Thismine N Thak’niouine (La jalousie des co-épouses)

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(2e partie)

Yamna, qui ne se doutait de rien, appela à son chevet « ses amies ». ces dernières saisissent l’occasion pour lui jouer un sale tour, dont elle se souviendra toute sa vie.Comme le hasard fait souvent bien les choses, un mendiant en guenilles se présenta au palais pour demander la charité. En cours de route il avait ramassé et mis dans la capuche de son burnous, un jeune corbeau blessé tombé du nid. C’est l’occasion rêvée pour les deux co-épouses de substituer l’enfant par le corbeau (thag’arfa). Elles profitent d’un moment d’inattention de Yamna et procèdent à la substitution.Le mendiant repart du palais avec le bébé et une bourse pleine d’argent. Soudain, on entend résonner les tambours qui annoncent l’arrivée du roi. l’ag’ellid’, averti de la naissance de son enfant a hâte de le voir. Quand il rentre dans ses quartiers, il se précipite dans la chambre de Yamna qui l’attend pour lui montrer le bébé. Les c-épouses le suivent pas à pas. il court vers le berceau pour contempler son enfant aux chevaux d’or, mais une surprise de taille l’attend dès qu’il enlève le drap qui couvre l’enfant. Le corbeau, qui était dedans croasse et se dépêche de s’envoler et de prendre la fuite par une fenêtre ouverte. l’ag’ellid’ est horrifié. On lui a dit qu’il avait eu un enfant aux cheveux de feu, et voilà que dans, le berceau il y avait un affreux corbeau. il est humilié, il est enrayé. Et comme pour enfoncer le clou les deux co-épouses jalouses lui disent en chœur.- Thamet’t’outh agi thesk’idivAy argaz entagh ay ag’ellid’Aqchich vou thounza b-ouraghD’i lâmar nez’rath g’arantaghAyen i nez’ra tsag’arfaTsaset’af am thine id’ek’ enouala(Cette femme t’a menti, ô roi de ce pays. Le bébé aux cheveux d’or est une vue de l’esprit par contre ce qui est concret c’est le corbeau qui s’est envolé. C’est lui qu’elle a enfanté !)L’ag’ellid’ est fou de rage. Avec fureur, il appelle ses gardes et leur ordonne de mettre aux fers sur le champ, cette femme qui lui a menti à propos de son bébé, en attendant de statuer sur son sort, qui ne sera qu’une sentence de mort.Yamna tente d’expliquer au roi, qu’elle est victime d’un complot ourdi par les deux co-épouses, mais elle ne trouve pas le moindre écho chez lui. L’ag’ellid’ en furie, refuse de l’écouter. C’est sans ménagement qu’elle fut mise au cachot. Voulant faire éclater la vérité, elle demande à ses geôliers de rapporter ses dires à l’ag’ellid’, mais c’était peine perdue. Personne ne pouvait intercéder en sa faveur. Contentes de leur exploit, les deux co-épouses ne se gênent pas pour aller la voir souvent, et la saupoudrer de cendre et d’eau croupie sur ses cheveux, et se moquer d’elle en utilisant des termes injurieux.Les années passent sans que le roi ne daigne l’écouter ou la voir ne serait-ce qu’un instant par compassion.ce n’est qu’à la quinzième année de sa disparition que le jeune prince échangé contre un corbeau par les deux co-épouses fait parler de lui. Le mendiant qui l’avait pris avait fait de lui son « fils » et lui avait appris la mendicité pour pouvoir manger et s’habiller.Un jour, alors que le jeune garçon s’amusait avec des garnements de son âge, à « thiqar » (sorte de pugilat) et qu’il sort vainqueur de l’épreuve, son adversaire plus virulent que les autres lui lance avec mépris :- Barka azoukhou barkaA ouin vedlen s-ethg’arfa !(Cesse de te vanter, ça suffit toi qu’un a échangé contre un corbeau !)le garçon est ahuri, pour lui c’est la pire des humiliations. Cette révélation lui fait l’effet d’un couperet. Il rentre à la maison pour en parler à ses « parents ». il ne trouve que sa « mère » en train de préparer le repas.Il lui fait part de ce qu’on lui a dit. Sa « mère » lui répond que ce sont des racontars qu’on colporte à son sujet, mais ce n’était pas la vérité. Le jeune garçon décèle dans la voix de sa « mère » une gêne qu’il interprète comme un gros mensonge. Elle lui cache quelque chose mais quoi !La femme du mendiant qui savait tout à propos de l’enfant dès le début, ne voulait pas qu’il sache la vérité sur ses origines, car il les quitterait aussitôt et s’il les quitte, qui va subvenir à leurs besoins quand ils seront devenus vieux ?Le jeune garçon ne quitte pas sa « mère » des yeux. Elle n’ose pas le regarder comme à l’accoutumée. pressé de savoir la vérité, il eut une idée :- « Mère » j’ai faim donne-moi à manger !Ce jour-là elle avait préparé un couscous bien saucé. Comme il faisait un peu froid, il lui demande de la sauce brûlante pour lui réchauffer « iz’erman is » (ses boyaux). Elle s’exécute, pourvu qu’il cesse de lui poser les questions qui fâchait.Dès qu’elle commence à lui servir, il lui plonge une main dans la sauce brûlante et lui demande de lui dire la vérité. Sous l’effet de la brûlure lancinante, elle le supplie de libérer sa main et qu’elle allait tout lui avouer. C’est ainsi que le jeune adolescent apprend l’incroyable vérité. Il était effectivement fils du roi, mais il a toujours vécu dans la masure d’un mendiant. Il en veut à ses « parents » pour lui avoir caché la vérité durant de très nombreuses années. Ils n’ont pensé qu’à leurs intérêts en oubliant ses intérêts à lui. Il fustige leur égoïsme éhonté, et quitte ceux qui l’ont élevé sans regrets. Pressé de reprendre son identité, il n’attend pas l’arrivée du mendiant qui était en tournée pour lui reprocher d’avoir mal agis. Quand il arrive au palais il cherche du regard la demeure du roi, et demande à le voir sur le champ. On le chasse et on se moque de lui. Pour entrer dans les appartements du monarque il lui faut ruse. Il surveille les gardes et étudia leurs comportements. Son choix se fixe sur un gros qui a tendance à sommeiller. Il s’approche de lui, ouvre prestement la porte et s’engouffre à l’intérieur. La porte claque et réveille le garde qui le voit entrer il le poursuit en criant :- H’ausetseth, h’ausetsethIk’chem bla tesrih’ (Arrêtez-le, il est entré sans autorisation !).

Benrejdal Lounes (A suivre)

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