Entre choix et contraintes de la société

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Quand on choisit de rester célibataire par manque de moyen de fonder un foyer, avons-nous tellement le choix ? Quand on devient «vieille fille» parce que plus personne ne tape à la porte, depuis des années déjà, avons-nous également le choix ? Quand on vit en solo parce qu’on n’a pas trouvé chaussure à son pied, l’avons-nous réellement choisi ? Alors chez nous plutôt que d’appartenir à une de ces deux catégories, on a crée une troisième : Celle des célibataires qui choisissent de subir le célibat. Là ça change tout. Parce qu’au fait, la définition même du célibat est différente chez nous. Si la définition valable chez nous est celle que l’on retrouve sur l’ensemble des dictionnaires, la définition moderne du célibat est différente. Si pour nous le célibat est défini comme la condition d’une personne qui n’est pas mariée, ailleurs le célibat signifie ne pas être en couple, quelle que soit la nature de la relation. Dans ce cas là, ce n’est généralement qu’après plusieurs mois de séparation que l’on peut affirmer appartenir à l’une ou l’autre des catégories suscitées. Dans ce cas également c’est celui qui est en raison de la rupture qui impose le célibat à l’autre. Ceci n’étant pas courant chez nous, penchons-nous tout simplement sur le cas des célibataires «non mariés». Et là, on devrait signaler la différence de perception du célibat pour les deux sexes. «Si elle est célibataire, c’est qu’elle cache quelque chose», dit-on souvent des filles célibataires. «Le pauvre n’a pas trouvé la perle rare», dit-on par contre du célibataire mâle, quel que soit son niveau d’instruction et son appartenance sociale. Les préjugés vont, donc, bon train vis-à-vis des célibataires, arrangeant certains et dénigrant d’autres. Il est rare d’entendre dire qu’un homme est resté célibataire parce qu’il ne fait rien de sa vie et qu’il ne sait même pas se servir de ses deux mains. Mais on se permet de juger une femme qui a «tardé» à se caser même si ce qui l’en a retenu est dû à une carrière importante, à de longues études ou tout simplement à des exigences, souvent justifiées, concernant le choix du partenaire. Evidemment, on ne porte généralement pas d’auréole quand on choisit son partenaire, notamment si on est d’âge mûr. On n’est pas dans le social. Quand on est célibataire et que l’on souhaite rompre avec cet état de fait, autant que ce soit avec une personne qui nous corresponde intellectuellement parlant. Même si dans toutes les premières rencontres, tout se base sur le physique et sur les premiers échanges verbaux, quand on est un célibataire mûr, on ne s’arrête pas à tant de «futilités», disent les plus sages. Qui n’a pas trouvé dommage de voir une femme gâcher sa vie avec un raté juste parce qu’elle a été contrainte de rompre avec son célibat pour faire plaisir à une société qui verra en elle une exclue parce qu’un jour justement, elle décidera de quitter cet homme avec lequel elle n’a aucune affinité ni ressemblance.

C’est le cas de Zahia, 53 ans : «Je me suis mariée assez tard, enfin pour ma génération. J’ai dû attendre de terminer mes études en psychologie. J’ai fait la bêtise d’épouser un homme moins instruit que moi. C’était un voisin. Il m’avait promis de continuer à travailler après notre mariage. Il avait respecté cet engagement au début mais il a vite changé d’avis mais après avoir pris le soin de me faire deux enfants. Je me suis battue jusqu’au bout. Lorsque ma vie s’est transformée en enfer, mon père m’a suggéré de le quitter. Ce que j’ai fait. Ma famille m’a beaucoup aidée et soutenue durant toutes ces années. Mes deux garçons sont aujourd’hui des diplômés universitaires, mon mari, qui s’est remarié avec une femme illettrée, se retrouve avec deux autres garçons qui n’ont pas dépassé le cap du CEM. Je me suis juré de ne pas me remarier tant que je ne trouverai pas le profil d’homme qui corresponde au mien. Résultat : je ne me suis pas remariée alors que mon fils aîné s’est fiancé il y a plus d’une année !». Les parents de Zahia, même s’ils ont du faire des efforts pour se repentir, ont mis beaucoup de pression sur leur fille avant son mariage, en raison du «qu’on dira-t-on» qui reste de mise à chaque fois qu’une fille dépasse, même de peu, la «date limite de consommation». Ils le regrettent aujourd’hui. Zahia, quant à elle, regrette sa faiblesse d’antan. Elle aurait dû se battre pour son avenir.

Et si je le valais bien ? !

C’est le cas de bien des femmes d’aujourd’hui qui restent impassibles à la pression sociale et familiale et assument leur choix.

