Cours d’Histoire du Pr Dahmani

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Le professeur M. Mohamed Dahmani, enseignant à l’université Mouloud Mammeri de Tizi-Ouzou, a animé, avant-hier, une conférence sous le thème «Création du centre de colonisation de Draâ El-Mizan», à la salle de réunions de la mairie, devant une assistance nombreuse, à l’occasion de la célébration de la Journée nationale de la commune.

D’emblée, le conférencier parlera de Vincent Boutin, envoyé par Napoléon premier, qui fit une étude en Algérie sous l’empire Ottoman en 1808. Le but était de préparer la colonisation du pays, négociée entre le Dey Hussein et De Bourmant, ce qui advint le 14 juin 1830 avec 30 000 soldats sans aucune résistance. «28 000 Kabyles avaient été envoyés pour faire face. Malheureusement, Hussein Dey ne fit rien pour mettre à leur disposition la logistique nécessaire pour repousser ces envahisseurs.

Et le 5 juillet 1830, les Français débarquèrent à Sidi Fredj avec la reddition du Dey D’Alger qui prit la fuite vers Génova en Italie avec dans son escarcelle un trésor équivalant à un milliard d’euros actuels», expliquera-t-il. L’orateur évoquera aussi les Bordjs turcs de Tizi-Ouzou, de Dellys, de Sidi Naâmane, de Boghni et de Draâ El-Mizan au début du dix septième siècle, qui n’ont néanmoins construit aucun mètre de route ni aucun autre édifice.

«Les Turcs n’ont rien fait. Ils se chargeaient seulement d’exploiter les habitants du pays en leur extorquant leurs biens et les impôts qu’ils envoyaient dans leur pays», dira le conférencier. M. Dahmani évoquera ensuite l’histoire du sinistre Alexandre Beauprêtre, un bandit, qui gravit des échelons dans la hiérarchie militaire française et qui fit un passage à Draâ El-Mizan en 1857.

Il causera des massacres dans la région, avant d’être dépêché à Ain Sefra pour mater l’insurrection des Ouled Sidi Cheikh. «Il y laissa la vie», précisera l’invité d’Amgud. Il faut aussi savoir que l’information et le renseignement ont joué un rôle primordial dans la colonisation des terres. Pour ce faire, indiquera ce professeur, ce fut le capitaine Emile Carrette qui se chargea de faire une étude scientifique très poussée de la société «indigène» avec des ethnologues, des géomètres et des sociologues, entre 1840 et 1842.

D’ailleurs, soulignera-t-il, cette étude servira à l’état major d’Alger pour planifier l’occupation des Bordjs laissés par les Turcs à Boghni et à Draâ El-Mizan en 1847. «Ce furent de petits campements militaires», dira-t-il encore. En 1852, ce furent les premiers assauts sous le commandement du général Bugeaud.

«Pour l’occupation de la Kabylie, il fallait plusieurs facteurs pour établir les centres de colonisation et de peuplement. Ils ont inventorié au total une dizaine de critères essentiels et primordiaux. On citera tout d’abord le caractère géographique pour surtout s’occuper de la «Kabylie utile» afin d’avoir des facilités pour ouvrir les routes dans ce couloir dit de Draâ El-Mizan, la sécurité, la centralité pas plus de six kilomètres entre un village et un autre), la fertilité des terres, le bois, l’eau, l’activité commerciale et bien sûr la propriété des biens», détaillera le conférencier.

M. Dahmani estimera que Draâ El-Mizan réunissait tous ces critères. «Puisqu’il y avait déjà un Bordj turc, les Français installèrent alors le camp militaire en 1852 à Draâ El-Mizan», dira-t-il. En 1858, ce fut la création officielle du centre de colonisation de Draâ El-Mizan qui deviendra arrondissement en 1888. «Déjà, selon les rapports existants, en 1855, ce centre comptait 150 Français et 82 foyers (on disait à l’époque feux). 684 hectares de bonne terre étaient exploités.

Ce qui n’était pas rien pour un début», précisera le conférencier. Après la défaite de Napoléon III en 1871 et son emprisonnement, les zouaves détruisirent le centre de Draâ El-Mizan en 1871. Ce ne fut qu’après 1873 que la politique de la colonisation fut reprise», détaillera-t-il.

Ensuite, il développera la manière avec laquelle fut créé l’archipel de villages coloniaux rattachés au centre de colonisation de Draâ El-Mizan repris en 1873. « En 1872, ce fut Beauprêtre (l’actuel Boufhima), un village agricole, de même pour Tizi-Gheniff en 1875 ainsi qu’Aomar. En 1876, ce fut le tour de Boghni, de Pirette (Ain Zaouia) et de Tizi N’Tletta», dira-t-il encore.

Et en 1888, l’arrondissement de Draâ El-Mizan est né avec le rattachement de tous ces villages situés dans ce couloir. «L’injustice suscite toujours des insurrections et des soulèvements. C’est pourquoi depuis la colonisation en 1830, il y eut de nombreuses batailles dans l’Algérie entière jusqu’au déclenchement de la guerre de libération nationale en novembre 1954 pour reconquérir le pays spolié durant des siècles aussi bien par les Turcs que par les Français», conclura le conférencier. Un riche débat a été ouvert où de nombreuses informations ont été encore données par le professeur aux intervenants.

Amar Ouramdane

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