Cap sur l’aquaculture pour plus de poisson !

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La Dépêche de Kabylie : Béjaïa ne produit que quelque 3 000 tonnes de poisson par an…

Nadir Adouane : En effet, selon nos statistiques. Ceci confirme que la production n’a pas évolué. De par le monde, la production des ressources halieutiques diminue d’année en année. En Algérie, elle varie entre 100 000 et 120 000 tonnes par an. Actuellement, la moyenne annuelle de consommation est de 3 kg par habitant. On doit atteindre, à long terme, celle de 6.2 kg préconisée par l’OMS, et celle de 5 kg pour l’an 2025. Pour cela, nous ne pouvons plus compter sur la mer, sauf si on s’inscrit sur la haute mer. Pour arriver à une production de 200 000 tonnes par an en Algérie, il faut développer l’élevage.

Donc, pour vous, l’aquaculture est une nécessité ?

Absolument. Pour le moment, nous maitrisons la conchyliculture, à travers l’élevage des moules et des huitres. D’ici quelques mois, nous allons lancer celui des loups et des daurades, c’est-à-dire la pisciculture. Il y a également la production en eau douce que nous allons développer, en multipliant l’empoissonnement des bassins d’irrigation. Nous avons déjà entamé cette opération et nous sommes à 35 bassins d’empoissonnés. En tout, il existe dans le territoire de la wilaya 131 bassins appartenant aux agriculteurs et 35 appartenant aux services des forêts, réalisés dans le cadre du renouveau rural. Je dois dire que c’est une première à l’échelle nationale. Elle a été lancée lors de la dernière visite du ministre de l’Agriculture, du développement rural et de la pêche. Ainsi, nous nous lançons dans l’aquaculture qui augmentera la production de notre wilaya, pouvant aller jusqu’au triple de la production actuelle, si nous parvenons à réaliser tous les projets. Nous prévoyons de concrétiser quatre projets d’aquaculture d’ici le mois de juin qui produiront, annuellement, une moyenne de 600 tonnes chacun. En d’autres termes, ils contribueront à l’augmentation de la production de la wilaya à hauteur de 2 400 tonnes par an. Il s’agit de la pisciculture en cages flottantes pour la production des loups et des daurades. Pour ce qui concerne l’aquaculture, comme la pêche, le privé est impliqué. Pour cela, nous ne cessons de multiplier les actions de sensibilisation des industriels pour qu’ils viennent investir dans ce créneau. Nous comptons les intéresser pour qu’ils diversifient leurs activités, car il faut souligner que, mis à part les bateaux qui sont fabriqués en Algérie, tout est importé y compris les simples filets.

En attendant, le poisson coûte cher à Béjaïa et la sardine est à 600 DA le kg…

Tout d’abord, il faut savoir qu’il y a une réduction de la production de poisson bleu à Béjaïa en plus du fait que celle-ci soit consommée également dans les wilayas limitrophes. Il faut se rendre à l’évidence que les habitudes alimentaires des algériens ont commencé à changer. Les différentes maladies et la cherté de la vie ont poussé les gens à aller vers le poisson, ce qui fait que la demande dépasse l’offre. Nous allons transiter le poisson pêché par les ports en y adoptant le principe de vente en gros appelé «Halte à marée». Ce système permet le contrôle vétérinaire sur place. Comme le projet de la poissonnerie de la ville de Béjaïa a été relancé, il y aura, donc, une poissonnerie, où se fera la vente aux consommateurs. Il n’y aura plus beaucoup d’intermédiaires, ce qui implique une diminution automatique du prix de vente au détail.

Comment expliquez-vous la diminution de la production à Béjaïa, alors que dans d’autres régions du pays, c’est l’exact contraire qui est constaté ?

Du point de vue marin, on n’a pas été gâté par la nature. Le plateau continental de Béjaïa est accidenté, ce qui fait qu’il y a un manque de poisson, particulièrement le poisson bleu qui ne vit pas dans les fonds marins. Le chalutage ne peut se faire dans les fonds, ce qui n’est pas le cas du côté, comme l’Ouest algérien, où le plateau continental est plat. C’est pour cela que l’aquaculture est une nécessité pour notre wilaya. Cependant, il est utile de préciser qu’il n’y aura pas d’aquaculture dans les zones de pêche ou zones protégées. Celle-ci ne peut se développer au détriment de la pêche. Avec les deux ports de pêche de Tala Yilef et Béni K’Sila qui disposeront de plus de 180 postes d’accostage, il y aura de nouveaux chalutiers et sardiniers qui y activeront, ce qui fera qu’on aura une meilleure production. Néanmoins, pour satisfaire la demande, il faut impérativement développer l’aquaculture. Pour ce qui est de la flottille, Il y a 297 unités, dont 21 chalutiers, 52 sardiniers et 224 petits métiers, et parmi ces derniers, seuls 61 sont actifs, alors que les 163 autres existent uniquement sur papier. Pour les chalutiers, ils font le chalut pélagique, comme les sardiniers, en plus du chalut de fond qui permet d’avoir du poisson blanc sur le marché. Quand aux chalutiers, qu’on dit avoir aperçu au bord de la mer, je signale encore une fois, que ceci leur est interdit et les gardes-côtes veillent sur le respect de la loi en la matière. Ils sont, d’ailleurs, impitoyables. Ils verbalisent toute personne surprise en violation de ladite loi. Ces pêcheurs indélicats savent qu’en raclant les fonds de moins de 40 mètres, ils massacrent les ressources au niveau de ces zones de frai, où le poisson se reproduit.

Quelles sont les formations dispensées pour les métiers de pêche ?

On a déjà formé 3 sections de 120 marins pêcheurs au centre de formation professionnelle de Melbou. Nous sommes en train de former des marins pêcheurs, des mécaniciens et des capacitaires au centre de Béjaïa ville et des marins pêcheurs à l’apprentissage au CFPA de Toudja. Nous allons lancer, prochainement, une formation de 3 jours, au profit des agriculteurs pour qu’ils puissent entretenir l’empoissonnement de leurs bassins d’irrigation. Cela a un double intérêt : fertiliser les eaux et produire du poisson.

Un mot pour conclure ?

Je lance un appel à tous les industriels, et ce, afin de contribuer au développement de l’aquaculture dans notre wilaya, pour permettre une autosuffisance en matière de poisson qui est fortement recommandée dans l’alimentation.

Entretien réalisé par A. Gana

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