Fouzia 53 ans, cadre dans une entreprise privée, en est l’exemple concret : Même si elle a dû payer cher sa force de caractère. Après un premier mariage qui a duré deux mois, Fouzia a dû quitter son mari pour incompatibilité intellectuelle. Elle a quitté Paris où elle résidait avec son conjoint après s’être rendue compte qu’elle a fait une grosse bourde en cédant à la pression de sa famille qui voyait en ce prétendant le mari idéal pour leur fille. De cette union est née une jolie petite fille qui n’a pour famille que sa maman car tout le monde a tourné le dos à Fouzia après son divorce, même ses propres parents. `

«Je suis rentrée à Tizi-Ouzou, je me suis trouvé un F2 pour ma fille et moi et un boulot qui n’avait rien à voir avec ma formation. On a vécu comme des princesses ma fille et moi et j’ai tiré un trait rouge sur le mariage. Il n’était plus question pour moi de refaire ma vie avec qui que ce soit, surtout pas le premier venu histoire de se caser. Mais si la perle rare venait à scintiller un jour devant mes yeux, je ne la laisserai certainement pas passer. Et la perle rare n’a voulu se présenter que l’été où ma fille a obtenu son baccalauréat.

On aurait dit que Dieu ne voulait m’accorder ma part de joie que lorsque j’aurai accompli ma part de responsabilité envers ma petite princesse. Cette dernière devait partir à des centaines de kilomètres pour ses études. Et Dieu a voulu me donner une consolation. Je n’ai pas attendu pour rien. Mon célibat était voulu et sa rupture était une évidence lorsque j’ai trouvé chaussure à mon pied», raconte Fouzia. Si elle a choisi son célibat par expérience, il en est des femmes qui le choisissent par appréhension de l’avenir et par peur du lendemain. Elles sont sûres, avant même de tenter l’expérience, de l’échec. Elles sont persuadées que leur idéal d’homme n’existe pas. Il n’est pas seulement question de niveau d’instruction, de condition sociale ou physique. Il est également question d’ouverture d’esprit et bien d’autres paramètres qui échappent souvent à l’entourage de ces femmes souvent critiquées et jugées.

Zazi, 49 ans, représente bien cette catégorie de célibataires : Elle est enseignante en mathématique dans un lycée de la périphérie de Tizi-Ouzou. Elle ne se voit nullement ôter la liberté qu’elle a décrochée non sans heurt auprès de ses parents qui lui tiennent toujours rigueur de son «affront» perpétuel. «J’ai des parents très vieux jeu.

Des Kabyles, de vrais Kabyles ! je suis la seule diplômée à la maison parmi mes frères et sœurs. Ces dernières sont mariées. Donc, deux soucis de moins pour mes pauvres parents qui trouvent que je suis plus compliquée à maîtriser qu’une armée de garçons. Ma liberté j’ai dû la payer chère, à coup de gueules et même de poings. Mon frère aîné m’a tabassé un jour parce que je suis partie en voyage seule sans demander à personne ni même les informer.

J’ai fait le nécessaire pour qu’ils ne puisses plus lever la main sur moi à l’avenir. Maintenant je voyage comme je veux et où je veux sans la permission de qui que ce soit. Alors franchement je me vois mal détruire toute la liberté et l’aisance dont je jouies pour un homme qui ne fera que me gâcher la vie.

A mon âge, on ne fait pas de concessions. Je vis ma vie comme je l’entends et je ne suis pas prête de gâcher ça.

D’autant que le mariage ne m’apportera rien d’extraordinaire. Des hommes, j’en rencontre beaucoup. J’aurai fait un effort pour avoir des enfants, seulement dans mon cas, ce n’est même pas la peine de tenter. Alors pourquoi s’affliger des contraintes quand on peut vivre sans ?». Les hommes aussi préfèrent le célibat à la «prison».

