“L’ENIEM a toutes les chances d’aller bien”

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Touchée par une crise financière l’année dernière, l’ENIEM tente de rebondir. Son PDG, M. Boudiaf Ouamar, revient sur la question et aborde d’autres sujets en relation avec l’entreprise.

La Dépêche de Kabylie : pourriez-vous nous faire l’état des lieux à l’ENIEM ?

M. Boudiaf Ouamar : On ne va pas présenter l’ENIEM. Qu’on le veuille ou non, c’est l’histoire de l’électroménager en Algérie. Actuellement nous avons des équipements relativement vieux, donc on essaie de nous replacer sur le marché. Pour les produits froid, on va lancer une nouvelle chaîne, elle est à l’essai. Elle a démarré depuis maintenant une année et demie. On commence la production mais timidement, actuellement nous produisons des produits de clase énergétique A+ (classement Iso). Puis à partir de 2018, tous les produits qui ne sont pas de cette classe qu’on appelle des produits énergivores qui consomment donc beaucoup d’énergie, seront taxés par le gouvernement de taxes très élevées. Donc, l’ENIEM se prémunit pour éviter ce genre de taxation. Dès maintenant, on prépare l’année 2018. On a commencé par les produits froid, il y a un démarrage de production qui n’a pas encore atteint le seuil maximal de production. On compte l’atteindre d’ici un mois ou deux, on travaille avec un bureau d’étude Italien. Quand on lance un nouveau produit, ça prend du temps pour arriver à une production maximale.

Quelle est justement la capacité maximale de production que vous espérerezatteindre d’ici quelques mois ?

On peut atteindre la production de 600 produits par jour.

Vous en êtes où actuellement ?

Maintenant, on produit au maximum 200 produits. Actuellement, nous ne maitrisons pas les techniques de production, et de temps en temps on trouve de petites failles. On essaie d’ajuster et d’améliorer et cela nous prend du temps. On arrivera très bientôt à la production maximale comme j’ai précisé avant.

Donc, cela concerne la nouvelle chaîne de froid, qu’en est-il du reste ?

Concernant les cuisinières, on a lancé deux nouveaux modèles qui ont donné leurs fruits. Nous avons amélioré la chaine d’émaillage. L’ancien est polluant, le nouveau l’est moins, nous faisons tout pour préserver les nappes d’eaux à proximité de l’entreprise pour ne pas les polluer. Pour ce qui est de la climatisation, on est en train de s’adapter pour l’utilisation de gaz propre. Avant on travaillait avec le R22, on est en train de le remplacer par le R410 gaz plus écologique. Pour la climatisation, on aspire à avancer vers la classe énergétique A. actuellement on en est à la B. Côté production, on est en train de se préparer sérieusement pour répondre aux exigences internationales et nationales et la concurrence.

En parlant de production, peut-on avoir votre taux de production journalière ?

Disons qu’on est à une moyenne de 20 à 30 millions de dinars par jour quand on est en production optimale. Ceci dit, la pleine cadence n’est pas en permanence adoptée. Prenons l’exemple des produits froid, avant on faisait 700 produits par jour pour les grands modèles, mais comme leur vente est réduite actuellement (ils ne sont plus demandés sur le marché), nous avons été contraints de ralentir la cadence de production. Nous avons des capacités de production très élevées. Pour la climatisation par exemple, on peut faire 200 appareils avec un effectif très réduit. La capacité de production de la cuisinière peut aller jusqu’ à 400 par jour.

Là il s’agit donc de la capacité, qu’en est-il de la production réelle de l’ENIEM actuellement ?

Actuellement, c’est moins et comme l’équipement est un peu vieux, nous enregistrons des pannes répétées. Il y a des machines qui dépassent les 25 ans, et quand ça tombe en panne, on est forcement en sous activité. L’année passée, on a passé deux mois sans production pour réparer un four.

La baisse de production est juste relative au vieillissement de l’équipement ? N’y a-t-il pas d’autres raisons ?

Il faut savoir que quand on ne produit pas c’est volontaire. La production est liée aux besoins de l’unité commerciale. Quand on nous demande de lever la production quand on est en rupture de stock, on le fait, et quand on sait que le stock est assez important on réduit pour atteindre juste le besoin exprimé.

Le stock de l’ENIEM est estimé à combien ?

