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Tizi-Ouzou - Clôture du colloque de la didactique des langues maternelles : Sept recommandations pour la promotion de tamazight

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La prise en charge effective de tamazight passant nécessairement par une formation de qualité pour les enseignants, prenant en considération les spécificités géolectes et culturelles est une condition sine qua non pour son enseignement, préconisent les spécialistes.

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Il suffit de deux journées de communication, lors d’un colloque à l’université Mouloud Mammeri, pour que des universitaires puissent mettre en surface la complexe problématique de l’enseignement actuel de tamazight qui, et ce n’est un secret pour personne, bute sur des obstacles méthodologiques, pédagogiques et parfois d’ordre politique, dans le sens où son officialisation comme langue nationale et officielle n’est que «symbolique», pour paraphraser quelques intervenants, en témoigne son enseignement, à ce jour, facultatif.

Dans ce même registre, cette réticence peut s’expliquer, selon, les intervenants, par la non-prise en charge des spécificités relatives à chaque variante. Dans une enquête de terrain, Haroun Fegas, doctorant en sciences du langage, met en exergue «la nécessité de préparer le terrain avant son introduction, semble de plus en plus urgente, en vue des attitudes sociales observées : le fait qu’en l’absence de toute campagne d’information, plusieurs personnes ignorant tout du tamazight, sont contre son enseignement…».

Pour illustrer ses propos en s’appuyant sur l’analyse de son corpus basé, entre autres, sur l’introduction de tamazight dans le système éducatif à Jijel, le conférencier soulignera que «le tamazight est associé à la seule région de la Kabylie, et qu’une partie de ces enquêtés (enseignants et élèves) n’ont pas la moindre idée de ce qu’est le tamazight». L’enquête sociolinguistique révèle, également, que beaucoup d’entre eux, y compris des berbérophones, désignent le tamazight par l’appellation de dialecte.

La question de l’enseignement de tamazight dans les milieux arabophones a été soulevée, également. La variante à choisir comme étant une norme avec ses contenus littéraires, ses règles grammaticales et orthographiques, était l’énigme à élucider dans une communication présentée par Koussaila Alik de l’université Mouloud Mammeri. «La généralisation de l’enseignement de tamazight en Algérie, sur tout le territoire, pose des difficultés énormes liées aux aspects sociolinguistiques et didactiques, aux facteurs identitaires et culturels. Il s’agit en premier lieu d’un travail à suivre pour lancer au fur et à mesure cet enseignement en essayant de l’adapter à la réalité du terrain», notera l’orateur.

«L’apport des référents socioculturels pour l’acquisition des compétences en langue maternelle minorée ; le cas de tamazight en Algérie», était le thème de la communication de Samira Amari, maitre assistante à l’université de Béjaïa. A ce propos, elle dira «l’enseignement-apprentissage d’une langue, qu’elle soit maternelle, seconde ou étrangère, ne peut être appréhendé uniquement sous l’angle d’un savoir purement linguistique, car la production langagière n’a pas de sens en dehors de la culture qu’elle véhicule et les locuteurs qui lui confèrent une signification», et d’ajouter «De ce fait, partir de l’élève, de ses pratiques langagières et de ses habitudes sociales et culturelles pour élaborer des savoirs, est l’objectif que doit viser tout programme scolaire, surtout en ce qui concerne l’enseignement-apprentissage d’une langue maternelle minorée, comme c’est le cas de la langue amazighe en Algérie».

Malheureusement, aucune trace faisant allusion à cet enseignement n’est mentionnée dans les recommandations de ce colloque. Ce rendez-vous a été, aussi, une occasion pour aborder la place de tamazight dans les réseaux sociaux et son enseignement par l’intermédiaire des supports audiovisuels, d’où la nécessité de «Mettre en place des méthodes d’enseignement numériques et des banques de données (des supports pédagogiques, dictionnaires…) numériques», recommandés par ce colloque. S’agissant de la traduction, et en particulier, les problèmes de sa didactisation dans les manuels scolaires, l’enseignant-chercheur Kaci Sadi, de l’université de Tizi-Ouzou, révèle que «le choix des textes originaux pour les manuels reste déjà problématique et leur traduction pose beaucoup de problèmes, et suscite également plusieurs questions critiques».

Par ailleurs, et même si des cas de réticence et de refus à cet enseignement sont signalés parfois dans quelques régions du pays, et «au-delà des polémiques politiciennes et idéologiques, son officialisation est d’une extrême importance et il est plus que temps, que des chercheurs universitaires, de spécialités diverses, se penchent sur la problématique complexe de l’enseignement de tamazight, ignorée depuis des siècles», notera Ouerdia Yermeche, professeur à ENS de Bouzaréah, lors de son intervention intitulée «L’enseignement de tamazight à l’ENS de Bouzaréah : Bilan et perspectives».

Enfin, le colloque recommande ce que suit :

Prendre en charge l’enseignement en usage sur le territoire national ;

Elaboration de manuels propres aux variétés en usage, en prenant en considération les référents culturels de chacune d’elle;

Mettre en œuvre une méthode pédagogique au profit des apprenants arabophones ;

Reconsidérer le curriculum de formation de l’enseignant en prenant les spécificités géolectes et culturelles ;

Renforcer les manuels scolaires par la traduction à partir de différentes langues ;

Intégration de tamazight dans la formation en traduction ;

Mettre en place des méthodes d’enseignement numérique ;

Et enfon mettre en place des banques de données (des supports pédagogiques, dictionnaires…) numériques.

F Moula.

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