Le marché de l’emploi et les contraintes de la formation qualifiante : Intégration problématique au monde du travail

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Il s’agit de créer un cadre institutionnel et pédagogique idoine pour former les agents, les techniciens et les cadres dont les profils sont sensés répondre aux besoin du secteur économique. L’on sait maintenant que ce dernier est soumis à rude épreuve par les impératifs de productivité d’efficacité technique et d’innovation ainsi que par la mondialisation des échanges de plus en plus offensive. Pour réussir un tel pari, les réformes de l’enseignement ne pourront plus se limiter aux établissements gérés par le ministère de l’Éducation (école primaire, collège et lycée), mais devraient englober- par une vision stratégique d’articulation et de juxtaposition des synergies-les différents secteurs qui concourent à cet objectif et l’ensemble des segments de la formation, qu’ils soient pilotés par l’éducation nationale, l’université les instituts relevant des autres départements ministériels ou par la formation professionnelle.

Si, dans l’étape économie nationale, la formation professionnelle n’a pas bénéficié des avancées et performances telles qu’elles sont vécues dans les pays industrialisés et même dans certains pays émergents, la faute ne revient ni aux candidats à l’apprentissage ni aux moyens financiers, colossaux, mobilisés pour ce secteur par les différents plans de développement consentis par l’État.

L’ancien système économique, basé exclusivement sur la rente pétrolière a, comme dans l’enseignement général, nivelé par le bas la connaissance et le savoir. Résultat : la critique et les griefs ne viennent pas seulement des utilisateurs de la ressource humaine au sein de la sphère économique, du monde de la presse la presse ou des différents acteurs de la société ; ils sortent de la bouche du ministre même de tutelle, M.El Hadi Khaldi, qui, au cours d’une visite de terrain à Ouargla en mars 2007, lança ce constat qui a valeur d’imparable verdict : « Ce secteur offre à la société un produit périmé qui ne trouve pas d’acquéreur sur le marché du travail ».

Peut-on avoir meilleure sentence que cette formule ramassée et lapidaire par laquelle le ministre a voulu attirer l’attention des différents acteurs sur la décrépitude d’un secteur dont la jeunesse et toute la société attendent beaucoup de choses pour insérer, dès l’adolescence, les jeunes dans le monde du travail et de la production et leur faire éviter, du même coup, les déviations et les maux sociaux qui les guettent à chaque coin de rue.

Il s’ensuit que l’une des questions les plus embarrassantes qui s’imposent dans ce cas de figure est celle de savoir comment gérer cette évidente et amère contradiction, à savoir une offre en jeune apprentis en croissance exponentielle le caractère ‘’périmé’’ de la formation reçue ?

Le constat est établi par plusieurs acteurs de la vie économique de notre pays : le produit qui sort de la formation professionnelle offre une image peu adaptée aux exigences de l’économie algérienne moderne.

Cette dernière, même si elle est en voie de formation, commence déjà à montrer son impatience de bénéficier des ressources humaines les plus aguerries. Ses structures (entreprises privées ou publiques, ateliers, usines, chantiers de construction) réclament des ouvriers spécialisés, des conducteurs de travaux, des charpentiers, des chauffagistes,…que le secteur de la Formation professionnelle n’a pas su mettre à leur disposition, du moins en qualité et en nombre suffisants.

Assurer les voies de l’insertion

Dans le domaine de la formation professionnelle, le challenge auquel devraient faire face les différentes instances chargées d’un secteur aussi stratégique de l’économie nationale est celui d’assurer une réelle adéquation entre les besoins précis des diverses activités de l’économie et le système même de la formation.

Il s’agit de créer un cadre institutionnel et pédagogique idoine pour former les agents, les techniciens et les cadres dont les profils sont sensés répondre aux besoin du secteur économique.

L’on sait maintenant que ce dernier est soumis à rude épreuve par les impératifs de productivité d’efficacité technique et d’innovation ainsi que par la mondialisation des échanges de plus en plus offensive.

Pour réussir un tel pari, les réformes de l’enseignement ne pourront plus se limiter aux établissements gérés par le ministère de l’Éducation (école primaire, collège et lycée), mais devraient englober- par une vision stratégique d’articulation et de juxtaposition des synergies-les différents secteurs qui concourent à cet objectif et l’ensemble des segments de la formation, qu’ils soient pilotés par l’éducation nationale, l’université les instituts relevant des autres départements ministériels ou par la formation professionnelle.

C’est dans le cadre de cette politique de complémentarité et d’intégration que l’enseignement technique a fait l’objet en 2006 d’un repositionnement le faisant passer de l’éducation nationale vers le secteur de la formation professionnelle.

Les efforts des pouvoirs publics ont hissé la formation professionnelle en un secteur stratégique de premier plan.

Les capacités d’accueil des différents centres de formation du pays sont en croissance continue du fait de nouvelles infrastructures réalisées au cours des derniers plans quinquennaux.