Nous produisons sur la base des besoins de la commerciale, on fait l’équilibre entre les deux. Quand nous avons des produits en stock, nous arrêtons la production et on passe à d’autres. Nous commercialisons une quarantaine de produits. On est obligé de suivre le stock de ces produits un par un. C’est cela qui nous dicte réellement le budget que nous faisons sur la base des existants commerciaux et les prévisions de vente. Pour le budget de cette année, on l’a fait en septembre 2016. Pour le définir, on s’est basé sur le stock de fin d’année et les prévisions de production pour l’année en cours. Le plus important est de ne pas perdre la valeur monétaire. Il vaut mieux l’avoir en liquide qu’en stock.

Qu’en est-il de votre quote-part dans le marché ?

Ça varie de 5 à 20%. J’estime qu’on est bien sur ce plan, avec une trentaine de concurrents sur le marché. Avant, dans les années 90, il fallait un rendez-vous pour avoir un produit ENIEM, ce n’est plus le cas. Avant c’était une situation de monopole et maintenant c’est la concurrence. Nous on se réfère à la loi pour tout. On a un cahier de charges, etc. On ne vit pas la situation de la même façon que les privés. Pour l’approvisionnement, on est tenu à des règles très strictes, pour la conclusion d’un marché, la période peut aller jusqu’à une année. C’est des contraintes qu’on doit gérer contrairement aux autres. Pour la distribution aussi, eux, ils vendent parfois sans factures, ils font du crédit. La contrainte est de taille.

Vous avez traversé une période de crise financière due aux indemnités de retraite. Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Nous avons connu un grand problème avec les retraités qui a duré des mois, ils ont cadenassé l’entrée de l’entreprise. Avec la suppression de la retraite anticipée, on a enregistré un nombre important de demandes de départ à la retraite. Entre 2015 et 2016, ils étaient plus de 600. Les indemnités de départs à la retraite pour ce nombre sont très colossales, 750 millions de dinars. On a été dépassé, ce qui nous a incités à saisir toutes les portes pour régler le problème. On a fini par trouver une solution avec la banque. L’entreprise s’est mise d’accord avec les retraités pour échelonner les dettes sur 6 échéances, on terminé en avril, on a respecté nos engagements. Pour ça on utilise les moyens de la banque, des prêts bancaires qu’on fait chaque année. On les rembourse chaque fin d’année. On est en très bons termes avec la BEA, d’ailleurs on leur a loué le sous-sol de l’immeuble pour qu’ils en fassent une agence.

Qu’en est-il de la plainte déposée contre l’ENIEM par les retraités d’avant 2012 ?

L’ENIEM a eu gain de cause. La justice a tranché. Ils sont d’abord passés par l’inspection du travail pour la réconciliation. Cette dernière les a désapprouvés. Nous on est dans les règles. La réglementation pour nous prime sur tous les plans.

Quelle est votre stratégie commerciale pour l’année en cours ?

Déjà on ira vers la production de produits énergétiques A+ pour éviter la taxe qui sera imposés par l’Etat sur les autres produits à partir de 2018. Puis, aller chercher les grands contrats. Avec la Sonatrach par exemple, on a conclu il y a quelques jours un grand marché sur 5 ans. En plus des contrats avec les autres institutions étatiques qui sont de grands clients de l’ENIEM. On est en train d’encourager aussi les œuvres sociales. Je pense que l’année 2017 sera bonne pour l’ENIEM, notamment avec les efforts des pouvoirs publics pour encourager la production nationale et la développer.

Vous avez reçu le nouveau directeur de groupe Elec El Djazair, il y a quelques jours. Y a-t-il une nouvelle feuille de route pour l’entreprise ou des instructions précises ?

C’est le nouveau président du groupe, M. Kinan. En tant que nouveau président du groupe, il est en train de faire la tournée pour s’imprégner du mode de fonctionnement des entreprises du groupe, y compris l’ENIEM. Il a été aussi à Azazga à l’ENEL dans la même journée. La convention avec Sonatrach par exemple c’est lui qui l’avait signée. Il a apprécié ce qu’il a vu en tout cas.

Dernièrement, vous avez déclaré que l’ENIEM est en crise, qu’en est-il aujourd’hui ? Peut-on dire que l’ENIEM est sortie de la crise ?

Pas encore, mais on est sur la bonne voie. Il faut trouver un moyen pour re booster les ventes, je pense qu’avec les nouveaux produits, on réussira. La crise est passagère, elle n’est pas ancrée au sein de l’ENIEM et on a les moyens de s’en sortir et rebondir. L’ENIEM à toutes les chances d’aller bien.

Un dernier mot…

On a perdu de grandes compétences qu’on va tenter de remplacer, que ce soit en interne ou en externe en récupérant de bons éléments. Mon souhait, avant de partir en retraite, est de remettre l’ENIEM sur les rails convenablement pour avoir la conscience tranquille.

Entretien réalisé

par Kamela Haddoum

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