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Mohamed Oukil, maire FFS de Lakhdaria : « J’ai eu droit à 40 commissions d’enquête »

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à seulement 36 ans, il préside l’assemblée populaire communale de la deuxième plus grande commune de la wilaya de Bouira qui compte plus de 73 000 habitants. Lui c’est M. Mohamed Oukil, élu du FFS. Il parle de son bilan, des projets de développement dans sa commune, de son plan d’action, de ses ambitions politiques et donne sa version des faits, après ses récentes condamnations en justice.

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La Dépêche de Kabylie : Vous êtes à la tête de l’APC depuis plus de 4 ans, comment évaluez-vous votre mandat ?

M. Oukil : Je dois dire qu’à notre arrivée, la commune de Lakhdaria, particulièrement le centre-ville, ressemblait à une cité sinistrée et les nouvelles habitations à des cités dortoirs. C’était inacceptable. La majorité des projets, notamment ceux de l’aménagement urbain débloqués par l’Etat, n’avaient pas été concrétisés et les citoyens souffraient d’une dégradation sans précédent de leur cadre de vie. Depuis tout le monde a constaté les changements. Je dirais donc que mon bilan est positif, non seulement pour le nombre non-négligeable de projets qu’on a réalisés, mais aussi pour le rétablissement du contrat moral et de la confiance entre les citoyens et leur assemblée. Mon bureau est toujours ouvert.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?

De la bureaucratie, au manque d’assiettes foncières, en passant par les oppositions et blocages des projets par les citoyens, nous sommes tout le temps confrontés à ce genre de problèmes. Mais je tiens à rendre un vibrant hommage à l’ex-wali de Bouira, M. Nacer Maaskri, qui s’est impliqué avec nous pour débloquer tous les projets. L’un des premiers problèmes auxquels notre équipe a été confrontée, c’était la gestion des ordures ménagères.

En 2012, la commune ne disposait même pas d’une décharge. C’est suite à un long travail de prospection que nous avons réussi à réserver une petite assiette, située à la frontière avec la wilaya de Boumerdès et la transformer en décharge contrôlée. Le projet de réalisation d’un centre d’enfouissement technique (CET), inscrit en 2013 pour 23 milliards de DA, au village Zbarboura, n’a toujours pas été concrétisé. Les citoyens de cette localité refusent catégoriquement son implantation sur leur territoire.

Nous sommes toujours en discussion avec leurs représentants et j’espère qu’ils finiront par changer d’avis, car il n’y a que le CET qui puisse mettre un terme au problème des ordures au niveau de notre commune. Les constructions anarchiques, particulièrement au chef-lieu communal, posent toujours problème. La région a été touchée de plein fouet durant la décennie noire, et la ville de Lakhdaria a accueilli des milliers de familles, obligées de quitter leurs villages et se réfugier au centre-ville à la recherche de sécurité.

Ces dernières ont élu domicile dans des maisons de fortunes, réalisées sans autorisation et sans respect des normes d’urbanisme. Alors, et dans l’objectif de régler ce problème, nous avons entamé,; dès 2012, un vaste chantier, notamment à travers l’application de la loi 15/08, pour la régularisation et la mise en conformité de ces habitations. Certains citoyens ont répondu favorablement à notre appel et ont réglé leurs situations, mais d’autres refusent toujours de se soumettre à la loi, et ça nous pose un sérieux problème. Le manque de foncier, au niveau du chef-lieu communal plus particulièrement, nous affecte également, car beaucoup de projets, d’utilité publique, et d’investissements privés n’aboutissent pas à cause de cela.

Les terrains agricoles, situés en contrebas du chef-lieu et de l’autoroute Est-ouest, étant intouchables, les particuliers nous exigent des sommes faramineuses pour céder leurs terrains. Nous espérons, cependant, l’extension du plan de masse de la nouvelle-ville pour pouvoir réaliser d’autres projets. La dernière contrainte est liée à la nouvelle loi des marchés qui comporte une multitude de démarches administratives et fait retarder le lancement de tous les projets. Avec cette loi, il vous faut au moins 9 avis favorables de différentes administrations ainsi que la délibération de l’assemblée et minimum 6 mois, pour pouvoir lancer le plus simple projet.

Quels sont les principaux projets que vous avez lancés ?

La commune a bénéficié d’au moins 142 projets au cours des 4 dernières années. Ils sont répartis entre programmes financés par les PSD et PCD, sur budget communal et fonds de solidarité des collectivités locales. Parmi les plus importants projets, je citerai l’aménagement des cités Lakouir, Krichiche, la cité 05 juillet et les 140 logements au centre-ville, avec une cagnotte globale de plus de 160 millions de DA. Ces quatre projets ont été réalisés après la rénovation de l’ensemble des réseaux, AEP, gaz, électricité,; assainissement et téléphonie.

