Confessions

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Samir a 47 ans

Il y a plus d’une année, il avait tenté de mettre fin à ses jours en se mettant sur la voie ferrée. Il s’en sort avec un handicap moteur. Aujourd’hui, Samir profite de chaque moment de la vie. Il revient sur ce qu’il appelle « mort sociale ».

« Ma femme m’avait quitté, mes enfants l’ont suivie. J’étais terriblement seul. j’allais me jeter du 3e étage. Je me suis ressaisi à la dernière minute. Psychologiquement, ma situation empirait. Le traitement n’avait aucune emprise sur ma mélancolie. Les choses allaient de mal en pis. Tout s’obscurcissait. Je ne voyais rien, j’étais dans un état second. J’avais décidé d’en finir avec la vie. En fait, j’avais plus envie d’en finir avec l’asile où je ne voulais pas retourner… Je m’en sors avec des séquelles atroces. J’ai perdu l’usage de mes jambes. Je mesure, aujourd’hui, la gravité de mon geste. Bizarrement, je ressens un apaisement moral. Je veux profiter de la vie en savourant tous les instants. Je ne saurais dire s’il faut être fou ou courageux pour décider de mettre fin à ses jours. Je ne sais pas. Toutes les croyances religieuses n’ont aucun impact sur la décision. Il ne faut jamais perdre de vue qu’avant de passer à l’acte, le suicidaire est mort socialement”.

Djamila est aujourd’hui une jeune fille épanouie

Il y a 15 ans elle avait tenté de mettre fin à ses jours en avalant de la mort aux rats. Elle revient sur ce triste souvenir.

« J’étais adolescente et mal dans ma peau. J’étais grosse et me sentais prisonnière d’un corps que je n’aimais pas. Je me détestais. Je me sentais étrangère à l’environnement féminin que je subissais chez moi dans mon village. Au collège, c’était une autre horreur. Les garçons ne s’intéressaient pas à moi. Le seul univers qui m’arrangeait était celui des adultes (les hommes). Mais il m’était inaccessible. Mon geste était un SOS. Mais ce n’est qu’aujourd’hui que j’ai conscience de tout cela. Je suppose que si à l’époque on s’était intéressé à moi, on m’avait écouté, je n’aurais jamais songé à mettre fin à mes jours”.

Said a perdu son frère, il y a près d’une année. Il raconte le triste événement

Son frère s’est suicidé l’année dernière en emportant avec lui son secret dans la tombe. Mohamed, alors âgé de 31 ans, était tombé fou amoureux de sa cousine. Une idylle qui a rapidement pris fin lorsque son oncle s’est opposé à leur union. Peu de temps après, la dépression s’est installée. Jusque-là, Mohamed s’en sortait plus ou moins, ses amis et sa famille n’avaient rien remarqué d’anormal dans son comportement. Son frère Said déclare que son internement à l’hôpital psychiatrique de Tizi-Ouzou semblait avoir porté ses fruits et que la santé mentale s’était nettement améliorée. Mais, sans aucune raison apparente, Said retrouve son frère pendu à une solive de la maison familiale. Avec du recul, Said se remémore les phrases révélatrices qui annonçaient la décision finale de Mohamed. ‘’Un jour tu te rappellersa, combien ma présence te manquera’’. ‘’Quand je serai parti, tu devra affronter les tâches agricoles seul’’. Ces phrases auraient dû m’interpeller, mais je pensais que mon frère pensait à fuir le pays, à s’exiler vers la France où se trouve sa cousine. Aujourd’hui, toute la famille regrette amèrement l’attitude passive envers mon défunt frère.

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