Bouteflika plaide pour l’ouverture de la scène politique

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De notre envoyée spéciale Wassila Ould Hamouda

C’est un homme mécontent et outré qui s’est exprimé hier depuis la ville des ponts suspendus. Depuis Constantine, où il effectue une visite de deux jours, le premier magistrat du pays a, dans un discours prononcé à l’université des sciences islamiques Emir Abdelkader, à l’occasion de la tenue du 7e colloque portant sur le thème « La démocratie en Algérie : réalités et perspectives » qui coïncide avec la célébration de Youm El Ilm, déploré l’anarchie qui règne dans la gestion de tous les secteurs, le manque du sens de la responsabilité et surtout de la citoyenneté. « Rien ne se fait convenablement et personne ne fait correctement son travail, ni le secteur public ni le privé », fulmine le Président, la colère à peine voilée sur son visage. Et d’enchaîner : « le contrôle sera rigoureux ». Sans ménager personne, ni les soi- disant démocrates, ni les politiciens, ni les élus du peuple et encore moins ces derniers, Abdelaziz Bouteflika profite de son passage à la ville des ouléma pour rappeler les bases de la morale sur la citoyenneté et sur ses principes, qui, d’après lui, se sont évaporés. Pour preuve édifiante, dit-il, la saleté de nos villes. Le président de la République qui, cette fois-ci, ne s’est pas limité à son discours protocolaire, n’est pas allé par trente six mille chemins pour secouer, une fois de plus, les responsables. Une semaine après qu’il ait tancé une partie de ses ministres lors de sa tournée à Alger, Bouteflika s’en est pris cette fois-ci aux leaders de l’Alliance présidentielle. Ces derniers en effet, n’ont pas été épargnés. Bien au contraire, le Président, tout en désignant deux de ses leaders, à savoir Belkhadem et Soltani, l’ayant accompagné à Cirta avec d’autres ministres tels Benbouzid, Haraoubia, Ghoul, Chakib Khelil, Zerhouni et Khalida Toumi…a déploré le fait que les partis politiques « n’activent que dans les élections sans prendre la peine d’expliquer par la suite aux citoyens les tenants et les aboutissants des lois adoptées par leur instance ». A ses yeux, la « pratique politique démocratique ne saurait se réduire à la tenue périodique d’élections pluralistes, à la séparation des pouvoirs et aux droits d’exercer certaines libertés fondamentales ». Mais, elle imprègne dans la « diversité des opinions, fondée sur le dialogue ouvert et intransigeant et dont l’objectif ultime est de promouvoir et de préserver l’intérêt supérieur de la nation ». Une chose qui malheureusement fait défaut, souligne l’invité de Constantine. Ce dernier tout au long de son discours n’a pas cessé de mettre en cause le système démocratique algérien. Avec un esprit critique, Bouteflika estime que ce dernier est « incomplet, faible et manque de maturité ». Et d’enchaîner « la démocratie ne saurait être une reproduction de ce qui est entrepris par les autres, au service des ambassades selon leurs réalités et vécus, ni un quelconque produit destiné à être commercialisé ». Une raison pour laquelle, l’orateur a plaidé pour l’ « ouverture de la scène politique », une ouverture qui augurera, dit-il, une nouvelle ère de la démocratie qui favorise l’intérêt du pays avant tout. Il a ainsi souligné que la démocratie a toujours existé en Algérie avec les Amis du Manifeste et de la Liberté et avant eux, avec Abdelhamid Ben Badis. En évoquant les vertus du Cheikh, le Président souligne que Ben Badis fait partie de ceux qui ont défendu l’Islam et la langue arabe et également les dimensions « amazighs ».

« Pas de retour aux années 90 »La visite à Constantine, fut pour le Président une autre occasion pour reparler de la Charte et de la réconciliation nationale et de rappeler que la décision n’a pas été prise à la légère mais parce que « nous y sommes obligés, car il n’ y avait pas d’autre alternative ». La prise en charge des familles des terroristes est indiscutable dans la mesure où nul n’est responsable des actes des autres. « Nous devons les prendre en charge car elles font partie de nous », lance Bouteflika avant d’ajouter : « La justice a agi avec célérité dans l’application des textes de la Charte et cela dénote la crédibilité de notre justice et que nous avons été à la hauteur de nos engagements ». Pour lever toute équivoque, Bouteflika a explicitement écarté l’éventualité du retour de l’ex-Fis sur la scène politique. Son niet est catégorique. « Certains croient que je suis partisan des années 90 mais cela est faux », souligne-t-il avant d’ajouter « tous les extrémistes laïques ou islamistes seront combattus” tout en reconnaissant qu’on n’en a pas encore fini avec le terrorisme. Sur le même ton, Bouteflika, s’agissant de l’évangélisation, a affirmé qu’il ne serait pas tolérable de laisser quiconque pratiquer son culte illicitement. « Nous exigerons des comptes à tout le monde ». « Ciao bello » a dit le premier responsable du pays à « tous ceux qui rejettent le pays et espèrent partir ailleurs ». Des projets inaugurés et un accueil chaleureux.Lors de cette visite, 12e du genre, le Président a eu droit à un bain de foule. Tout le monde s’est mobilisé pour accueillir son Président. Les Constantinois étaient au rendez-vous. Certains ont même profité de l’occasion pour exprimer leurs préoccupations quant à la cherté de la vie. Plusieurs projets en chantier ont été inaugurés à l’occasion. Citons entre autres le nouvel accès de la nouvelle aérogare, la trémie à la cité Zouaghi, l’institut Ben Badis et l’usine d’insuline. Pour aujourd’hui, d’autres chantiers seront lancés et visités par le président, notamment la nouvelle ville Massinissa.

W. O. H.

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