Ensuite, nous avons le raccordement de 40 villages de notre commune à l’eau potable via le barrage Koudiat Acerdoun. Pour le gaz de ville, au moins 10 projets sont actuellement en cours de réalisation, je rassure également le reste des villageois pour le gaz de ville, dont les projets de raccordement ont été approuvés. D’ici 2017, les 40 villages que compte notre commune seront alimentés en gaz naturel. Nous avons aussi réalisé cinq nouvelles écoles primaires et inscrit des projets pour la réhabilitation de plus de 100 autres établissements. Pour le logement, nous avons bénéficié de 1 600 unités du type LPL, 3500 aides pour l’habitat rural et 150 du type LPA. Nous comptons aussi réaliser deux marchés couverts au centre-ville, des tribunes pour le stade communal avec plus de 60 millions de DA, ainsi que cinq stades de proximité avec du gazon synthétique.

La zone d’activité communale vient d’être relancée après un gel de plus de 20 ans. Quels sont les projets affectés à cette zone ?

Actuellement, nous avons 18 projets d’investissement en cours de réalisation. Les postes d’emploi que devraient générer ces projets sont estimés à plus de 3 500 entre empois directs et indirects. Nous avons accordé deux projets pour la réalisation d’une usine pharmaceutique, d’une usine de produits détergents et d’une usine de pneumatiques. 30 lots n’ont toujours pas été affectés et nous attendons des investisseurs sérieux avec des projets concrets pour les attribuer. Personnellement, je pense que cette zone pourra, à moyen terme, réduire sensiblement le problème du chômage et doubler les ressources financière de notre commune.

Qu’avez-vous prévu pour le volet tourisme ?

Notre commune compte des sites naturels importants qui peuvent abriter des activités et des investissements touristiques consistants. Malheureusement, ces sites, à l’image des gorges et des chutes de Palestro, jadis exploitées à des fins touristiques, ont été désertés par les touristes durant les années 90 en raison de la dégradation de la situation sécuritaire. Actuellement, et malgré le rétablissement de la sécurité,; le secteur piétine et tarde à se relancer. Le problème de manque d’assiettes foncières pénalise aussi cette relance. Récemment, un investisseur privé nous a présenté une fiche technique pour la réalisation d’un hôtel quatre étoiles, malheureusement, nous n’avons pu dénicher un terrain pour y implanter e projet.

Vous avez été poursuivi deux fois en justice et condamné à une peine de prison avec sursis. Que pouvez-vous nous en dire ?

Je n’ai aucune relation avec ces deux affaires. Je suis innocent, mais au regard de la loi, je suis devant l’obligation d’assumer des fautes administratives que je n’ai pas commises. Pour la première affaire, celle que la presse appelle désormais «affaire HP»,; il s’agit en effet de l’acquisition de micro-ordinateurs que l’APC a commandés pour ses besoins au niveau du service de l’état civil. Cette marque a été recommandée par le ministère de l’Intérieur dans une note que nous avons reçue.

Après avoir entamé les démarches nécessaires, la commission des achats a retenu un fournisseur qui s’est engagé à nous livrer des PC avec les spécificités recommandés. Malheureusement ça n’a pas été le cas, et le fournisseur nous a livré une autre marque. Ayant pris connaissance de ce fait, j’ai refusé de signer la réception et je lui ai demandé de respecter le cahier des charges. Le fournisseur a remplacé le matériel quelques jours après. Après cette histoire, je me suis retrouvé convoqué à la justice, et alors qu’aucune preuve n’a été retenue contre moi, j’ai été condamné à 6 mois de prison avec sursis. Le second procès a trait à la délivrance d’un permis de construire non conforme à la réglementation.

Le juge qui m’a présenté le document en question, n’a retenu là non plus aucune preuve contre moi, car il ne portait pas mon cachet, le numéro 01, mais celui des services techniques de l’APC. Rien n’empêche, j’ai été condamné à une année de prison avec sursis. Il faut que je vous avoue, que ces deux procès m’ont fait beaucoup réfléchir, et c’est totalement légitime, car ces condamnations sont injustifiées. Peut-être parce qu’on a jugé que j’étais trop jeune pour cette responsabilité,; ou parce que je suis du FFS. Je vous assure que beaucoup de cercles politiques locaux n’ont toujours pas digéré que le FFS soit aux commandes à Lakhdaria. La preuve, j’ai reçu la visite d’au moins 40 commissions d’enquête depuis 2012, et à chaque fois, on me présente des lettres anonymes comme motif. Je laisse les citoyens juger !

Toutes ces condamnations, ces enquêtes et ces lettres anonymes, ça ne vous perturbe pas ?

« Ce qui ne me tue pas me rend plus fort » disait Nietzsche, et moi je me reconnais dans cette phrase. Je reste serein, concentré sur mon travail pour maintenir la cadence des projets de développement. Je resterai ce militant, et je serai toujours fidèle à mes engagements et surtout à mes convictions que j’ai puisées d’une famille révolutionnaire de la première heure, et de la personne de Si El-Hocine Ait Ahmed, qui m’a toujours inspiré.

Entretien réalisé par Oussama Khitouche

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