Néanmoins, il demeure évident que l’offre, particulièrement dans un domaine aussi sensible et aussi délicat que la formation, ne saurait se réduire à la seule infrastructure, à la bourse ou au pensionnat. L’offre, c’est aussi et surtout le niveau de formation, son degré d’insertion dans le monde du travail et les moyens pédagogiques et didactiques mobilisés pour ce grand dessein.

Ainsi, des ateliers d’apprentissage électronique ou informatiques dépourvus de matériel adéquat devraient faire partie du passé. Car, il est arrivé que l’administration publique emploie des agents de saisie et des informaticiens qui découvrent pour la première fois la forme de l’écran d’ordinateur.

Sur le plan de l’insertion dans la vie active, une instruction du président de la République, adressée à plusieurs instances administratives et économiques ainsi qu’au Commissariat au plan et à la prospective en 2008, insiste sur la nécessité d’ » identifier de manière continue les besoins en main-d’œuvre qualifiée pour chacun des domaines d’activité « . Dans le même souci d’assurer et de renforcer l’insertion des jeunes diplômés de la formation professionnelle dans le monde du travail, le président a ordonné au gouvernement de  » veiller à ce que les diplômés de la formation et de l’enseignement professionnels soient également parmi les candidats prioritaires au bénéfice des encouragements publics à la création d’emplois, que ce soit par la voie du micro-crédit ou des aides apportées à l’agriculture et à l’artisanat ».

Il y a lieu de noter le souci de la  » nécessité de développer le secteur de la formation dans le but de couvrir les besoins actuels et futurs de l’Algérie en matière de main-d’œuvre qualifiée « .

Jusqu’en 2009, le nombre de formations manuelles offertes a été haussé à 80. Le président a aussi eu à aborder le sujet de la formation continue des travailleurs, parent pauvre de la formation en Algérie. Car, la spécificité du chômage en Algérie, comme ont eu à le souligner des études économiques, est qu’il est principalement généré par un énorme déficit de qualification.

Ce phénomène a été particulièrement mis à nu depuis l’ouverture de notre économie sur le marché et l’initiative privée. Des entreprises passent des mois, parfois des années, à chercher des détenteurs de métiers d’exécution.

Même si elles arrivent à les dénicher, l’emploi n’est garanti que sous certaines conditions de compétence qu’il s’agit d’examiner in situ.

Si le test n’est pas concluant, c’est la voie ouverte pour le chômage. Là se pose avec acuité le problème de la qualité de l’enseignement reçu dans les centres de formation, sachant que des dizaines de centres sont parfois démunis du minimum d’équipement ou outillage didactique nécessaire à une solide formation.

Élément de lutte contre le chômage

Le monde du travail a connu une évolution fulgurante au cours des dix dernières années. La mise en œuvre des plans de développement publics, tout en absorbant temporairement une partie du chômage, a révélé du même coup les insuffisances de la gestion des ressources humaines aussi bien au sein des entreprises publiques que des nouvelles entités privées. Ces insuffisances sont identifiées aussi bien dans le volet formation et formation continue que dans le volet de l’organisation interne et du management. La mise à niveau va mettre du temps pour s’opérer d’autant plus que des incohérences continuent à obérer de leur poids la gestion générale de la ressource humaine.

La réduction du taux de chômage à 10,2 %- tel qu’il est donné officiellement par l’Office national des statistiques pour l’année 2010- n’est pas due exclusivement à une création d’emplois stables et permanents. Une grande partie de la régression du chômage est due à des chantiers temporaires ouverts dans le cadre des investissements publics. D’autres formes de solutions sont venues des montages de micro-crédits soutenus par l’État.

Avec une telle démarché la création de l’emploi dans notre pays a connu un premier bond avec la mise en œuvre du PSRE (Plan de soutien à la relance économique) à la fin de l’année 1999. Alors que le taux de chômage était à la fin du siècle dernier de 30 % de la population active, il a pu redescendre jusqu’à 15 % au moment où le PCSC (Plan complémentaire de soutien à la croissance) a été conçu, c’est-à-dire en 2005.

Contrairement aux chiffres officiels donnés par l’ONS, certains analystes font monter le taux de chômage, en excluant les dispositifs sociaux d’emploi, jusqu’à 30 % de la population active.

Donc, sur le plan de la stricte logique économique, il importe de prendre ces chiffres avec des pincettes.

En tous cas, d’autres indices de mal-vie et de chômage sont connus dans notre pays en dehors des seuls chiffres de l’emploi.

La violence sociale, la ‘’harga’’, le suicide,…ne sont pas tout à fait étrangers au phénomène du chômage et du désœuvrement même si d’autres éléments de la crise sociale et culturelle viennent s’y greffer. L’importance stratégique de la formation, sous toutes ses facettes, n’est plus à démontrer dans la lutte contre le chômage. Car, contrairement aux économies des pays industrialisés où la raison principale du chômage est la saturation des créneaux d’activité- la solution étant alors à rechercher dans les secteurs de l’innovation-, le phénomène du chômage en Algérie est en grande partie lié à la discordance entre la croissance démographique et la croissance économique, d’une part, et à un déficit flagrant de formation qualifiante d’autre part.

Amar Naït Messaoud

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