Djamel, 44 ans, propriétaire et gérant d’une PME, spécialisée dans le domaine de la communication, nous le raconte si bien : «Je mène une vie de rêve. Je ne me vois pas encore la gâcher avec un mariage. Je sors, je voyage et je fais la fête à chaque fois que cela me chante. Une femme n’accepterait jamais ce mode de vie et ne le mènerait certainement pas avec moi, d’autant que si je me marie, je n’épouserai pas une midinette à peine majeure. Moi, j’aime les femmes mûres et pour le moment je n’en ai pas trouvé pour me suivre dans mes délires. Les femmes mûres sont généralement très raisonnables et plutôt casanières. Alors j’attends que la folie me passe pour en choisir une de ce type. Pour le moment je m’éclate et je le mérite bien !». Il est évident que le célibataire est avant tout une personne libre ! Seulement, Zazi et Djamel ne savent pas que cet atout va malheureusement perdre de sa valeur et même devenir une faiblesse avec le temps, notamment dans une société comme la nôtre bien que cette dernière soit perdue entre le conservatisme et l’hypocrisie, notamment ces dernières années. Tout se fait chez nous depuis quelque temps et tout est permis à condition que cela se fasse en cachette. L’argument de la liberté n’est, donc, pas pour arranger les célibataires, plus précisément «LA» célibataire. Bien qu’ayant toujours existé, le célibat a pris en effet ces dernières années des formes qui en font l’un des axes majeurs du changement de la société. La vie en solitaire, quand elle est choisie, s’appuie souvent sur de nouvelles priorités : Celle de rester soi-même face à tout et à tous et à celle du contrôle de «maîtrise de son existence». Le célibataire s’interroge fondamentalement sur la possibilité de vivre bien à deux et préfère rester seul dans le cas échéant. La notion du contrôle de soi revient souvent. C’est, parait-il une caractéristique des temps modernes. Si ce mode de vie est choisi dans ce cas, il existe une catégorie de célibataire et ne demande qu’à avoir le choix. Il s’agit de ceux qui ne peuvent pas sauter du coq à l’âne et qui restent fidèles aux élus de leurs cœurs. Ceux-là même qui ont besoin de temps pour panser une blessure affligée par une relation amoureuse qui s’est mal terminé.

C’est le cas de Djazia, 38 ans, secrétaire : «Je n’arrive pas à dire oui en dépit de nombreuses demandes en mariage que je reçois. Je ne me vois pas épouser une autre personne autre que celle avec qui j’ai vécu une partie de ma vie. J’ai connu mon amoureux à l’âge de 15 ans. On s’est promis mille choses. On a été contraints de nous séparer pour des raisons familiales. Ce qui est dur c’est que nous nous retrouvons dans une situation floue. Ni, nous sommes ensemble, ni, nous ne voulons tourner la page. Je ne suis toujours pas mariée et n’ai consenti à connaître un autre que lui. C’est pareil pour lui. Nous souffrons tous les deux et notre célibat même s’il semble un choix ne l’est pas forcément. Je ne trouve pas de solution à mon problème autre que le boycott du mariage en attendant que la situation s’éclaircisse», nous raconte Djazia qui se fait en dépit de tout quelques soucis concernant sa capacité de fécondité à l’avenir. L’amoureux de Djazia, lui, a été retenu par ses nombreux engagements et responsabilités envers sa famille, selon elle. Prétexte ou argument solide, nombreux sont les célibataires qui sont contraints de choisir ce mode de vie pour pouvoir se consacrer à leurs familles et jeunes frères et sœurs.

C’est le cas de Rachid, 26 ans, pharmacien : «Je suis soutien de famille depuis peu. J’avais de gros projets d’avenir avec ma dulcinée. Je n’en ai rien gardé. Depuis que mon père nous a quittés, il y un peu plus d’une année tous mes projets sont tombés à l’eau. je dois m’occuper de mes petits frères et sœurs alors qu’on devait faire une demande d’immigration au Canada avec mon ex-copine. Je dis ex. parce qu’elle a choisi de me quitter au lieu de partager mes soucis. Je lui ai proposé de faire notre vie auprès de ma famille, elle a refusé parce que nous sommes de condition modeste et que j’ai à peine cumulé 9 mois de travail. Des salaires qui partent dans le budget familial. Mes responsabilité n’intéressent plus personne et surtout pas celle que j’ai aimé et cru sincère. Le mariage, alors, ce n’est pas pour aujourd’hui ni pour demain pour moi. J’ai de très longues années devant moi. Je ne les verrai certainement pas passer vu que je serai occupé à aider ma mère à faire grandir mes trois frères et sœurs. Le cadet a trois ans. Faites vos comptes !».

L’inégalité jusqu’au célibat !

Rester célibataire de nos jours n’est pas une fatalité. A chacun ses raisons et ses motivations. Mais l’assument-ils tous de la même manière? Nombreux sont ceux à affirmer que les femmes vivent mieux leur solitude que les hommes, ayant désormais acquis leur autonomie financière et professionnelle, et surtout la liberté de diriger leur vie. Seulement si les femmes vivent bien leur célibat aujourd’hui il n’en demeure pas moins que les hommes sont moins sujets aux questionnements et commentaires. Les femmes vivent seules parce qu’elles ont un problème ou qu’elles sont de mœurs louches, entend-on encore trop souvent. Il y aurait, selon certaines statistiques disponibles au niveau de certaines associations, à peu près autant de femmes que d’hommes célibataires. Mais les hommes célibataires sont souvent jeunes. Alors que les hommes «s’installent», les femmes demeurent dans la vie célibataire pour la simple et unique raison que les hommes tardivement prêts à fonder une famille dénichent la perle rare parmi les plus jeunes, laissant pour compte les femmes mûres et d’âge correspondant. Ces dernières que l’horloge biologique incite à avoir des enfants avant la quarantaine ne trouvent souvent pas «preneurs». Il faut attirer l’attention aussi sur le fait que les femmes célibataires sont souvent des femmes sur-diplômées et que les hommes dans cette situation sont souvent des ruraux ou en échec social. Ce qui n’arrange en rien la situation.

