Les enseignants mobilisés !

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A l’issue d’une assemblée générale, tenue le 15 de ce mois, les enseignants de l’université Mouloud Mammeri ont retenu une grève de deux jours, soit hier et avant-hier. 

Le mouvement a été ponctué par deux sit-in devant le rectorat. Aujourd’hui mercredi, une autre assemblée générale est prévue, afin de faire le bilan des deux jours de protestation et de décider des suites à donner au mouvement. Selon une déclaration rendue publique par les grévistes, rédigée sous la houlette du syndicat autonome CNES, « les pouvoirs publics ont adopté vis-à-vis de l’université une stratégie qui ne s’est pas jamais départie, depuis des décennies, de l’objectif inavoué de lui faire subir, sournoisement, un nivellement par le bas à travers le dévalorisation des contenus des activités pédagogiques et scientifiques, des diplôme et de la formation des formateurs ». Les signataires soulignent par ailleurs : « l’aggravation des contraintes et des problèmes auxquels font face les enseignants, fait partie des conditions de réalisation de ces objectifs inavoués : focaliser la communauté universitaire sur des questions liées au pain quotidien (salaire, logement, condition de travail, hogra) qui ne cessent de se détériorer, pour opérer un détournement comportemental vers l’égoïsme et les rivalités stérilisantes et oublier les ambitions scientifiques des enseignants universitaires que nous sommes, car comme on dit en kabyle : (awtit-af-alim aken ad-yettu timzin) ». Le coordinateur de la section syndicale CNES de l’université Mouloud Mammeri nous déclarera : « Il y a un problème sérieux de non respect de la réglementation au sein de notre université. Il y règne un système de gouvernance clandestin reposant sur une oligarchie bureaucratique et clanique, dilapidatrice et corruptrice, engendrant l’anéantissement de la place du savoir scientifique et celle des valeurs pédagogiques. Certains responsables sont coupables de dépassements sur lesquels plusieurs rapports ont été faits, mais à chaque fois on nous dit que c’est la dernière fois que cela se produit. Quelques jours après, rebelote ! Il faut en finir avec ce syndrome de la dernière fois, une bonne fois pour toutes. Il y a malheureusement un système qui s’est installé à l’université comme dans toutes les institutions algériennes. Des réseaux ou (lobbying) la gangrènent, ne laissant d’autre choix à une large partie de la communauté des enseignants que de se plier au diktat de l’anomie et du langage des muscles et aux contre-valeurs de la fonctionnalisation et du partage de la rente. Cette conclusion a été faite à la suite de ce que nous avons vu sur le terrain… ».  Il ajoutera : « la pédagogie au sein de notre université est gérée à vau-l’eau, aucune règle pédagogique n’est respectée. De plus, les prérogatives qui doivent être souveraines, l’administration se les approprie et à l’enseignant d’exécuter ! Quant aux examens, pour ne citer que ce volet, les enseignants sont sommés d’organiser des examens même si aucune séance de cours n’a été assurée ». Selon un membre du bureau national du CNES, leur syndicat a toujours, et ce depuis une dizaine d’années, déclaré que l’année universitaire fait en réalité 02 ou 03 mois de cours, et c’est anti-pédagogique, surtout avec le système LMD ou les modules ne doivent être validés que si un nombre minimum de séances est assuré à savoir (14 semaines). Il nous confiera, entre autres : « aucune des structures de gestion prévues par le système LMD n’est mise en place ! C’est un système de formation à la carte, l’expertise des parcours de formations laisse à désirer ».  Le coordinateur de la section syndicale a également insisté sur les stages qui devraient être assurés au niveau des entreprises, il en dira : « Il n’existe aucune structure dédiée à cette mission. Le LMD est une décision politique et précipitée en Algérie. Aucun statut n’existe à ce jour pour définir la licence, le master et le doctorat LMD. Le système ne peut d’ailleurs pas marcher avec le flux d’étudiants que nous avons ! ». Il ajoutera que la gestion de l’université sur le plan administratif est chaotique : « le réseau gazier de Bastos est rongé par la corrosion. Le pôle universitaire de Tamda, réceptionné en 2010, risque de s’effondrer, en raison des infiltrations d’eaux, des amphis inondés durant tout l’hiver. La chaudière de ce pôle na jamais fonctionné elle est en panne ! Des routes impraticables, l’insécurité règne en maître suprême dans ce pôle alors qu’un commissariat flambant neuf existe au sein du campus, mais celui-ci n’est pas fonctionnel ! Ajoutez à cela le problème de transports des enseignants qui perdure, les projet LSP : 200 logements ont été inscrits en 2006 et devaient revenir aux enseignants, mais le projet a enregistré un retard monstre dans sa réalisation, l’étude n’a même pas était finalisée !».  Les contestataires rejètent les directives du secrétariat général du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique visant l’alignement du doctorat des sciences sur le doctorat LMD. Ils demandent, compte tenu de leurs équivalences sur le fond, l’alignement du doctorat des sciences sur le doctorat d’Etat. Ils réclament également l’ouverture du dossier de la revalorisation des salaires des enseignants, en particulier des Maîtres-assistants dont le niveau des rétributions est très en deçà de ce que l’on a fait croire, à dessein, à l’opinion publique. Ils exigent du recteur de l’université Mouloud Mammeri une prise de mesures radicales pour l’éradication réelle et effective des pratiques de hogra, de harcèlements à l’égard des enseignants de la part de certains responsables ( chefs de départements, vice doyens, doyens, vice recteurs et chef de services). Ils rejettent totalement le projet de découpage de l’université Mouloud Mammeri par la création d’une nouvelle université multidisciplinaire. Les contestataires menacent de durcir le mouvement en enclenchant une grève illimitée accompagnée d’une rétention des notes, si leurs revendications ne sont pas satisfaites. 

Karima Talis

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