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Elections législatives : Les algériens sont appellés à élire leurs députés aujourd’hui : La voie des urnes

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Les Algériens sont appelés aujourd’hui à participer à la redéfinition de leur destin politique par, ce que la modernité politique a établi dans les pays occidentaux depuis le 19eme siècle, comme le moyen le moins discutable de consacrer un contrat social entre gouvernants et gouvernés; contrat social par lequel sont censés être sauvegardés les intérêts des uns et des autres par un jeu de compromis tel qu’il est exigé par la nécessité de la vie en société.

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Ce rappel théorique ne signifie pas que les Algériens n’aient pas connaissance des procédures de vote. Au contraire, des scrutins, ils en ont connus de toutes sortes, à profusion, y compris sous le règne du parti unique. Cependant, à l’exemple de presque tous les pays anciennement colonisés, notre pays à calqué voire même, parodié des schémas formels en usage dans les démocraties avancées pour les mouler sur des structures sociales archaïques, procédé qui travaille au profit de ses initiateurs en permettant la floraison du pouvoir absolu et de la tyrannie. Les populations algériennes ont donc connu des élections truquées, des référendums  »brejnéviens » (99% de oui) et des consultations biaisées depuis l’ère coloniale (souvenons-nous de Neagelen) jusqu’aux élections de 2007, en passant par celles vécues sous le terrorisme. S’agissant du scrutin législatif, auquel sont conviées les populations algériennes aujourd’hui, il a été sans doute le processus le plus discuté le plus commenté et le plus prometteur dans sa phase d’annonce, du fait qu’il est initié dans un contexte particulier du pays et de la région géoculturelle à laquelle il appartient. Un contexte fait de revendications démocratiques appelant à un renouveau politique et social. L’éclosion d’un tel climat, sous de vieilles dictatures, ne pouvait décidément pas se passer dans une atmosphère de sérénité et de compréhension. Trop d’intérêts étaient en jeu pour que les dirigeants autocrates et les lobbies qui les tenaient en otages pussent lâcher du lest d’une manière  »civilisée ». La suite, on la connaît. De saines revendications ont été parfois, non seulement, soumises à payer un lourd tribut de sang, mais plus gravement encore, à être déviées de leur trajectoire par les forces les plus rétrogrades de la société en connivence avec les  »reliques » des régimes déchus. Ne préjugeons rien du parcours et des perspectives qui attendent, dans un proche avenir, ces transformations politiques, même si des doutes et de lourdes interrogations en obèrent la marche. La mobilisation pour le scrutin législatif d’aujourd’hui compte, certainement, une part de méfiance vis-à-vis de l’expérience de certains pays arabes, constituant des exemples à ne pas suivre. L’Algérie ayant souffert d’une guerre de Libération qui n’a eu son équivalent qu’au Vietnam, a également souffert des errements d’une gestion qui a conduit le peuple au désenchantement et à la désillusion après les promesses de l’Indépendance. Ce sont toutes ses frustrations et toutes ces injustices, nourries pendant trois décennies par un pouvoir qui a exclu les populations de l’exercice politique et des bienfaits des ressources du pays, qui ont produit le monstre de l’islamisme. Ce dernier, après avoir tenté pendant une quinzaine d’années, par le feu et le sabre, de mettre à genoux le pays, fait tout, aujourd’hui, pour profiter de la légalité permise par les élections. Le vote d’aujourd’hui revêt donc un aspect particulier lorsqu’on considère les ambitions démesurées du camp islamiste qui a réussi à faire fédérer, dans des listes uniques, trois partis de sa mouvance. Pire, un des ténors de ce conglomérat jure de ne pas accepter un score où l’Alliance verte ne serait pas classée première! Un autre islamiste, Abdallah Bjaballah, traite le courant laïc d’ »occidentalisé » et de « nain »!

Donc, outre l’enjeu du taux de participation qui paraît capital pour le pouvoir politique dans son entreprise de crédibiliser le processus électoral face à un cafouillage régional qui tarde à donner des signes de détente, la donne islamiste pèse d’un poids considérable dans le processus en cours. Sachant que le camp islamiste connaît rarement l’abstention, cette dernière, si par malheur elle s’avérait importante, ne pénaliserait que les camps des démocrates et des républicains.

Une chose est sûre: dans un pays de 37 millions d’habitants, ayant vécu une histoire tumultueuse, qui a vu se succéder, colonialisme, dictature du parti unique, multipartisme débridé greffé sur des structures sociales archaïques, terrorisme islamiste, et durant laquelle les rudiments de la gestion économique sont déviés et oblitérés par la rente pétrolière et par le lobby de l’informel, la complexité du jeu politique et des compromis sociaux ne pourra pas se contenter des urnes destinées au renouvellement de l’Assemblée populaire nationale, même si cette opération doit requérir toute l’attention des citoyens et de la société. C’est une phase importante dans un puzzle où sont censées se reconstituer et se réformer les autres institutions qui fondent la République.

Amar Naït Messaoud

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