Et si on disait : “Stop” !

La plupart des célibataires, même s’ils s’entêtent à raconter que leur situation est voulue et choisie et qu’elle les arrange à plus d’un titre, ne doivent pas apprécier autant la solitude. Leur quête à rompre avec ce célibat qui les contraints souvent à rester seuls et passer à côté des joies de la vie et de l’amour, est souvent cachée. Si l’on manque affreusement de clubs de rencontres et bien d’autres possibilités de faire des rencontres ciblées avec des célibataires dans la même situation que soi, les célibataires endurcis de nos jours trouvent mille façons et ruses de faire leur recherche de l’âme sœur loin des yeux indiscrets et jugeants de la société. Si les célibataires, avec les méthodes classiques de rencontres, doivent faire des efforts pour vaincre et surpasser leur timidité, pour déclarer leur flamme une fois l’hameçon mordu, pour concrétiser un coup de foudre, oser sortir, aborder, se dire que ce n’est jamais trop tard pour bien faire, jamais d’appréhension, les célibataires de nos jours, conscients de la dureté de cette épreuve, préfèrent une méthode simple et souvent efficace : Il s’agit du net. Les rencontres sur le net font ravage de nos jours. Et les célibataires y trouvent leur compte. C’est discret et souvent très efficace. Et puis quand on a été seul trop longtemps, on souvent du mal à se lancer sans se protéger. Et quoi de plus efficace comme protection que le net ? On ne se dévoile qu’une fois sur de son choix. Chat, forum, maïl, speed-dating… Ces nouveaux rendez-vous du cœur permettent-ils réellement de trouver l’âme sœur ?

La réponse, c’est Nadia, 52 ans, femme au foyer, qui nous la donnera : «Je suis mariée depuis 3 ans à un homme exceptionnel. Je dois cela au net et à ma jeune voisine, qui a pensé à me faire une fiche sur un site de rencontre. Elle l’a fait en cachette, juste avec la complicité d’une de mes sœurs qui lui a donné une de mes récentes photos. Ma jeune voisine est elle-même mariée grâce aux miracles du net. Elle a, donc, fait la sélection des réponses à ma place, se basant sur des critères généraux qu’elle m’a entendu débiter certainement un jour. Elle a choisi mon actuel conjoint et un autre homme auquel je n’ai pas donné de chance car il réside à l’étranger. Il est hors de question pour moi de laisser ma mère malade et d’aller m’installer ailleurs qu’à Tizi même. Une fois sa sélection faite, elle m’a donc avoué sa «magouille». Je n’ai pu lui en vouloir étant donné sa bonne intention mais j’avais de grosses appréhensions quant au rendez-vous qu’elle m’avait déniché avec Boualem, mon mari actuel. Une demie heure à discuter avec ce dernier m’ont vite rassuré et m’ont poussé une fois l’entrevue finie d’aller prendre la petite voisine dans mes bras. Ayant tardé à me marier, en raison de la santé fragile de ma mère que je ne voulais pas laisser seule, je me suis retrouvée en face d’un homme merveilleux. Un véritable gentleman, doté d’un cœur en or. Ma mère vit actuellement avec nous et il s’en occupe comme il le ferait avec sa propre mère», Nadia est une femme qui a trouvé son bonheur sur la toile du net. Rien de sorcier au fait. En quelques clics, on remplit une fiche renseignements qui va du nom, prénom, adresse, emaïl, aux renseignements sur son physique, taille, poids, style et apparence, aux hobbies et préférences, au niveau d’études. On choisit un pseudonyme. Il vaut mieux qu’il soit simple mais assez attractif. Il vaut mieux éviter de donner son adresse ou son numéro de téléphone aux premiers venus. Si un rendez-vous est fixé, il vaut mieux choisir un lieu public, et disposer de son propre moyen de transport. La prudence n’a jamais fait de mal à personne! Et les surprises peuvent être agréables aussi….Alors à vos claviers !

Samia A-B

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