d’une part et pour ses compétences musicales avérées d’autres parts, il liait sans difficultés des relations amicales avec les ténors de la chanson de l’immigration.Zerrouki Allaoua, comme Cheikh El Hasnaoui, avait éprouvé le grand amour et avait souffert du feu de la séparation nourrissant que les chagrins et lamentations. Dans l’une des ses chansons ou il refusait l’oubli et démontrait son attachement à la femme natale, il disait :Ulac win ar anecgaâ as iruhBexlaf ettir urnarguRekba inek di lbaburDi lebhar ma artmuguSlam siwdh as t i taâzizt Gight dh Aqbu la teruEn réponse aux multiples cris souffrant de la femme natale, Zerrouki Allaoua avait exprimé et avec une extrême sensibilité cette douleur latente mutuelle. Cette angoisse, de cette situation affreuse, il disait qu’elle était partagée et endurée par celui qu’on taxait d’Amjab exilé;Yiwen was lawhi nesbahGreyed lamrawahNeuse fraq ur demssarwaEn 1950, Zerrouki Allaoua, fidèle à ses œuvres rentrait au pays pour épouser cette femme esseulée. Cette moitié désabusée. Avec elle, il traversa le large pour s’installer en France. Dans l’autre rive, elle apprenait de l’existence d’une autre femme, tarumit — la Française qui accompagnait son époux Zerrouki — dans ses sorties et spécialement dans les soirées qu’il donnait à travers le territoire français. Ne pouvant supporter cette bévue, elle avait préféré regagner le village pour un divorce que Zerrouki avait vécu dans le douleur.De cet état, il continuait à extirper ce déchirement par la voie de la chanson, notamment, dans les chansons, Yeles n’tmurt, tarumit…Privé de tranquillité engendrée par cette rupture, Allaoua rentrait de nouveau au village en 1955 pour reprendre sa femme. Toujours maladroit et pour sa récidive, il perdra cette moitié natale définitivement.A signaler que cette femme, qui refusait d’obtempérer aux mœurs étrangères à ses valeurs morales, est tombée au Champ d’honneur en combattant l’occupant français. Ainsi, Zerrouki Allaoua, lui, aussi, s’engageait dans la Fédération de France et animait des galas au profit de la révolution. Son répertoire est constitué de 16 chansons en Arabe et en Kabyle. A taskurt, A lbhar bu lahwachi, Yougi ad yuyal… et la célèbre chanson Yemma yemma zehriw i mut.Assez connu du grand public, Zerrouki Allaoua a rendu l’âme le 17 novembre 1968 en France, il est enterré au cimetière du père Lachaise.

Ali Khalfa

Partager